De la place Tourny à la place Jourdan, une évolution à travers les siècles
La création d’une place au XVIIIe siècle
Le quartier Tourny se situe à l’ouest du cloaque extra-muros[1] du château de Limoges[2]. Entre le début du XVIe siècle et la fin du XVIIe siècle, l’aspect général urbain reste à peu de chose identique. Il faut attendre le XVIIIe siècle pour que des projets d’aménagement se manifestent sur cette zone alors en marge de la ville avec l’intervention de deux intendants de la ville : Louis Urbain Aubert de Tourny (1730-1743) et Anne Robert Jacques Turgot (1761-1774). Au cours du siècle, la destruction des fortifications a entraîné une ouverture de la ville vers l’Est en direction de l’abbaye Saint-Augustin permettant la construction d’une nouvelle place, à l’emplacement du fossé ainsi que sur les vestiges d’un cimetière médiéval.
En effet, au XVIIIe siècle la préoccupation n’est plus de protéger les villes contre les agressions extérieures. Le débastionnement est désormais possible, s’accompagnant de l’amélioration des commodités telles que la voirie ou l’assainissement, et d’espaces verts avec la création de jardins, places et promenades. C’est dans ce contexte urbanistique que se clôt la phase marquée par le manque d’organisation de l’espace à l’est de la ville « du Château ». En 1730, Tourny, Intendant de la généralité de Limoges, décide d’exécuter des travaux de terrassement dans tout ce secteur afin d’assainir le quartier et de le transformer en une avenue rectiligne le vieux chemin conduisant à l’abbaye Saint-Augustin. Il crée une porte, une allée rectiligne et une place conduisant à l’abbaye bénédictine de Saint-Augustin. La porte Tourny, en pierre de calcaire et sur pilotis, terminée en 1743, se situe à l’emplacement de l’ancien éperon de Saint-Martin qui tombait en ruine (visuel 2). Ces modifications permettent la liaison entre le Château et la Cité. La place Tourny et son allée rectiligne conduisent à l’abbaye Saint-Augustin, d’autres édifices religieux les entourent : à l’Est l’abbaye de Saint-Martin-lez-Limoges devenue couvent des Feuillants et l’église Saint-Paul, au Sud le couvent des Cordeliers et à Ouest l’église Saint-Pierre-du-Queyroix. Cette place est ainsi un véritable carrefour des sensibilités catholiques avec la présence de trois grands ordres : cistercien, bénédictin et franciscain.
L’intendant Turgot est nommé en 1761. Durant son mandat il établit un plan d’urbanisme et d’alignement avec l’aide de l’ingénieur Trésaguet et du dessinateur Alluaud. Les remparts sont démolis afin d’y aménager un boulevard associé à des places à formes géométriques évitant l’engorgement de la ville. Le travail débuté sous l’intendance de Tourny est ainsi prolongé. La marque de Turgot sur la place Tourny et ses alentours est moindre, la place correspondant déjà aux aménagements classiques du siècle : ouverture vers les faubourgs et place rectiligne. Seule la création de deux axes de circulation modifie l’espace : l’avenue Tourny et l’avenue du Crucifix sont construites de part et d’autre de l’abbaye des Feuillants. Si l’avenue Tourny n’occasionne aucun bouleversement[3], celle du Crucifix empiète sur les terres de l’abbaye, lui imposant ainsi un réaménagement. Ce projet, présent sur les plans dès 1775[4], n’est réalisé qu’en 1854[5]. A cette période, la place devient un lieu de manifestation important. Le 8 septembre 1774 s’y déroule un feu de joie pour célébrer la nomination de Turgot au contrôle général des finances avec le lancement d’un feu d’artifice. En 1785, Bance, le physicien machiniste de la ville, y fait lancer « deux globes aérostatiques en papier d’environ quinze pieds de diamètres »[6]. Cette caractéristique de la place s’accentue durant la Révolution. Elle devient le théâtre de grandes solennités patriotiques, avec plusieurs événements marquants tels que le champ de revue de la milice citoyenne, la fête de la Fédération, la proclamation de la Constitution, la bénédiction du drapeau du IIIe bataillon de volontaires de la Haute-Vienne, la plantation d’un arbre de la Liberté, ainsi que les exécutions à la guillotine des peines capitales prononcées par le tribunal révolutionnaire. Durant cette période, la place connaît plusieurs changements de noms : place d’Armes, champ de la Confédération puis place de la Fraternité. La porte Tourny est elle aussi rebaptisée pour devenir la porte de la Fédération, son inscription en latin est alors remplacée par la date de la fête de la Fédération (« 9 maii 1790 »).
La fermeture du couvent des Cordeliers et de son église en 1791 permet l’installation de manufactures de textiles dans certains de ces bâtiments, notamment la « Maison de roulage de messieurs Pouyat Frères », s’ajoutant de cette manière aux premières teintureries et fabriques de tissage, rue des Vénitiens, et à la « Manufacture Royale Laforest », créée en 1745. Cette dernière, à l’aube du XIXe siècle, emploie près de 1800 personnes. La création, l’aménagement, la remise en état des axes de communication et les événements révolutionnaires font de la place un lieu économique phare de la ville. A la fin du XVIIIe siècle, la place Tourny est devenue le symbole du renouveau de Limoges.
Une place bouleversée par le chemin de fer : XIXe siècle
Parallèlement aux projets urbanistiques du XVIIIe siècle, la découverte du kaolin non loin de Limoges[7], matière première de la porcelaine dure, est un atout essentiel pour l’évolution de la ville d’un point de vue économique, démographique et urbanistique. Cette découverte bouleverse le quartier de la place Tourny. En 1784, la manufacture de porcelaine de Limoges obtient le titre de Manufacture Royale. Mise à l’écart durant la Révolution, l’expansion de la porcelaine reprend durant la première moitié du XIXe siècle. En 1805, cinq fabriques sont présentes à Limoges avec une production d’une valeur de 230 000 francs. En 1848, il existe dix-neuf fabriques et dix-sept ateliers dans la ville avec un chiffre d’affaires estimé à quatre millions de francs[8]. L’arrivée à Limoges de l’importateur américain David Haviland, en 1842, ouvre le marché d’Outre-Atlantique. Les manufactures de plus en plus grandes et nombreuses doivent pouvoir transporter leurs marchandises. La réponse la plus adaptée est la création d’une gare ferroviaire. La gare va s’implanter aux abords de la place Tourny.
Le chemin de fer est un élément emblématique du début de l’industrialisation du XIXe siècle, il centralise des intérêts politiques – unité nationale et homogénéisation territoriale – et l’intérêt économique. Les chemins de fer et leurs gares sont le plus souvent construits en dehors des anciens remparts des villes, où il y a de l’espace libre pour accueillir l’ouverture des voies vers l’extérieur, réaménageant et créant de nouveaux quartiers. L’arrivée du chemin de fer à Limoges constitue une étape cruciale de la croissance urbaine. Elle est le fruit de nombreuses négociations aboutissant à la construction et l’exploitation de cette ligne par la Compagnie privée Paris-Orléans. Le premier train de marchandises arrive de Paris à la gare-terminus de Limoges-Bénédictins[9] le 2 juin 1856. L’arrivée du chemin de fer illustre l’ambition des dirigeants de la ville et modifie la place Tourny.
Si dans un premier temps, la place n’a pas eu le temps de connaître des changements avec l’apparition de la gare-terminus, le projet d’ouverture d’une ligne Limoges-Périgueux bouleverse son aménagement. La création de celle-ci signifie la fin du statut de terminus ainsi que le percement du tunnel des Bénédictins[10] passant sous une grande partie de la ville : de place Tourny à l’hôpital général (actuelle BFM)[11]. Ce tunnel, achevé en 1861, entraîne le réaménagement complet de la place. En effet, sa création nécessite l’achat par la Compagnie Paris-Orléans des parcelles aux alentours de la place afin d’y percer une tranchée à ciel ouvert. La Compagnie choisit cette solution plus simple et moins coûteuse que les explosifs bien qu’elle entraine des dépenses d’expropriation. Afin de couvrir ces frais, des discussions s’ouvrent avec la municipalité : la Compagnie cède gratuitement à la ville la surface de terrain traversée par le tunnel, entre la place Boucherie[12] et la place Tourny, avec la condition que celle-ci y établisse une avenue en ligne droite prolongeant le boulevard de la Promenade jusqu’à la place Tourny. Seule une voie publique pouvait être établie sur ces parcelles, le poids de bâtiment ayant pu faire céder le tunnel[13]. Cet accord permet à la ville de construire une belle et grande avenue, le boulevard de Fleurus. Dans le même temps, cette voie confère une plus-value importante aux terrains mitoyens appartenant à la Compagnie, en offrant une superbe perspective vers la gare que rien n’entache. L’accord s’officialise le 25 novembre 1862[14].
Le projet de rectification de la place Tourny est intimement lié aux autres projets qui bouleversent le quartier de la gare, le quartier des Brettes[15] et la création du boulevard de Fleurus. La rectification est initiée dès 1857, mais il faut attendre 1860 pour qu’une proposition municipale d’alignement cohérente voie le jour, en complément du projet de construction du boulevard de Fleurus. La proposition est celle d’un demi-octogone[16], dont l’un des côtés se confond à l’axe des Bénédictins. Pour la municipalité «une ville aussi importante que Limoges, qui a donné naissance à un si grand nombre d’hommes distingués et illustres ne doit pas rester longtemps sans donner un témoignage de son respect et de sa vénération pour ceux de ses enfants qui ont illustré leur pays natal »[17]. Le projet d’hommage au Maréchal Jourdan se concrétise place Tourny. Elle prend son nom à partir de l’inauguration de sa statue en 1865. Cet hommage est un acte fort en faveur du Second Empire[18]. La municipalité reste tout de même insatisfaite de l’aspect de la place et décide, le 18 décembre 1860[19], de l’agrandir, la transformer en square et d’aligner son grand côté sur l’avenue des Bénédictins. L’embellissement de la place représente l’ambition municipale[20] : régularité, proportions harmonieuses, lignes parallèles et perspective. Le 12 mars 1857, Mademoiselle de Brettes, écrit une lettre au maire de Limoges[21] dans laquelle elle propose de céder gratuitement à la municipalité les terrains nécessaires à l’ouverture de quatre nouvelles rues, afin de mettre en communication les multiples voies existantes bordant la propriété. Cette proposition a plusieurs conséquences, notamment l’augmentation des emplacements futurs à bâtir. Cette zone qui borde tout le Nord et le Nord-Ouest de la place est entièrement réaménagée en un quartier résidentiel avec la création de deux axes routiers quadrillant en 1862 la parcelle initiale : rue des Feuillants et la rue d’Isly. Le quartier des Brettes est, à l’échelle de Limoges, un projet particulièrement ambitieux, intimement lié à la valorisation des abords de la gare. Ces terrains, idéalement situés entre la place Tourny et le Champ de Juillet[22], à proximité immédiate du chemin de fer, possèdent une grande valeur : ils représentent alors la possibilité d’une jonction entre le quartier de la place Tourny et celui du Champ de Juillet. La municipalité impose rapidement une régularisation des constructions, afin qu’elles deviennent un ornement pour Limoges : couvertures en ardoise, façades en pierre de taille uniformes et régulières, établies selon le plan déposé par la ville. L’établissement de ce quartier est l’occasion pour Limoges d’embellir son image sans sacrifices financiers, aucun projet similaire n’existe à l’époque dans la ville. Le 23 juillet 1857 après ces conditions, le conseil municipal « accepte la proposition de Mademoiselle de Brettes pour l’établissement d’un quartier nouveau sur sa propriété de la place Tourny »[23]. La nomination des rues ne se fait qu’en 1861. La première reliant le cours Bugeaud à la place Tourny est nommée rue d’Isly[24]. La nouvelle voie reliant l’avenue du Crucifix au cours Jourdan est finalement nommée rue des Feuillants, en référence à l’ancien couvent. La plus petites des voies porte le nom de rue de Brettes, en hommage à Mademoiselle de Brettes décédée fin 1858. Après le réaménagement des parcelles et axes de circulation en un plan d’ensemble régulier, de nouveaux bâtiments peuvent être édifiés.
L’hôtel de commandement[25] est le bâtiment phare du réaménagement de cette ancienne propriété de Brettes. Après plusieurs difficultés d’accord entre Mademoiselle de Brettes, l’armée et la municipalité : l’inauguration de l’hôtel de commandement à lieu en 1867, revêtant l’aspect d’une maison bourgeoise, implanté au centre d’un jardin et précédée d’une grille flanquée à ses extrémités de deux pavillons. Ce bâtiment marque l’entrée du quartier des Brettes sur la place Tourny. Cet édifice va se trouver intégré à un environnement bâti tout aussi prestigieux. Le Sud de la place, après la fin des travaux d’axes de circulation routiers et ferroviaires, peut être reconstruit. De nombreux lieux de vie emblématiques voient le jour.
A l’aube du XXe siècle : une place haussmannienne ?
A l’aube du XXe siècle, la place Jourdan est méconnaissable. Les nombreuses constructions forment un ensemble architectural neuf. Les bâtiments semblent être construits dans un style haussmannien plus ou moins prononcé. Cette homogénéité n’est pas due, comme à Paris[26], à une décision de la municipalité, mais à deux hommes : Dominique Vergez, architecte, et Eugène Raymond, propriétaire terrien. Le style haussmannien fait référence au Baron Haussmann, préfet de la Seine sous Napoléon III, lequel a entrepris de 1852 à 1870 la modernisation de Paris, alors encore fortement marquée par l’aménagement médiéval. L’objectif était d’aérer la ville, en créant de grands espaces verts, places et axes de circulation équipés d’eau, du gaz et des égouts. En 1859, un règlement architectural vient étoffer ces prérogatives : la hauteur des façades est par exemple fixée à 20 mètres dans les rues de 20 mètres de largeur, la diagonale des toits doit être à 45 degrés, les bâtiments mitoyens doivent être à même hauteur avec les mêmes lignes principales de façade, la pierre de taille est obligatoire pour les façades, etc. La façade est l’élément primordial du style Haussmannien[27].
A Limoges, il faut attendre l’arrivée du chemin de fer pour voir apparaître des habitations édifiées totalement en pierre comme sur l’ancienne propriété des Brettes, à l’arrière de l’hôtel de commandement. Ce style de maison se généralise après l’incendie du quartier des Arènes en 1864, la municipalité édite à sa suite un arrêt interdisant les façades en bois[28]. Limoges voit fleurir des quartiers dans un esprit haussmannien. L’architecte phare est Dominique Vergez, dotant la place Jourdan de cinq édifices. Le premier bâtiment attribué à cet architecte est celui du Cercle de l’Union, inauguré en 1877[29], placé à l’angle de la place Jourdan et du nouveau boulevard de Fleurus. Bâtis sur trois niveaux et un entresol, la façade est en pierre de taille granitique, les façades latérales et sur cour sont quant à elles en maçonnerie enduite. Le rez-de-chaussée est dédié aux commerces, l’étage noble possède un balcon filant et la hauteur de plafond la plus importante. La toiture est dissimulée par une balustrade (visuel 3). La deuxième œuvre de Vergez sur la place est l’hôtel particulier dit « Société Générale » inauguré en 1884. Situé à l’Est du Cercle, entre les rues du 71e Mobiles et du Maupas. Cet édifice est bâti dans les mêmes proportions, matériaux et caractéristiques stylistiques, l’unique différence majeure avec le Cercle de l’Union est la présence d’une imposante rotonde et d’une coupole à l’angle majeur donnant sur la place (visuel 4). Un troisième bâtiment situé à l’Ouest du Cercle, et à l’angle Sud-Ouest de la place (visuel 5), possède, bien qu’il soit moins riche que les deux bâtiments précédents, les mêmes caractéristiques de l’architecture haussmannienne : un ensemble hôtelier au nom changeant (hôtel de la Paix, Grands hôtels Amblard, Hôtel Paix et Caillaud, ajout du Grand Continental Restaurant). La date d’inauguration n’est pas précisément connue. Il est cependant possible de l’estimer : le conseil municipal du 20 juillet 1870 signale en effet « l’emplacement que MM. Pouyat possédaient avenue de Fleurus et place Tourny, et sur lequel M. Raymond, marchand de vins, fait établir de vastes constructions »[30]. Bâti sur cinq étages et un entresol, la façade est en pierre de taille granitique. On peut enfin mentionner l’hôtel « à la Grande Auberge », à l’angle Sud-Est de la place, inauguré en 1890 (visuel 6) mais rapidement détruit (1911) afin d’aligner parfaitement la place[31]. Il possédait lui aussi les principales caractéristiques haussmanniennes. Le propriétaire de ces quatre bâtiments est Eugène Raymond. Il fait partie des grands bâtisseurs de Limoges au XIXe siècle[32].
Dominique Vergez a dessiné d’autres bâtiments de la Place Jourdan : le Grand Café de l’Univers (1888), le magasin et l’entrepôt Lavauzelle (1898) et le Luk Hôtel (1900). Le bâtiment du Grand Café de l’Univers (visuel 7), au centre du carrefour Tourny est inauguré en 1888. Il est semblable aux autres constructions de l’architecte bien que moins monumental. Ces deux derniers travaux font figure d’exceptions. Le bâtiment du magasin d’imprimerie Lavauzelle et son entrepôt, à l’angle de la place Jourdan et de l’avenue des Bénédictins, est inauguré en 1898. Cette construction diffère par son rôle industriel et répond à un besoin différent, celui d’un commerce de manufacture. Bâti sur un niveau et un entresol, le bâtiment possède tout de même des caractéristiques haussmanniennes, notamment l’entrée du magasin encadrée de colonnes surélevées d’un arc plein cintre. Cette entrée remarquable est elle-aussi caractéristique des entrées des grands immeubles bourgeois parisiens ; ceux-ci, même restreints par les divers décrets, signifient leurs richesses par la stylistique de l’encadrement des entrées. Le dernier édifice de la place dessiné par l’architecte Vergez est le grand hôtel de la ville. Le Luk Hôtel ou Central Hôtel, à l’angle de la place Jourdan et du carrefour Tourny, est inauguré en 1900 (visuel 8). C’est l’œuvre la plus remarquable de Dominique Vergez. Construit sur cinq niveaux, le bâtiment civil est, à l’époque, le plus haut de la ville, avec sa façade chargée de volutes, de chapiteaux néoclassiques et son fronton orné des armes de la ville.
A l’aube du XXe siècle, la place Jourdan n’est plus l’espace disparate sans harmonie urbanistique que l’intendant Tourny commença à aménager. Un siècle après elle a trouvé une certaine homogénéité. Seul l’hôtel de commandement est édifié dans un style classique. Cette cohésion architecturale n’est néanmoins pas une volonté municipale mais bien bourgeoise et indépendante, incarnée par les figures d’Eugène Raymond et de Mademoiselle de Brettes, et concrétisée dans les œuvres de Dominique Vergez.
En plus d’une cohérence architecturale, la place revêt une fonction sociale différente du siècle précédent. Cette nouvelle reconfiguration modifie profondément les caractéristiques de l’ancienne place Tourny qui était entourée de congrégations religieuses et de manufactures textile. Au XIXe siècle, dès son réaménagement, les hôtels y sont nombreux : l’hôtel de la Paix (1870), l’hôtel « A la Grande Auberge » (1890) et le Central Hôtel (1900). L’offre hôtelière de qualité était inexistante au début du XIXe siècle[33]. Cette prolifération se justifie par la localisation stratégique de la place située sur l’axe quasi rectiligne rejoignant la gare à la mairie. Cet axe de circulation est essentiel depuis que l’industrialisation mène à Limoges une nouvelle classe de voyageurs d’affaires. L’hôtel de commandement permet l’accueil des nombreux officiers. Ces divers éléments confèrent une certaine vitalité au quartier car, outre l’hébergement, il est nécessaire d’offrir à ces voyageurs sustentation et occupation. Le Grand-Continental, qui fait partie du complexe des Grands Hôtels, est un restaurant fréquenté par cette clientèle de passage. D’autres établissements, comme le Grand Café de l’Univers, le sont davantage par la bonne société de la ville et les officiers de garnison. Le Cercle de l’Union accueille quant à lui l’élite limougeaude.
Pour résumer cette place, créée au XVIIIe siècle dans un but d’aérer de la cité, devient à l’aube du XXe siècle une place centrale de la ville : alliant modernité architecturale et vitalité.
[1] Hors de la ville initiale, hors des remparts.
[2] Voir carte localisation.
[3] Ce nouvel axe suit les remparts des terres des Feuillants.
[4] Projet d’aménagement de 1775, 1Fi155, Archives Municipales de Limoges.
[5] Le projet d’ouverture émane d’une initiative privée et non pas de la municipalité. Cette voie été voulue comme complément à l’édification du Pont-Neuf ainsi qu’à la mise en service de l’avenue du Pont-Neuf (actuelle avenue Georges Dumas). La construction de cette avenue opère un basculement d’influence entre les quartiers du bas et ceux du haut de la ville : l’enjeu étant de la traverser en direction de Paris.
[6] Guibert, Louis. Limoges d’autrefois : la place Tourny et ses alentours. Limoges : impr. de Perrette. [1904], 1904, p.24.
[7] La porcelaine dure est une invention chinoise ancienne que Marco Polo aurait ramenée à son retour d’Extrême-Orient, rapidement toutes les cours se prennent de passion pour ces objets. Dès le début du XVIIIe siècle, des recherches sont entreprises afin de pouvoir recréer en Occident ce matériau. En France les connaissances théoriques sont acquises dès le début de ce siècle, cependant les matières premières sont manquantes. C’est en 1768 que le premier filon de kaolin est découvert à Saint-Yrieix-la-Perche. Louis XV achète le gisement en 1769 et la production de porcelaine devient un privilège royal.
[8] Antoine Perrier, Limoges, Étude de géographie urbaine, Les Éditions du Bastion, Paris, 1939.
[9] Ce nom fait référence à l’ancien monastère Saint-Augustin des Bénédictins.
[10] Longueur de 1.024 mètres
[11] PDF de la SNCF, Inventaire des tunnels ferroviaires de France, 2002, p.329.–> indiquer la réf. lien
[12] Actuelle place Wilson
[13] Clare Fabien, Les Métamorphoses de la ville : l’urbanisme à Limoges sous le Second Empire, Limoges, 2001, p.136 (Maîtrise, histoire contemporaine, limoges)
[14] Ibidem.
[15] Anciennes terres de l’abbaye des Feuillants
[16] Formulation du XIXe siècle pour la forme rectangulaire
[17] Registre des délibérations du conseil municipal séance du 19 mai 1858, 1D1-24, Archives Municipales de Limoges.
[18] Glorification du Second Empire, par la glorification des héros du Premier Empire. Ecrivez vos notes comme si elles étaient des phrases autonomes, non à la suite des phrases commencées dans le texte
[19] Registre des délibérations du conseil municipal séance du 18 décembre 1860, 1D1-26, Archives Municipales de Limoges.
[20] Dossier « bd de Fleurs » 3 O 877, Archives Départementales de la Haute-Vienne.
[21] Registres des délibérations du conseil municipal : séance du 12 mars 1857, 1 D 1-24, Archives Municipales de Limoges.
[22] Quartier récemment réaménagé en promenades se situant aux abords de la gare
[23] Registre des délibérations du conseil municipal séance du 23 juillet 1857, 1D1-24, Archives Municipales de Limoges.
[24] Victoire que le Maréchal Bugeaud avait remporté sur les marocains lors de la conquête de l’Algérie.
[25] Résidence des généraux de la région militaire
[26] Loyer, François. Paris XIXe siècle : l’immeuble et la rue. Paris : Hazan, 1987.
[27] Façades en pierre de taille, rez-de-chaussée et entresol le plus souvent striés de profonds refends et dédiés aux commerces, balcons filants (sans interruption d’une extrémité à l’autre) à l’étage noble (le premier) et au quatrième niveau s’il y a, ainsi que les nombreuses corniches et moulures.
[28] Après le grand incendie des Arènes du 15 Août 1864, M. Othon Péconnet, Maire de Limoges, prit un arrêté en date du 30 octobre 1864 : « A l’avenir toute maison, habitation, construction quelconque édifiée dans la commune de Limoges, devra avoir au moins la façade principale et les deux murs séparatifs des maisons voisines construits en pierres ou autres matériaux formant obstacle à la communication de l’incendie… ». Registre des délibérations du conseil municipal séance du 15 août 1864, 1D1-27, Archives Municipales de Limoges.
[29] Assemblée Générale du Cercle de l’Union, 1877, 4M124, Archives Départementales de la Haute-Vienne.
[30] Registres des délibérations du conseil municipal : séance du 10 juillet 1870, 1 D 1-29, Archives Municipales de Limoges.
[31] Contentieux M. Raymond – Ville de Limoges au sujet de l’alignement, 3 O 879, Archives Départementales de la Haute-Vienne.
[32] Almanach-Annuaire Limousin de 1890, p.185, liste non exhaustive des immeubles dont Eugène Raymond était propriétaire.
[33]Lithographie de l’hôtel de la Paix devenu les Grands hôtels Amblard, Caillaud, de la Paix et Grand-Continental, 46Fi 13334, Archives Départementales de la Haute-Vienne.
Sarah ROUX
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