Simon MARAUD, Mobilisations de la Nature en Territoires autochtones. Comparaison entre le Sápmi (Suède) et Eeyou Istchee (Québec, Canada)

Instrumentalisations de la nature en Territoires autochtones. Comparaison entre le Sápmi (Suède) et Eeyou Istchee (Canada)

Mobilizations of Nature in indigenous Territories: comparison between Sápmi (Sweden) and Eeyou Istchee (Quebec, Canada)

Le Sápmi et Eeyou Istchee sont deux espaces nordiques aux ressources naturelles nombreuses qui en font des régions stratégiques présentées comme étant indispensables à l’économie de la Suède et du Québec. Ces « greniers énergétiques » comportent pourtant une particularité longtemps oubliée par les politiques émanant des autorités du Sud de ces territoires : les Autochtones.

Le Nord et ses premiers habitants font références à un ensemble d’imaginaires ethno-spatiaux issu d’une territorialité aux origines coloniales. Le fantasme d’un Nord vierge et inhabité a permis de légitimer un grand nombre de « mises en valeur » des ressources jusqu’alors « gaspillées » puisque non-exploitées. Mais depuis plusieurs décennies, les Autochtones samis et cris se sont présentés comme les défenseurs de la Terre-Mère refusant ainsi un « développement » et destructeur. Dans cette lutte, la vision séculaire et romantique occidentale du « Noble Sauvage », accompagnée de celle du Nord, fut mobilisée afin de sensibiliser le grand public via des actions médiatiques fortes.

Les contextes contemporains de ces deux nations sont sensiblement différents puisque, d’un côté, les Cris ont réussi à s’imposer en tant qu’acteurs clés au sein de leurs terres ancestrales sur le plan économique, juridique et politique, et à l’inverse, les Samis ne parviennent pas à faire face au gouvernement et aux développeurs derrière une seule et même institution. En revanche, la Suède présente un cas unique en Scandinavie, soit l’aire protégée de Laponia (Site Naturel et Culturel du Patrimoine Mondial de l’UNESCO) impliquant les Samis dans sa gestion. Suite notamment à cette prise en charge autochtone dans la protection de la nature et la préservation de leur culture, les Samis s’affirment graduellement sur la scène écotouristique suédoise. Au Canada, les Cris sont aujourd’hui responsables de la création de deux parcs nationaux du Québec (que sont Assinica et Albanel-Temiscamie-Otish) ce qui, de la même manière, serait un moteur touristique important pour les deux communautés d’Oujé-Bougoumou et Mistissini.

L’objet de mon travail consiste à s’interroger sur l’aire protégée en tant qu’outil décolonial pour les populations autochtones qui l’utilisent, en plus des raisons écologiques, pour se réapproprier une forme de pouvoir dans la gestion de leurs territoires ancestraux. Ce processus se ferait grâce à l’élaboration d’un front écologique autochtone en Sápmi et en Eeyou Istchee. Mais au sein de régions centrales pour le « développement, » peut-on réellement parler de mécanismes décoloniaux ?

Ce travail de géographie critique porte donc sur les relations de pouvoir et de domination opérant au sein de ces arènes sociopolitiques complexes. Dans un contexte capitaliste néo-libéral basé sur l’exploitation des ressources naturelles, il est nécessaire de repositionner les allures progressistes des États visant à intégrer les acteurs autochtones dans la gestion de leurs territoires. L’objectif de ma thèse réside dans la compréhension de ces rouages complexes entre les différents acteurs (aux ambitions souvent contradictoires) et des impacts qu’ils engendrent. Cette recherche post-coloniale prône alors l’importance du local et du contexte spécifique aux Nations autochtones et aux populations locales afin de repenser ces territoires au caractère belligène.

 

Mots clés : Autochtonie, protection et exploitation de la Nature, domination, Décolonisation, front écologique autochtone, capital environnemental, Sápmi, Eeyou Istchee

Key words : Indigenous, nature protection and exploitation, domination, Decolonization, indigenous ecological frontier, environmental capital, Sápmi, Eeyou Istchee.

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