Sémiotique des apparences corporelles. Textes, images et pratiques de mode et de beauté dans la société française (2004-2008)

Le propos de notre recherche doctorale est d’analyser l’univers des significations construit par les apparences corporelles. Par apparences corporelles, nous renvoyons au résultat d’un ensemble hétérogène de pratiques qui consistent à construire le corps du sujet en corps-image : la surface du corps est ainsi soignée, parée et habillée de signes culturels que tout un chacun devrait pouvoir voir, lire, apprécier et interpréter au gré des interactions, des situations et des contextes.
Notre objectif est d’articuler trois points de vue distincts sur l’univers sémantique du paraître qui sont le langage, le corps et la communication, pour analyser deux formes de médiations écrites sociales du paraître : les formes textuelles liées à la presse féminine et les « formes de vie » associées aux marques commerciales.
L’étude du corps-image passe par l’analyse sémiotique des différents discours et pratiques dont le corps fait l’objet et qui construisent autant de sphères corporelles étayées les unes sur les autres : le soin, le maquillage, le parfumage, l’habillement, l’apprêt. Ce sont tout particulièrement les pratiques cosmétiques de soin touchant à l’épiderme et à la lutte contre le temps qui ont retenu notre attention au cours de l’investigation.
C’est ainsi que nous avons interrogé les récits de l’apprêt du corps dans leurs rapports modaux au sujet destinataire (devoir social / volonté individuelle), dans leurs rapports aux pratiques sociales (prescription / efficience) et dans leurs rapports aux croyances et à la doxa.

La thèse, structurée en deux parties distinctes, se présente comme un diptyque : (1) les conditions de l’applicabilité et de l’opérativité de la théorie sémiotique aux apparences corporelles ; (2) le parcours d’incarnation de l’idéal de beauté et de jeunesse à partir des instances de discours médiatrices que sont les médias et les marques.
La première partie de la thèse porte sur la construction des apparences corporelles en objet d’étude sémiotique et questionne l’applicabilité et l’opérativité de la théorie sémiotique confronté aux apparences corporelles.
L’enjeu est d’exposer toutes les étapes de notre démarche scientifique qui ont permis de générer un modèle d’analyse (1) suffisamment général pour ne pas être un modèle ad hoc et (2) suffisamment réaliste pour se saisir des données de l’expérience (textes, images, produits et pratiques) qui nous étaient accessibles dans le cadre de notre terrain.
C’est en situant les propositions spécifiques et particulières de notre sémiotique des apparences corporelles sous l’égide d’une sémiotique générale et en dialogue systématique avec les sciences humaines et sociales que nous proposons une modélisation recevable tant en termes de scientificité et de cohérence que d’opérationnalité et d’adéquation avec le terrain sur le plan pratique et « réaliste » de sa mise en œuvre face à des textes, à des images, à des discours et à des pratiques bien identifiés.

La question fondamentale qui oriente la structuration de cette première partie concerne le statut opératif de la théorie et de l’ensemble des principes de l’analyse sémiotique. Par conséquent, il importe de préciser (1) les conditions épistémologiques et gnoséologiques de connaissance, (2) les conditions théoriques et conceptuelles de l’analyse et (3) les conditions méthodologiques de l’analyse proprement dite.
Concrètement, la première partie se compose de trois chapitres qui visent à établir progressivement une modélisation des apparences corporelles et du corps apprêté que nous finissons par conceptualiser en « corps-image » :

• Chapitre Premier : « Les apparences corporelles et le langage »
• Chapitre 2 : « Le corps, la communication et les pratiques du paraître »
• Chapitre 3 : « Adéquation du modèle, corpus et épreuve du terrain »

La seconde partie découle d’une restriction volontaire du champ possible d’étude et porte sur l’analyse des discours médiatiques et des discours commerciaux touchant à la problématique du rajeunissement épidermique.
Ayant en effet construit notre sémiotique des apparences corporelles, nous circonscrivons l’enquête aux seuls univers cosmétiques que nous étudions à partir de la presse féminine et des discours des marques de cosmétiques, tout spécifiquement, des marques sélectives haut de gamme et de luxe. Le fil conducteur de cette enquête consiste à étudier le parcours d’incarnation de l’idéal de beauté de notre société en focalisant l’attention sur la question de l’âge, du vieillissement et de la maturité.
L’enjeu de cette partie est d’expliciter la modalisation conditionnelle du sujet d’expérience et sa construction passionnelle, cognitive et pragmatique par les récits de la beauté. Dès lors, l’étude du parcours d’incarnation de l’idéal de beauté et de jeunesse par le sujet d’expérience passe par un questionnement sur le rôle et le fonctionnement de deux médiations écrites socialement organisées que sont le magazine féminin et la marque de cosmétiques.
Cette partie se compose de deux chapitres d’étude :

• Chapitre 4 : « Idéal de beauté et médiations médiatiques »
• Chapitre 5 : « Croyance cosmétique et discours de marque »