Répondre aux défis du XXIème siècle
Nous sommes presque tous convaincus que notre avenir dépendra, pour le meilleur ou pour le pire, des nanotechnologies, du numérique et de la robotique, de la biologie des systèmes et de la découverte de nouvelles formes d’énergie. Et pourtant chacune de ces perspectives technologiques repose sur des choix, sur des décisions, car aucune n’est inéluctable : qui peut interroger le sens de ces choix technologiques, le sens de nos choix de sociétés, et plus largement de nos formes de vie ? La plupart des grandes questions de notre temps impliquent donc soit une entrée par les sciences humaines et sociales, soit leur contribution nécessaire : l’environnement, le développement durable, les droits de l’homme et des populations, la santé, l’accès à l’énergie, à l’eau, à l’information, à l’éducation, l’innovation par les usages, etc. La sémiotique jouera donc pleinement son rôle si elle interroge, avec les autres sciences humaines et sociales, les processus de décision, la gouvernance des systèmes, ainsi que les conséquences sociales et anthropologiques des transformations en cours et à venir.
Mettre en place les conditions du dialogue entre la sémiotique et les autres sciences humaines et sociales
Toutes les sciences humaines et sociales sont des sciences du sens. A cet égard, elles mettent en œuvre des concepts et des méthodes appropriés pour saisir et décrire les significations associées aux phénomènes qu’elles étudient. Ce qui implique que toutes contiennent et développent, sous ce nom ou sous un autre, formellement ou pas, ce qu’il est convenu d’appeler une « sémiologie ». Mettre en place les conditions du dialogue avec la sémiotique, suppose donc que cette dernière soit en mesure d’aborder les questions qui se posent au même niveau et avec la même portée que les autres sciences humaines et sociales. La sémiotique propose d’ores et déjà un corps de concepts diversifié et des méthodes pour interroger d’abord les signes, les textes, les objets, les pratiques et les interactions sociales, les formes de vie et les modes d’existence collectifs et en collectivité. Elle est en mesure d’en construire le sens, en collaborant spécifiquement avec chacune des sciences humaines et sociales qui contribuent à édifier, chacune sous un point de vue particulier, cette architecture des significations humaines. Il s’agit d’appréhender aujourd’hui sous quelles formes et avec quels effets sémiotiques, symboliques et socio-culturels, les choix technologiques, économiques et sociétaux influent sur la transformation et l’avenir de nos sociétés, et notamment sur les axiologies et les régimes de croyance et d’identification qu’elles proposent. Le niveau de questionnement pertinent dépassera par conséquent celui des objets d’analyse les plus courants et des méthodes les mieux rodées en sémiotique : ce niveau optimal sera celui des pratiques et des interactions sociales, des formes de vie et des formes d’existence sociales. Comme, par définition, ces niveaux d’analyse intègrent des objets appartenant à tous les autres niveaux (des textes, des signes, des objets-supports, des médias, des productions culturelles en général), c’est donc tout l’appareil théorique et méthodologique de la sémiotique qui, en fin de compte, doit être mobilisé pour dialoguer utilement avec les autres sciences humaines et sociales.