Erwan Capitaine : identifier les bactéries grâce au laser
Erwan Capitaine (Ecole Doctorale « Sciences et Ingénierie pour l’Information, Mathématiques », XLIM) a reçu le Prix de l’Innovation du concours Cassaing 2018 pour ses travaux portant sur l’identification des bactéries grâce à des lasers.
Qu’est-ce qui vous a amené à l’Université de Limoges ?
Le sujet de la thèse. On m’a dit que j’allais traiter un sujet à l’interface de la photonique (tout ce qui se rapporte aux lasers) et de la biologie. De plus on m’a dit qu’il serait possible d’avoir contact avec une université étrangère, au Japon.
Sur quoi portaient vos travaux ?
Je travaillais sur la Microspectroscopie Raman. Pour faire simple il s’agit d’essayer d’obtenir des informations chimiques à l’aide d’un laser pour faire le portrait des molécules qui sont dans les bactéries. On essaye d’identifier ces bactéries par les molécules qu’elles transportent.
Les applications de ce procédé sont nombreuses. Cela permet de savoir si les bactéries sont résistantes ou non à l’antibiotique que l’on a appliqué. Cela permet également de vérifié qu’on a bien désinfecté un endroit. A termes, l’objectif est d’utiliser un laser sur un prélèvement que l’on a fait, par exemple sur une cuve de lait maternel, et de vérifier si oui ou non des bactéries se développent dans cette cuve. S’il y a des bactéries c’est qu’il faut désinfecter.
Ce procédé n’existait pas jusque-là ?
L’identification des bactéries ne se fait pas en temps réel. Le procédé actuel prend un certain temps : il faut que la bactérie se multiplie, forme une colonie, que l’on passe dans un outil qui s’appelle un spectromètre de masse qui va exploser la colonie. Et cette colonie ne pourra pas être réutilisée plus tard pour faire des tests de résistance aux antibiotiques, par exemple. C’est un procédé long que nous voulons court-circuiter avec une identification chimique des bactéries en temps réel.
Quel est l’intérêt ?
Cela permet de mettre en place un traitement très ciblé et rapide car on identifie clairement la bactérie. Le clinicien pourra alors utiliser les outils adaptés pour éliminer la bactérie identifiée et éviter de traiter avec des antibiotiques à spectre large qui permettent de lutter contre un bon nombre de choses mais qui ne tuent pas efficacement certaines bactéries. Celles-ci deviennent alors résistantes. Par exemple, les fages sont des molécules qui s’attaquent qu’à une seule sorte de bactérie, si on se trompe dans l’identification de la bactérie, on passe à côté du traitement…
Vous avez travaillé avec quel laboratoire ?
Avec le laboratoire Xlim, mais également en partenariat avec le laboratoire LASIR (Laboratoire d’Analyses Spectroscopique Infrarouge et Ramant) de Villeneuve d’Asques et l’Université de Tsukuba au Japon.
Que représente ce prix pour vous ?
J’en ai discuté avec les autres candidat.e.s. Tout le monde est content de venir parce qu’on parle de notre recherche. La peur de tout thésard, c’est que notre manuscrit de thèse finisse sous le placard de quelqu’un pour servir de cale. Ici, il y a des gens qui discutent notre thèse, c’est gratifiant.
Que faites-vous actuellement ?
Je suis en post-doctorat au CEA (Centre d’Energie Atomique) à Grenoble. Je continue à faire de la spectroscopie Raman mais aussi d’autres spectroscopies particulières. Je travaille sur des tissus biologiques mais je suis également en contact avec des industriels très intéressés par l’identification de bactéries très rapidement.
Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un qui souhaite débuter une thèse ?
Ne jamais désespérer et bien choisir son sujet. C’est un conseil qu’on m’a donné, c’est déjà dur de faire une thèse mais ça l’est encore plus si on ne croit pas au sujet.
Un mot sur l’Université de Limoges ?
J’ai adoré faire ma thèse à Limoges. J’ai découvert une ville très sympa, je me suis fait beaucoup d’ami.e.s thésard.e .s.