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La Cour pénale internationale face au sort des personnes homosexuelles en Tchétchénie ; quelles perspectives judiciaires ?

La Cour pénale internationale face au sort des personnes homosexuelles en Tchétchénie ; quelles perspectives judiciaires ?

 

BROUSSARD Emeline Doctorante à l’Université de Limoges (02), Observatoire des Mutations Institutionnelles et Juridictionnelles (OMIJ), associée à la Chaire Gestion du Conflit et de l’Après-Conflit (CGCAC).

La question des violences1 faîtes aux personnes homosexuelles intéresse principalement les États, qui tantôt les répriment, tantôt en sont à l’origine via l’adoption de législations internes à caractère discriminatoire. Rarement, l’homosexualité n’entre dans la sphère internationale. Le droit international privé s’en est saisi en matière d’unions entre personnes du même sexe2 ou d’adoption. Le droit international public, quant à lui, n’y a trait que résiduellement, lorsque est abordée la protection des droits humains au sein de l’Organisation des Nations Unies (ONU). Quant au droit pénal international, particulièrement le Statut de la Cour pénale internationale (CPI), il n’en fait nulle part mention explicite, qu’il s’agisse de réprimer les crimes de génocide ou les crimes contre l’humanité3.

« Ta vie bascule quand ils rentrent dans le local,

te bousculent et te traitent de pédophile4,

de pédé. »5

Les mots crus de Natacha Appanah, dans son roman Tropique de la violence6 expriment parfaitement la haine et la violence, auxquelles doivent faire face de nombreux homosexuels à travers le monde7. Quand ce ne sont pas les insultes et les humiliations, ce sont des lois nationales sources de nombreuses discriminations, restreignant la liberté d’expression des personnes LGBT8, condamnant à l’emprisonnement9 voire à la peine capitale10 les individus en raison de leur homosexualité.

De façon plus nuancée, les États du Conseil de l’Europe ne sont pas en reste, car la question des droits homosexuels ne fait pas consensus. À ce sujet, certains États ont d’ailleurs déjà été condamnés à plusieurs reprises par la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH)11. À titre d’exemple, la Russie12 invoque ainsi sa marge nationale d’appréciation13 pour mener à bien la politique de musellement des communautés LGBTI, qu’elle justifie par des considérations d’ordre public14, de santé publique15, de religion16, de morale17, de normalité18 et qui s’est concrétisée sur un plan légal, avec l’adoption de la loi fédérale no135-ФЗ du 30 juin 2013, qui interdit toute forme de « propagande »19 homosexuelle au nom de la protection des mineurs20 et des valeurs traditionnelles russes. Les conséquences directes de cette législation ont été l’interdiction des manifestations publiques de type « Gay Pride » ou l’organisation d’événements publics en faveur de la défense des droits LGBTI, mais aussi l’arrestation de ceux qui se sont opposés au texte. Enfin, depuis 2010, le comportement hostile de la Russie vis-à-vis de sa communauté homosexuelle, lui a valu plusieurs condamnations devant la CEDH21 pour discrimination (art.14 CEDH), violation du droit à un recours effectif (art.13 CEDH), violation de la liberté d’expression (art. 10 CEDH) et violation de la liberté de réunion (art.11 CEDH).

Outre la politique discriminatoire22 entreprise par les autorités russes, les violences à l’encontre des personnes homosexuelles ont connu un regain23 depuis 2015, si bien que certaines victimes et organisations non gouvernementales accusent l’État russe de fermer les yeux sur les actes homophobes commis à travers la Fédération. En somme, de manquer à son devoir de prévenir et condamner de tels actes.

Début avril 2017, le journal indépendant, la Novaïa Gazeta (Новая газета), témoignait ainsi d’une recrudescence d’actes violents à l’encontre de la communauté homosexuelle de Tchétchénie. Les autorités tchétchènes sont accusées de conduire une politique ultra-répressive et ciblée, caractérisée par des centaines d’arrestations, de détentions arbitraires24, d’actes de tortures, de meurtres et d’incitations au meurtre25. Pour obtenir la libération de leurs proches, les familles auraient eu à verser des rançons ou à s’engager à « tuer eux-mêmes le détenu.26 » Malgré ces témoignages récoltés par le journal et des ONG sur place27, le président Ramzan Kadyrov s’est empressé de nier les faits28. L’un des porte-paroles de la présidence a jusqu’à déclaré « vous ne pouvez pas arrêter ou réprimer des gens qui n’existent pas dans la République. L’homosexualité n’existe pas ici. Si ces personnes existaient en Tchétchénie, la loi n’aurait pas à se soucier d’eux, vu que leurs propres parents se seraient déjà occupés définitivement de leurs cas.29 » Des propos assez proches de ceux tenus par le Président tchétchène lui-même en juillet 201730.

Le 17 mai 2017, à l’occasion de la journée mondiale contre l’homophobie, trois associations LGBT françaises31 ont attiré l’attention de la Cour pénale Internationale32 sur la situation des homosexuels de Tchétchénie, allant jusqu’à qualifier les actes commis à leur encontre de « génocide »33.

Il s’agit donc d’examiner d’une part, si les actes commis à l’encontre des homosexuels en Tchétchénie peuvent être qualifiés de crimes internationaux (I), au demeurant de génocide, éventuellement de crimes contre l’humanité, d’autre part, de savoir si la Cour pénale internationale a réellement compétence pour connaître des crimes commis en Tchétchénie, république fédérale présidentielle relevant de la Fédération de Russie (II), laquelle n’était depuis 2000 que simple État signataire du Statut de Rome34.

I. La qualification des actes commis à l’encontre des homosexuels en Tchétchénie

La Cour pénale internationale est compétente vis-à-vis du crime d’agression35, des crimes de guerre36, des crimes contre l’humanité37 et du génocide38, chacun ayant ses propres spécificités. S’agissant des crimes qui auraient été commis l’encontre de personnes homosexuelles en Tchétchénie39, leur qualification pénale revêt une importance majeure. Puisqu’il n’existe actuellement aucun conflit armé en Tchétchénie (Russie), qu’il soit international ou non-international (interne), la qualification de crimes de guerre est de facto exclue. Seules les éventuelles qualifications de génocide ou de crime contre l’humanité feront donc l’objet des développements qui vont suivre.

A. L’exclusion de la qualification de crime de génocide aux crimes commis contre des personnes en raison de leur homosexualité

Pour reprendre les mots de Hannah Arendt, le génocide « constitue une attaque40 contre la diversité humaine en tant que telle »41. L’expression « diversité humaine » peut alors prêter à confusion. Englobe-t-elle l’homosexualité, la bisexualité comme l’hétérosexualité ? Dans une acception large, la réponse est affirmative, mais dans une acception plus restreinte, l’orientation sexuelle42 apparaît essentiellement comme une composante intrinsèque43 de l’individu, qui peut lui-même appartenir à une diversité d’autres groupes susceptibles d’être victimes de génocide44. Or, le droit international45 dresse une liste restrictive des groupes protégés, excluant la protection basée sur l’orientation sexuelle.

1) L’exclusion de l’orientation sexuelle de la liste des groupes protégés de la Convention pour la Prévention et la Répression du Génocide reprise à l’article 6 du Statut de Rome

L’article 6 du Statut de la CPI énumère les actes constitutifs de génocide et limite les hypothèses aux crimes spécifiquement « commis avec l’intention de détruire tout ou en partie un groupe national, ethnique, racial et religieux, comme tel ». Elle reprend ainsi mot pour mot la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide du 9 décembre 194846. Dans sa jurisprudence Rutaganda du 6 décembre 1999, la Chambre de première instance du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) a considéré qu’« il apparaît que certains groupes, tels les groupes politiques et économiques, ont été écartés des groupes protégés parce que considérés comme des groupes mouvants caractérisés par le fait que leurs membres font preuve d’un engagement volontaire individuels47 ». Les groupes pouvant potentiellement faire l’objet d’un génocide doivent donc être permanents et stables48. Quid des « groupes sociaux » pris pour cible en raison du genre ou de l’orientation sexuelle ?

A priori, si le groupe social est stable et permanent, il pourrait bénéficier de la protection accordée par la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. Or, le génocide implique l’existence d’un groupe protégé et la commission d’actes « inspirés par l’intention49 de détruire un ensemble de personnes possédant une identité collective particulière »50, comme l’a rappelé la Cour Internationale de Justice, en 200751 et 201552, à l’occasion de l’affaire Bosnie-Herzégovine contre Serbie et Montenegro sur l’interprétation de ladite Convention. Les deux éléments ne peuvent être pris séparément l’un de l’autre. Par ailleurs, même si des actes ont été commis contre des personnes en Tchétchénie, en raison d’une identité collective spécifique fondée sur l’orientation sexuelle, les critères raciaux, ethniques, nationaux ou religieux constituent une liste limitative53, laquelle ne laisse aucune place à la prise en compte54 d’autres groupes, discriminés en raison de leur idées politiques55, leur position dans la société, leur capacité économique, leur genre, leur orientation sexuelle, etc. Tout cela alors même que les termes d’« auto-génocide »56 ou « génocide domestique » ont pu être employés pour qualifier les actes commis au Cambodge par les Khmers Rouges, ceux de « gynocide »57 ou « féminicide »58 pour qualifier les crimes commis à l’encontre des femmes en Yougoslavie, ceux de « génocide culturel »59 ou, plus récemment, celui « d’écocide », lequel fait régulièrement l’objet de développements60.

2) L’impossibilité pour d’étendre la liste des groupes protégés aux communautés homosexuelles

À la lecture du Statut de Rome, comme à celle des éléments des crimes annexés au Statut, il est une certitude. Il n’existe aucune marge d’appréciation, qui offrirait à la CPI la possibilité d’accroître jurisprudentiellement la liste des groupes protégés. Les actes commis contre une communauté homosexuelle ne peuvent ainsi constituer un génocide61, même si la tentation est grande et souvent récurrente d’appeler génocide toute forme de violations massives des droits de l’Homme pour des motifs discriminatoires. Le dol spécial ou dolus specialis requis pour le génocide correspond donc à l’intention particulière ayant animé l’auteur des actes, qui est celle de détruire tout ou en partie un groupe protégé62. « En d’autres termes, si l’auteur accomplit un meurtre avec l’intention de discriminer la victime en raison de son appartenance à un groupe déterminé, il y a persécution. Si l’auteur accomplit le même acte dans l’intention de détruire le groupe, il y a génocide.63 » Dans le cas du ciblage des personnes homosexuelles en Tchétchénie, les actes semblent plus largement s’inscrire dans un contexte de discrimination nationale, fondée sur le rejet, l’exclusion sociale voire la négation de l’existence64 d’une communauté en raison de son orientation sexuelle, mais localement mise en œuvre de manière généralisée ou systématique65.

Par ailleurs, même si le sentiment est tout à fait louable, il n’est pas forcément judicieux d’insérer les communautés homosexuelles dans la catégorie des groupes protégés contre le génocide, en ce que cela conduirait in fine à faire de l’homosexualité un particularisme, en opposition à l’hétérosexualité et problématique finalement vis-à-vis de la bisexualité66. Aussi, ne serait-ce pas aller à contre-courant de la politique de normalisation (justifiée) des relations consenties entre adultes de même sexe, entreprise à l’échelle internationale et au sein de nombreux États67 ? En effet, à l’exception du crime de persécution, les crimes contre l’humanité ne sont pas définis de manière à établir une distinction au sein même du genre humain68. À l’opposé, il est possible d’apprécier la question différemment, en considérant que le fait de prendre pour cible des personnes en raison de leur homosexualité prétendue ou avérée, d’une part, reviendrait à nier leur humanité, d’autre part à remettre en cause leur apport à la diversité humaine. Cela justifierait alors l’augmentation de la liste des groupes protégés prévue à l’article 6 du Statut69. Cependant, un tel ajout ne serait pas a fortiori utile, dès lors que le Statut de la CPI contient une alternative, en l’incrimination spécifique de persécution, comme crime contre l’humanité (art.7 Statut).

En effet, à défaut de retenir la qualification de génocide, William Schabas70 propose de considérer que le crime de génocide et les crimes contre l’humanité sont alternatifs, chaque fois où le groupe n’est pas identifiable ou identifié en tant que tel. Alternatif, ne signifiant pas qu’il existe une hiérarchie entre les infractions internationales, mais que la protection du bien juridique diffère, selon qu’il s’agisse du crime contre l’humanité ou du crime de génocide ; « la personne dans un cas, l’existence du groupe dans l’autre.71 » Dans l’affaire Jelisíc, le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie a ainsi écarté la qualification de génocide, mais considéré que les attaques discriminées, menées notamment contre des musulmans bosniaques, constituaient des crimes contre l’humanité72.

B. Les actes commis contre des personnes homosexuelles constitutifs de crimes contre l’humanité ?

La caractérisation d’un génocide vis-à-vis d’un groupe à raison de l’orientation sexuelle ne pouvant être établie, le crime contre l’humanité constitue une opportunité de poursuites, à condition de démontrer que les actes commis contre la population civile homosexuelle tchétchène s’inscrivent dans un contexte d’attaque généralisée ou systématique, et dans une perspective affirmative, si le caractère discriminatoire des actes peut être pris en compte.

1) La nécessité de démontrer l’existence d’une attaque généralisée ou systématique commis à l’encontre d’une population civile

L’article 7 du Statut dresse la liste des crimes, qui dès lors qu’ils ont été « commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque » constituent des crimes contre l’humanité. Le crime contre l’humanité vise ainsi des violations graves et massives des droits de l’Homme, commises dans un contexte tout à fait singulier. Les expressions « attaque » et « contre toute population civile », n’impliquent pas que les actes soient commis dans le cadre d’un conflit armé73, même si cela reste possible74 ; la Cour n’hésitant pas à ce propos, à retenir le cumul d’infractions75. Ainsi, l’article 6(2)(a) du Statut précise que « par « attaque lancée contre une population civile », on entend le comportement qui consiste en la commission multiple d’actes visés au paragraphe 1 à l’encontre d’une population civile quelconque, en application ou dans la poursuite de la politique d’un État ou d’une organisation ayant pour but une telle attaque. »

Dans le cas de la Tchétchénie, les autorités ont lancé une campagne ouvertement homophobe. Ils sont soupçonnés d’avoir arrêté des centaines de personnes et de fermer les yeux sur les crimes commis à l’encontre des homosexuels, en incitant notamment les familles « à laver leur honneur »76 à tuer leurs propres enfants et à défaut, de les obliger à verser des rançons en contrepartie de la libération de leurs proches77. Au vue des témoignages recueillis en Tchétchénie, les autorités locales seraient complices voire à l’origine du ciblage d’une partie de la population civile : la communauté homosexuelle. Une politique caractérisée par des actes de violence, parmi lesquelles, des meurtres ou une incitation au meurtre, des emprisonnements, des actes de torture et d’autres « actes de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé physique ou mentale.78 »

2) La prise en compte du caractère discriminatoire des actes qui auraient été commis à l’encontre de la communauté homosexuelle tchétchène

Le caractère discriminatoire des actes, en raison de l’orientation sexuelle d’un individu ou de l’appartenance à tout autre groupe, n’est pas l’un des critères permettant de retenir spécifiquement l’existence d’un crime contre l’humanité. En effet, ces critères auraient eu pour effet de borner la compétence de la Cour et par là même de nier les cas d’attaques systématiques ou généralisées commises sans aucune motivation discriminante. Toutefois, les rédacteurs du Statut de Rome ont prévu l’hypothèse de crimes commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique à l’encontre d’un groupe identifiable, mais qui n’entrerait pas dans le champ d’application de l’article 6 du Statut relatif au génocide. Ainsi, le chef de « persécution », prévu à l’article 7(1)(h) du Statut vise les actes commis contre « tout groupe ou toute collectivité identifiable pour des motifs d’ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste79 au sens du paragraphe 3, ou en fonction d’autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte visé dans le présent paragraphe ou tout crime relevant de la compétence de la Cour ». Le génocide se distingue donc de la persécution en ce que « l’élément moral requis pour la persécution est plus strict que pour les crimes contre l’humanité habituels, tout en demeurant en-deçà de celui requis pour le génocide […]80 », même si « la persécution, en tant que crime contre l’humanité, est une infraction qui relève du même genus que le génocide.81 » En effet, « il s’agit, dans les deux cas, de crimes commis contre des personnes qui appartiennent à un groupe déterminé et qui sont visées en raison même de cette appartenance82 » Toutefois, l’article 7(1)(h) du Statut contient une dimension plus large du groupe ciblé. Là où le génocide ne peut concerner que les groupes protégés en raison de la race, de l’appartenance nationale, ethnique ou religieuse, la persécution peut être établie vis-à-vis d’autres groupes et plus largement de collectivités, selon d’autres critères d’identification83.

L’orientation sexuelle des individus n’étant, une fois de plus, pas explicitement visée, la question demeure de savoir si la persécution pour des motifs liés à l’orientation sexuelle est l’un des critères « universellement reconnus comme inadmissibles en droit international ». En s’intéressant aux textes internationaux84 ayant trait de près ou de loin à la reconnaissance de droits ou à la protection des personnes homosexuelles, le premier constat est celui d’une fragmentation de l’opinion des États en la matière85. Du point de vue des instruments internationaux, l’homosexualité fait rarement l’objet de mentions explicites86. La Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948 n’y fait pas exception, puisque l’homosexualité n’y est pas mentionnée en tant que telle, bien que les articles 187, 288 ou encore 1289 de la DUDH, puissent être interprétés de manière extensive en faveur des droits homosexuels90. La Déclaration sur l’Orientation Sexuelle et l’Identité de Genre de l’Assemblée Générale des Nations Unies de 2008 a semblé ouvrir la voie à une reconnaissance des droits homosexuels à l’échelle internationale, mais force est de constater que de nombreux États ont formulé une contre-déclaration. En 2014, l’adoption d’une résolution du Conseil des droits de l’Homme relative à l’Orientation Sexuelle et à l’Identité de Genre, a réaffirmé la nécessaire protection des droits LGBT. Cependant, ces récents dénouements sont-ils suffisants pour considérer l’orientation sexuelle comme un « critère » universellement reconnu ? De manière globale, puisque le droit international reste très sommaire à ce sujet et que les États demeurent divisés91, la question devant la CPI mériterait d’amples développements, si l’occasion se présentait.

Enfin, contrairement au génocide92, en matière de crime contre l’humanité, il n’existe pas de possibilité d’engager la responsabilité pénale d’un individu sur le fondement d’une « incitation publique et directe ». Il n’est donc pas possible d’opter pour cette alternative93, qui permettrait pourtant de qualifier la politique ou les positions de la présidence tchétchène comme constitutives d’une incitation au crime contre l’humanité. Il serait possible de le regretter et de considérer qu’il s’agit ici d’une carence, si toutefois elle n’était pas justifiée par les éléments constitutifs mêmes du crime contre l’humanité, notamment la nécessité de prouver l’existence d’une attaque généralisée ou systématique contre une population civile et de démontrer que l’individu avait connaissance de l’existence d’une telle attaque.

Génocide ou crimes contre l’humanité94, qu’en est-il réellement de la compétence de la Cour pénale internationale sur le territoire de la Fédération de Russie ? Compte tenu de la complexité des relations entre la Russie et la CPI, et entre la Russie et la Tchétchénie, la protection élémentaire des droits de l’Homme et la répression des crimes commis en raison de l’orientation sexuelle sur le territoire tchétchène soulève des difficultés majeures.

II. Les réponses judiciaires potentielles suite aux accusations portées à l’encontre du pouvoir tchétchènes

Face aux violations massives des droits de l’Homme en Tchétchénie, il est judicieux de s’intéresser, non pas uniquement aux causes de celles-ci, mais aux nombreux obstacles qui empêchent leur répression effective. Le fédéralisme très singulier adopté par la Russie laissant à la Tchétchénie une large indépendance politique et judiciaire, et la défiance russe vis-à-vis de la Cour pénale internationale, comme envers le reste de la communauté internationale, sont autant de difficultés qui paraissent insurmontables.

A. Le défaut de compétence territoriale de la CPI sur le territoire de la Fédération de Russie

À l’instar des États-Unis, la Russie n’a fait que signer le Statut de Rome, sans le ratifier. Or, l’ouverture d’une enquête en Géorgie par la CPI, a conduit la Russie à se replier davantage sur elle-même95, en retirant sa signature du Statut en novembre 2016. En agissant de la sorte, la Russie s’est volontairement coupée de toute relation éventuelle avec le système pénal international, mais y a-t-elle véritablement associée pleinement un jour ? La Tchétchénie n’est-elle pas plus indépendante qu’elle en l’air du fait de l’ambiguïté organisationnelle du territoire russe ? La Cour pénale internationale peut-elle véritablement agir pour sanctionner les crimes qui auraient été commis en Tchétchénie ?

1) Les ambiguïtés de l’organisation territoriale russe

La place de la Tchétchénie au sein de l’organisation territoriale russe est assez complexe96. La Tchétchénie n’est pas un État à part entière au sens du droit international97, mais une république présidentielle dans le giron de la Fédération de Russie. Théoriquement, la république présidentielle tchétchène est l’une des composantes territoriale du système fédéral russe, produit de relations tourmentées avec les autorités fédérales russes. In concreto, à partir de 1991, la Tchétchénie a tenté de s’affranchir du pouvoir russe98, jusqu’à finir par être rattrapée par la guerre, celle de 1994 à 199699, puis celle de 1999 à 2000100, opposant les indépendantistes tchétchènes aux forces fédérales russes. En mars 2003, une constitution a été adoptée par la Tchétchénie, puis moult fois réformée sur la période s’étendant de 2007 à 2012. Cette constitution locale, permise par la Constitution fédérale101, autorise la république a disposé d’un exécutif (président ou chef de la république, gouvernement, conseil d’état), d’un pouvoir judiciaire et d’un pouvoir législatif propres, ainsi que d’une importante liberté de gestion102. Les compétences restent toutefois bornées aux limites fixées par la Fédération de Russie, dans le respect des compétences partagées prévues par la Constitution Fédérale103.

L’objectif recherché par l’adoption de cet aménagement territorial était évidemment de permettre au Kremlin de conserver sa sphère d’influence en Mer Caspienne, à garder une mainmise sur les ressources naturelles locales, tout en offrant un apparente indépendance à une région, tentée par l’autonomie. Les tensions entre la Russie et la Tchétchénie se sont apaisées, notamment en raison des relations d’alliance104 qu’entretiennent le président tchétchène actuel, Ramzan Kadyrov, et le Président russe, Vladimir Poutine. Au demeurant, la Tchétchénie bénéficie ainsi d’une ample marge de manœuvre, tout en restant l’une des subdivisions administratives de la Fédération de Russie105, laquelle est l’État « de référence ». Autrement dit, l’interlocuteur privilégié de la société inter-étatique. De facto, la Fédération Russie est la seule entité internationalement reconnue, disposant de toutes les libertés pour signer et ratifier des traités internationaux et, le cas échéant, entretenir des relations avec la Cour pénale internationale106.

2) L’incompétence manifeste de la CPI sur le territoire de la Fédération de Russie

L’intérêt d’une approche constitutionnelle de l’organisation territoriale russe n’est pas tant du point de vue de la répartition des compétences sur la scène internationale, mais du point de vue des responsabilités, notamment de la responsabilité pénale. Dans l’hypothèse de poursuites devant la CPI, l’examen de la répartition des domaines de compétences entre les différents échelons, fédéral et fédéré, offre notamment l’opportunité de cerner plus simplement l’autorité censée prévenir, empêcher ou réprimer la commission de crimes sur le territoire tchétchène107, sans pour autant la désigner automatiquement comme responsable108 de ces crimes. Faut-il encore démontrer109 qu’il existe un lien de droit ou de fait entre les auteurs des violences commises à l’encontre de la communauté homosexuelle de Tchétchénie et le président, Ramzan Kadyrov110, mais surtout et avant tout, vérifier que la Cour pénale internationale est territorialement compétente. Or, c’est là que la bât blesse. La Russie avait signé le Statut de la Cour pénale internationale, en 2000, sans jamais le ratifier. En novembre 2016, suite à la décision du Procureur de la CPI, d’ouvrir une enquête relative à des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité qui auraient été commis en Géorgie (Ossétie du Sud), entre le 1er juillet et le 10 octobre 2008111, la Russie a retiré sa signature112. Il s’agit d’un acte politique et purement symbolique, puisque du fait de la non-ratification du Statut, la Fédération de Russie n’a jamais été État partie au Statut de la Cour. La CPI n’a donc jamais eu aucune compétence pour les crimes internationaux potentiellement commis sur le territoire russe, Tchétchénie incluse113, sauf à mettre en mouvement des dispositions spécifiques, telle qu’une déclaration d’acceptation de la compétence de la Cour ou une saisine par le Conseil de Sécurité des Nations Unies (art.13(b) du Statut). Quant à une auto-saisie du Procureur de la CPI en vertu de l’article 15(1) du Statut, elle ne peut dans tous les cas s’affranchir du respect des règles de compétences et de recevabilité prévues par le Statut de la Cour, notamment l’importance accordée au principe de complémentarité, autour duquel la CPI s’est construite et exerce son action114.

La Russie ayant retiré sa signature du Statut, elle ne sera forcément guère encline à formuler une déclaration d’acceptation de compétence de la CPI sur la situation en Tchétchénie, et ce, pour des raisons essentiellement politico-diplomatiques. Le déferrement de la situation par le Conseil de Sécurité des Nation Unis, est, lui, inenvisageable, puisque le dispositif requiert un vote à l’unanimité des membres permanents, au rang desquels, la Russie. Enfin, une éventuelle auto-saisie du Procureur de la CPI115 est une perspective envisageable, quoique ayant peu de chance de déboucher sur l’ouverture d’une enquête. En effet, il est utile de rappeler que la saisie dite proprio motu est strictement encadrée. Le Procureur doit obtenir l’autorisation d’ouvrir une enquête auprès de l’une des chambres préliminaires compétentes. Une chambre préliminaire qui examinera successivement si l’affaire relève de la compétence de la Cour116 et si l’affaire est recevable (article 17 du Statut)117. En l’espèce, d’un point de vue matériel, les crimes qui auraient été commis en Tchétchénie relèveraient de la compétence de la Cour, mais ils ont eu lieu sur un territoire qui échappe à sa juridiction. La seule opportunité de répression des crimes qui auraient commis n’appartient donc qu’à la Russie.

B. Les perspectives possibles en dehors du système pénal international

En employant la méthode en trois temps du « finding, naming, shaming »118, les organisations non gouvernementales s’assurent d’une couverture médiatique assez large pour qu’à défaut d’être réprimés, les crimes soient révélés au plus grand nombre, en escomptant qu’un sursaut national ou international mette un terme à la situation. En effet, si des perspectives judiciaires restent difficiles à mettre en œuvre à l’échelle internationale, une opportunité demeure à l’échelle nationale, à condition néanmoins que le système soit pleinement opérationnel. D’ailleurs, le peu d’intérêt suscité par le sort des homosexuels au niveau interne, semble sensiblement augurer un régime d’impunité.

1) Les failles du système pénal tchétchène

Pour reprendre brièvement l’examen de la Constitution russe, il est important de rappeler qu’en théorie, c’est à l’échelle fédérale qu’est décidée l’organisation judiciaire et adoptée la législation pénale119 ; le maintien de l’ordre relevant de la compétence de l’administration locale. Les autorités tchétchènes sont donc les seules à pouvoir agir dans la limite de leurs compétences et en application de la loi fédérale. Or, non seulement elles sont accusées d’être à l’origine des persécutions subies par la communauté homosexuelle de Tchétchénie120, mais le système judiciaire local doit régulièrement essuyer des accusations de népotisme et de corruption121, lesquels rendent généralement impossible une résolution judiciaire en faveur des victimes, et ce, malgré la réforme de la procédure pénale fédérale entreprise en 2001122 et l’existence d’un code pénal qui prévoit pourtant des dispositions spécifiques123 en présence de crimes de droit commun124 « commis en raison de la haine ou de l’inimitié politique, idéologique, raciale, nationale ou religieuse, ou en raison de la haine ou inimitié à l’égard d’un groupe social ».

Par ailleurs, il existe ce qui est assimilable à une « justice parallèle », obéissant à la charia125 et au droit coutumier oral (les adats)126, qui rendent permis le recours à des pratiques claniques anciennes et extra-judiciaires, telle que la vengeance privée. Les autorités de la république présidentielle tchétchène ne s’intéressent que faiblement à ce qui se passe au sein des clans et dans la sphère privée, voire sont soupçonnées127 d’encourager et d’entretenir cet « état de non-droit »128, notamment par le biais des forces de sécurité du président, les Kadyrovtsy. Compte tenu de la loi anti-propagande homosexuelle adoptée en Russie et de la forte imprégnation religieuse des populations tchétchènes, il y a peu de chances que les familles n’osent s’exposer publiquement en engageant des procédures judiciaires. Le poids de la tradition face à l’état de droit constitue alors un obstacle majeur, pour lequel une réponse fédérale sous la pression d’États tiers semble être une voie possible, mais semée d’embûches129.

2) L’implication des autorités fédérales, une solution ?

Indubitablement, en attirant l’attention du Procureur de la Cour pénale internationale en alléguant que des crimes relevant de sa compétence auraient été commis en Tchétchénie, les ONG ont exposé le Kremlin à une condamnation unanime de la communauté internationale. Or, ce n’est pas la première fois que les autorités de la république présidentielle fédérée de Tchétchénie sont accusées de laisser commettre voire d’organiser des violations massives et répétées des droits de l’Homme, sans qu’il n’y ait de réponse judiciaire ad hoc, sans qu’il n’y ait de réponse politique réelle des autorités fédérales russes. Ce n’est pas la première fois non plus, que les autorités fédérales sont pointées du doigt face à des violations des droits de l’Homme en Tchétchénie. En 2009, déjà, le Comité des droits humains relevait l’impunité dont bénéficieraient les auteurs de violations des droits humains en Tchétchénie, faute législation adéquate, d’investigations ou de poursuites effectives130. Il relevait aussi la commission de nombreux crimes d’honneur dans cette région131 et de nombreuses violences commises contre des personnes en raison de leur orientation sexuelle132. Or, à chaque fois que la question du respect des droits humains est mis en cause, la Fédération de Russie souffle le chaud et le froid. À titre d’exemples, en menaçant de ne pas appliquer la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme133, en opposant régulièrement son veto sur la question syrienne134, en retirant sa signature du Statut de la Cour pénale internationale, en émettant des doutes quant à la nécessité d’une Convention internationale relative aux crimes contre l’humanité135 (comme il en existe déjà une pour la prévention et la répression du génocide136), en refusant régulièrement la présence d’observateurs internationaux en Géorgie, en Ukraine137, etc.

Dans le même temps, la Russie temporise, en versant des contributions financières au Haut Commissariat pour les Droits de l’Homme (HCDH), en se dotant d’un poste de Commissaire fédéral aux droits de l’Homme ou encore en faisant savoir que le système judiciaire et policier devaient pleinement coopérer à l’ouverture d’enquêtes concernant les violations supposées des droits de l’Homme dans certains territoires de la Fédération, y compris concernant le sort des homosexuels en Tchétchénie. Toutefois, bien que la Russie eût été condamnée récemment par la CEDH pour des violations des droits de l’Homme dans d’autres territoires du Caucase138 et malgré, « la plainte » des ONG auprès du Procureur de la CPI, les critiques vives du Parlement européen ou encore la condamnation univoque de l’Allemagne et de la France, une intervention ferme du Kremlin vis-à-vis du régime tchétchène semble très peu probable. L’une des raisons principales étant le risque de déstabilisation qui s’en suivraient dans la région139. Habituellement, face aux critiques, le Bureau du Procureur Général de la Fédération de Russie se contente d’intimer l’ordre aux autorités tchétchènes d’enquêter140, sans autres mesures supplémentaires. Il est aussi peu vraisemblable que l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe (ACPE) soumette une demande d’exclusion contre la Russie au Comité des ministres, bien qu’elle en ait les moyens et des raisons légitimes de le faire141 , particulièrement depuis que la Russie a annoncé le 30 juin 2017 qu’elle suspendait sa participation au budget du Conseil de l’Europe142, en raison du maintien de la suspension du droit des vote des députés russes à l’ACPE143.

Ainsi face aux actes commis contre la communauté LGBTI de Tchétchénie et plus généralement en Russie, les perspectives judiciaires à l’échelle internationale demeurent très illusoires, car plusieurs raisons conduisent les États à ménager la Fédération de Russie, même en présence de violations massives supposées ou avérées des droits de l’Homme. Sa stature d’envergure à l’échelle internationale144, sa capacité militaire non négligeable145 et les interdépendances entre États que génère la lutte contre le terrorisme international, compliquent grandement une possible réponse internationale à l’encontre de la Russie. D’ailleurs, les quelques mesures coercitives prises à son endroit, restent généralement sans effets majeurs sur elle146.

Il ne reste donc pour les États, notamment européens, qu’à suivre régulièrement la progression d’une éventuelle enquête des autorités fédérales russes sur le sort des homosexuels tchétchènes et à faciliter l’octroi du droit d’asile dans l’Union européenne aux personnes homosexuelles ayant fui la Tchétchénie, tel que le permet la directive du Parlement Européen et du Conseil, en date du 13 décembre 2011147. Le bénéfice de la protection internationale148 des individus149 en présence d’un risque de « violences genrées »150, de persécutions commises en raison de l’orientation sexuelle151 ou de crimes dits d’honneur152 étant au sein de l’Union Européenne et du Conseil de l’Europe largement admis.

1Le terme « violences » employé ici a vocation à englober les violences physiques subies aux personnes homosexuelles et la négation des droits élémentaires en raison de l’orientation sexuelle.

2Entendu au sens large, « mariages » ou « partenariat ».

3La question de la discrimination en matière de crimes de guerre, se fonde sur la dichotomie combattants/civils, sans considération pour d’autres critères.

4Il existe fréquemment un amalgame injustifié entre pédophilie et homosexualité. À titre d’exemple, avant que la Fédération de Russie n’adopte un texte, certaines régions russes avaient promulgué des lois anti « propagande » homosexuelle, y incluant la pédophilie. Voir : HACHEY Isabelle, « Libertés en péril en Russie », LaPresse.ca, 11 août 2013. [url]lapresse.ca/international/dossiers/droits-des-homosexuels/201308/10/01-4678792-libertes-en-peril-en-russie.php (consulté le 3 juin 2107). Voir : CEDH, Bayev et autres c. Russie, 20 juin 2017, arrêt grande chambre, requêtes nos 67667/09, 44092/12 et 56717/12, notamment §69.

5APPANAH Natacha, Tropique de la violence. Gallimard, 2016, p.141.

6L’histoire se déroule au cœur de l’Île de Mayotte.

7Voir le Rapport annuel du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme et rapports du Haut-Commissariat et du Secrétaire général relatif aux lois et pratiques discriminatoires et actes de violence dont sont victimes des personnes en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre, Conseil des droits de l’homme, Dix-neuvième session, 17 novembre 2011., A/HRC/19/41. [url]www.un.org/fr/documents/view_doc.asp?symbol=A/HRC/19/41 (consulté le 1er juin).

8Aussi employé « LGBTI » pour Lesbiennes Gays Bisexuels Transgenres Intersexes.

9Les sanctions pénales peuvent varier, allant de l’amende à l’emprisonnement à perpétuité. C’est les cas notamment en Afrique, en Asie Méridionale et dans une partie de l’Asie du Sud-Est.

10La peine de mort est le châtiment infligé au Moyen-Orient et dans certains État du continent africain (Somalie, Nigeria…).

11Concernant la Fédération de Russie : « La Cour a traité 7 010 requêtes concernant la Russie en 2016, dont 6 365 qu’elle a déclarées irrecevables ou dont elle n’a pas poursuivi l’examen (requêtes rayées du rôle). Elle a prononcé 228 arrêts (portant sur 645 requêtes), dont 222 ont conclu à au moins une violation de la Convention européenne des droits de l’homme. » [url]www.echr.coe.int/Documents/CP_Russia_FRA.pdf (consulté le 5 juin 2017).

12Sur la « question homosexuelle », les autorités russes ont toujours été particulièrement mal à l’aise. Il faut rappeler que l’homosexualité dans la Russie soviétique était considérée comme un crime, dont la conséquence était l’exclusion du parti communiste, puis une déportation vers l’un des goulags de l’Union (URSS). En 1993, l’homosexualité sera décriminalisée ; le but recherché est de faciliter adhésion de la Russie au Conseil de l’Europe, qui interviendra deux ans plus tard, en 1995. En 1999, l’homosexualité n’est plus classée au rang des maladies mentales en Russie. À partir des années 2000, sous l’autorité du duo Poutine-Medvedev, l’orientation de la politique russe vis-à-vis des personnes homosexuelles va se durcir.

13La CEDH a d’ailleurs constaté que « The Court would generally accept a wider margin of appreciation in the absence of consensus among member States where the subject matter may be linked to sensitive moral or ethical issues. In the instant case, however, the Court notes that there is a clear European consensus about the recognition of individuals’ right to openly identify themselves as gay, lesbian or any other sexual minority, and to promote their own rights and freedoms (see Alekseyev, cited above, § 84). Moreover, before deciding on the breadth of the margin of appreciation the Court must scrutinise the legitimate aim advanced by the Government in connection with their claim that the matter constitutes a sensitive moral or ethical issue. It will examine whether it is open to the Government to rely on the grounds of morals in a case which concerns facets of the applicants’ existence and identity, and the very essence of the right to freedom of expression. », in CEDH, Bayev et autres c. Russie, 20 juin 2017, arrêt grande chambre, requêtes nos 67667/09, 44092/12 et 56717/12, §66. [url]http://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-174422 (consulté le 21 juin 2017).

14CEDH, Bayev et autres c. Russie, 20 juin 2017, arrêt grande chambre, requêtes nos 67667/09, 44092/12 et 56717/12, §83.

15Idem. §§72-73.

16Voir : Publication du Comité pour la diversité sexuelle (CSQ), « L’homosexualité et les religions. En 2012, que disent les différentes religions concernant l’homosexualité ? », notamment p.5 (cf. église orthodoxe). [url]http://colloquehomophobie.org/wp-content/uploads/2012/12/35-homosexualite_et_les_religions.pdf (consulté le 31 mai 2017).

17KOURILSKY-AUGEVEN Chantal , « L’ambiguïté des modèles d’égalité des genres en Russie : famille, droit et idéologie », Droit et cultures, no69, 2015-1.[url] http://droitcultures.revues.org/3555 (consulté le 1er juin 2017).

18Voir : BOURSEUL Vincent, « Les normes sexuelles, la psychanalyse et le « mariage pour tous » », Cahiers de psychologie clinique, 2015/2, no45, pp. 95-109. [url]www.cairn.info/revue-cahiers-de-psychologie-clinique-2015-2-page-95.htm (consulté le 1er juin 2017). BRENOT Philippe, Homo ou hétéro, est-ce un choix?, L’Esprit du temps, Esprit libre, 2015, 61p.

19Ici, le terme « propagande » renvoie à l’idée que l’homosexualité serait un choix individuel, que les associations LGBTI essayeraient de promouvoir sur le plan sociétal et politique en Russie. Voir : les arguments développés par les autorités gouvernementales russes, in CEDH, Alekseyev contre Russie, 21 octobre 2010, notamment §§59-60-61-62.

20Idem. CEDH, Bayev et autres c. Russie, 20 juin 2017, arrêt grande chambre, requêtes nos 67667/09, 44092/12 et 56717/12, §78 : « The Government were unable to provide any explanation of the mechanism by which a minor could be enticed into “[a] homosexual lifestyle”, let alone science-based evidence that one’s sexual orientation or identity is susceptible to change under external influence. »

21Idem.

22On dénombre notamment :

– L’obligation depuis 2012, pour toutes les organisations non gouvernementales recevant des fonds étrangers de se faire enregistrer auprès des autorités russes comme « agentes de l’étranger » (ce qui a poussé des associations de défense des droits de l’Homme comme le Comité russe contre la Torture a cessé ses activités).

– L’interdiction de la « propagande » considérée comme homosexuelle en 2013.

– Tentative d’interdire le don de sang pour les personnes homosexuelles en 2013, alors qu’il est autorisé depuis 2008.

23Human Rights Watch, Russia: Impunity for Anti-LGBT Violence. Discriminatory “Propaganda” Law Fuels Attacks. [url]www.hrw.org/news/2014/12/15/russia-impunity-anti-lgbt-violence (consulté le 1er juin 2017).

24Les personnes arrêtées seraient détenues et torturées dans un camp à proximité de Grosny.

25Europe1, « La Tchétchénie accusée de persécuter et torturer des homosexuels », le 11 avril 2017. [url]www.europe1.fr/international/la-tchetchenie-accusee-de-persecuter-et-torturer-des-homosexuels-3291818 (consulté le 31 mai 2017).

26CISTERNE Hugo & ABSALON Julie, « Tchétchénie : les autorités accusées de torturer et tuer des homosexuels », RTL, 11 avril 2017. [url]www.rtl.fr/actu/international/tchetchenie-les-autorites-accusees-de-torturer-et-tuer-des-homosexuels-7788076016 (consulté le 30 mai 2017).

28L’Obs, « Tchétchénie: Kadyrov dément les arrestations d’homosexuels », le 21 avril 2017.[url]http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20170420.AFP1745/tchetchenie-kadyrov-dement-les-arrestations-d-homosexuels.html (consulté le 31 mai 2017).

29LeMonde, « La Tchétchénie accusée de persécuter des homosexuels », le 11 avril 2017. [url]www.lemonde.fr/europe/article/2017/04/11/la-tchetchenie-accusee-de-persecuter-des-homosexuels_5109715_3214.html (consulté le 30 mai 2017).

30TERVÉ Claire, LeHuffingtonPost, « il n’y a pas de gays ici (…) Ils sont le démon ! », le 14 juillet 2017. [url]www.huffingtonpost.fr/2017/07/14/pour-le-president-tchetchene-ramzan-kadyrov-il-ny-a-pas-de-ga_a_23030468/ (consulté le 14 juillet 2017).

31Libération / AFP, « Persécution d’homosexuels en Tchétchénie : plainte devant la CPI », le 16 mai 2017. [url]www.liberation.fr/planete/2017/05/16/persecution-d-homosexuels-en-tchetchenie-plainte-devant-la-cpi_1569954 (consulté le 1er juin 2017).

32L’emploi des termes « déposer plainte devant la Cour pénale internationale » est un abus de langage. À tout le moins, il ne s’agit pas du sens juridique communément employé en droit français. En effet, l’article 13 du Statut de la CPI, ne prévoit que trois modes de saisine de la Cour, qui excluent les individus, les associations ou les personnes morales (type entreprises). Le seul moyen dont disposent les ONG pour attirer l’attention de la Cour est une stratégie de contournement, constituée de pétitions et de « plaintes » (au sens de « dénonciations »), ayant pour fondement l’article 15§1 et 15§2 du Statut de Rome qui permet au Procureur « d’ouvrir une enquête de sa propre initiative au vu de renseignements concernant des crimes […] », y compris lorsque ces renseignements proviennent d’organisations non gouvernementales. »

33Les nombreux meurtres et persécutions menées contre des personnes homosexuelles par le groupe État Islamique (Daech), n’avaient pas été qualifiés de génocide, mais de persécutions. Voir :ABOU EZ Eleonore, « La persécution des homosexuels par Daech inquiète l’ONU », AFP, le 26 mai 2015. [url]http://geopolis.francetvinfo.fr/la-persecution-des-homosexuels-par-daech-inquiete-lonu-75977 (consulté le 2 juin 2017).

34Statut de Rome ou Statut de la Cour pénale internationale.

35Article 5 du Statut de Rome – crimes relevant de la compétence de la Cour. L’agression ne dispose pour l’instant d’aucune définition, ce qui rend impossible toutes enquêtes et poursuites sur ce fondement.

36Article 8 du Statut de Rome.

37Article 7 du Statut de Rome.

38Article 6 du Statut de Rome.

39Le conditionnel est un usage de précaution, employé par la Cour, notamment.

40L’attaque sans connotation armée nécessaire, au sens de « prendre pour cible ».

41ARENDT Hannah, Eichmann à Jérusalem. Gallimard, « Folio Histoire », 2002, p.465.

42Définition donnée par la diplomatie française, issue des principes de JogJakarta (2006) : « L’orientation sexuelle est comprise comme faisant référence à la capacité de chacun de ressentir une profonde attirance émotionnelle, affective et sexuelle envers des individus du sexe opposé, de même sexe ou de plus d’un sexe, et d’entretenir des relations intimes et sexuelles avec ces individus. » [url]www.diplomatie.gouv.fr/fr/politique-etrangere-de-la-france/droits-de-l-homme/orientation-sexuelle-et-identite-de-genre (consulté le 1er juin 2017).

43C’est-à-dire indépendante de choix personnels, de questions génétiques, de facteurs culturels… C’est une composante de l’affectivité et de la sexualité humaine.

44L’homosexualité est présente, indépendamment des appartenances religieuses, raciales, ethniques ou nationales ; elle subsiste même lorsque le poids des traditions en empêche l’expression dans la sphère publique.

45Au niveau interne, les États demeurent libres d’adopter une vision maximaliste, en augmentant la liste des groupes protégés.

46Résolution 260 A (III) de l’Assemblée Générale des Nations Unies du 9 décembre 1948.

47TPIR, le Procureur c. George A. N. Rutanga, Affaire noICTR-96-3, Jugement, 9 décembre 1999, §57.

48AKSAR Yusuf, “The « victimized group » concept in the Genocide Convention and the development of international humanitarian law through the practice of ad hoc tribunals”. Journal of Genocide Research, Vol.5, no2, 2003, pp.211-224.

49Dolus specialis.

50CIJ 26 février 2007, Bosnie-Herzégovine contre Serbie et Montenegro, Convention pour la prévention et la répression du génocide, notamment §193.

51CIJ 26 février 2007, Bosnie-Herzégovine contre Serbie et Montenegro, Convention pour la prévention et la répression du génocide, notamment §190.

52CIJ 3 février 2015, Bosnie-Herzégovine contre Serbie et Montenegro, Convention pour la prévention et la répression du génocide, arrêt, notamment §§507-512.

53CIJ 26 février 2007, Bosnie-Herzégovine contre Serbie et Montenegro, Convention pour la prévention et la répression du génocide, notamment §344. Voir aussi : Comptes rendus analytiques des séances de la Sixième Commission de l’Assemblée générale du 21 septembre au 10 décembre 1948, Documents officiels de l’Assemblée Générale.

54Plus exactement, c’est un minimum coutumier que les États doivent respecter, mais qu’ils sont libres d’augmenter. Ainsi, le code pénal du Costa Rica Costa Rica, en son article 127 vise tous « les crimes commis à l’égard des membres d’un groupe déterminé en raison de leur race, de leur nationalité, de leur genre, de leur âge, d’option politique, religieuse ou sexuelle, de leur position sociale, de leur situation économique ou de leur état civil. »

55La résolution 96(I) de l’Assemblée Générale des Nations Unies du 11 décembre 1946, 55ème séance plénière mentionnait la destruction totale ou partielle de groupes politiques ou pris pour cible pour d’autres motifs.

56BEAUVALLET Olivier, Face au génocide (Lemkin), Michalon, Le bien commun, 2011, p.39.

57JACQUELIN Mathieu, L’incrimination de génocide – étude comparée du droit de la Cour pénale internationale et du droit français. L.G.D.J, Thèses, no62, Fondation Varenne (prix), 2012, p.9.

58Voir : JONES Adam, Gendercide and genocide. Journal of Genocide Research. Vol.2, no2, 2000, pp.185-211.  ENGLE Karen, Feminism and its (Dis)contents: Criminalizing Wartime Rape in Bosnia and Herzegovina”. American Journal of International Law, vol. 99, no4, pp.778-817. JALEEL Rana, Weapons of Sex, Weapons of War. Cultural Studies. Vol.27, no1, 2013, pp.115-135.

59Voir : AKSAR Yusuf, “The « victimized group » concept in the Genocide Convention and the development of international humanitarian law through the practice of ad hoc tribunals”. Journal of Genocide Research, Vol.5, no2, 2003, p.215. CORTEN Olivier, « L’arrêt rendu par la CIJ dans l’affaire du Crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie) : vers un assouplissement des conditions permettant d’engager la responsabilité d’un État pour génocide ? ». Annuaire français de droit international, Vol.53, 2007. p.252.

60Voir : DODE Graziella, « L’écocide : la difficile reconnaissance des crimes environnementaux », Actus-environnement, le 2 avril 2013. [url]www.actu-environnement.com/ae/news/ecocide-difficile-reconnaissance-crimes-environnementaux-18174.php4 (consulté le 31 mai 2017). DELMAS-MARTY Mireille (préf.) & Laurent NEYRET (dir.), Des écocrimes à l »écocide, le droit pénal au secours de l’environnement. Bruylant, Droits et développement durable, 2015, 482p. Voir aussi l’article 358 du code pénal de la Fédération de Russie : « Massive destruction of the animal or plant kingdoms, contamination of the atmosphere or water resources, and also commission of other actions capable of causing an ecological catastrophe, Shall be punishable by deprivation of liberty for a term of 12 to 20 years. »

61Le terme « génocide » a parfois été employé pour évoquer la politique de déportation et d’extermination des homosexuels par le régime nazie. De nos jours, le terme « persécution » est plus largement utilisé. Voir : SCHLAGDENHAUFFEN Régis, Triangle rose. La persécution des homosexuels et sa mémoire. Paris : Autrement, Mutations/Sexe en tous genre, 2011, 308p. TAMAGNE Florence, « La déportation des homosexuels durant la Seconde Guerre mondiale », Revue d’éthique et de théologie morale, 2006/2, no239, pp. 77-104. [url]www.cairn.info/revue-d-ethique-et-de-theologie-morale-2006-2-page-77.htm (consulté le 2 juin 2017).

62CIJ, 3 février 2015, Bosnie-Herzégovine contre Serbie et Montenegro, Convention pour la prévention et la répression du génocide, arrêt, §514 : « […]le génocide suppose l’intention de détruire un groupe comme tel, et non pas de lui infliger des dommages ou de l’éloigner d’un territoire […] »

63QUIRICO Ottavio, « La persécution devant les tribunaux pénaux internationaux », Les Dossiers du Grihl [En ligne], Les dossiers de Jean-Pierre Cavaillé, De la persécution, mis en ligne le 28 février 2010. [url]http://dossiersgrihl.revues.org/3894 (consulté le 2 juin 2017).

64Dans une optique similaire la commission d’actes systématiques ou généralisés contre des personnes handicapées ou malades constituerait des persécutions, non des génocides. Entreraient dans cette catégorie, les politiques nationales du type programme Aktion T4 mis en place par le régime nazi ou les actes réguliers commis actuellement à l’encontre des personnes albinos dans certains États africains.

65Pour reprendre les éléments contextuels requis pour retenir la qualification de crimes contre l’humanité, lesquels ont notamment été développés dans la jurisprudence Blaškić du Tribunal pénal International pour l’ex-Yougoslavie : TPIY, Affaire Le Procureur contre Blaškić, noIT-95-14, Jugement, 3 mars 2000, §203 : « le caractère systématique faisait référence à quatre éléments qui, aux fins de la présente affaire, pouvaient être énoncés de la façon suivante : 1) l’existence d’un but de caractère politique, d’un plan en vertu duquel l’attaque est perpétrée ou d’une idéologie au sens large du terme, à savoir détruire, persécuter ou affaiblir une communauté ; 2) la perpétration d’un acte criminel de très grande ampleur à l’encontre d’un groupe de civils ou la commission répétée et continue d’actes inhumains ayant un lien entre eux ; 3) la préparation et la mise en œuvre de moyens publics ou privés importants, qu’ils soient militaires ou autres ; 4) l’implication dans la définition et l’établissement du dessein méthodique d’autorités politiques et/ou militaires de haut niveau. »

66Le cas de la bisexualité est intéressant dans le sens où il démontre que la sexualité n’est pas obligatoirement figée à une seule orientation sexuelle. Bien qu’elle ne soit pas le fruit d’un choix individuel, mais d’une attirance affective avant d’être sexuelle pour les deux sexes, elle remet en cause, à elle seule, l’hypothèse de la permanence ou de la stabilité des groupes requises en matière de génocide.

67Développement de lois autorisant le mariage entre personnes du même sexe en France depuis 2013, au Luxembourg depuis 2014, en Irlande depuis 2015, en Colombie depuis 2016, dépénalisation des relations homosexuelles aux Seychelles depuis 2016.

68In fine, ce serait « faire le jeu de l’auteur du crime dans la distinction arbitraire qu’il a établie au sein du genre humain. » Commentaire de l’avocat général Dontenwille (sous Cass.crim., 20 décembre 1985, Fédération nationale des déportés et internés résistants et patriotes et autres), cité in BETTATI Mario, « Le crime contre l’humanité » (chapitre 8), in ASCENSIO Hervé, DECAUX Emmanuel & PELLET Alain, Droit international pénal. Pedone, « CEDIN », 2ème éd. Révisée, 2012, p.114 ; DELMAS-Marty Mireille, « Le Crime contre l’humanité, les droits de l’homme et l’irréductible humain », Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, n° 3, juillet-septembre 1994, p. 489.

69cf. génocide.

70JACQUELIN Mathieu, L’incrimination de génocide – étude comparée du droit de la Cour pénale internationale et du droit français. L.G.D.J, Thèses, no62, Fondation Varenne (prix), 2012, p.287.

71LA ROSA Anne-Marie & Santiago VILLALPANDO, « Le crime de génocide revisité. Nouveau regard sur la définition de la Convention de 1948 à l’heure de son cinquantième anniversaire. Tentative d’appréhension théorique des éléments constitutifs du crime », in BOUSTANY Katia, DORMOY Daniel et Réseau Vitoria, Génocide(s). Bruxelles : Bruylant, Collection de droit international, 1999, p.66.

72TPIY, Le Procureur contre Jelisíc, Jugement, Affaire noIT-95–10-T, 4 décembre 1999, §§50-58.

73JUROVICS Yann, Réflexions sur la spécificité du crime contre l’humanité. L.G.D.J, Bibliothèque de droit international et communautaire, Tome 116, 2002, p.200. À ce propos, il faut rappeler que la CPI s’est saisie au sujet de crimes contre l’humanité commis dans le cadre de violences post-électorales, au Kenya, en mars 2010 et qu’il n’existait pas de contexte armé.

74GRAVEN Jean, Les crimes contre l’humanité, RCADI, 1950, I, tome 76, pp.497-592, p.547 : « ignoré par les lois de la paix comme par celles de la guerre, le crime contre l’humanité, jusqu’au Statut de Londres du 8 août 1945, qui lui donnera officiellement naissance, voyagea sous le manteau du crime de guerre. »

75FROUVILLE (de) Olivier, Droit international pénal. Sources, incriminations, responsabilité. Paris : Pedone, 2012, notamment chapitre 3, 488p.

76Supra note [27].

77Idem.

78Article 6(1)(k) du Statut de Rome.

79Bien que le sexisme renvoie à une distinction fondée sur le sexe, son interprétation n’inclue pas l’orientation sexuelle, mais la discrimination fondée sur le sexe, l’opposition homme/femme, notamment les stéréotypes de genre. Voir : FERNANDEZ Jonathan, « Spécisme, sexisme et racisme. Idéologie naturaliste et mécanismes discriminatoires », Nouvelles Questions Féministes, Vol.34, 2015, p.51-69. [url]www.cairn.info.janus.biu.sorbonne.fr/revue-nouvelles-questions-feministes-2015-1-page-51.htm (consulté le 1er juin 2017). MONFORT Jean-Yves, « Le racisme, le sexisme et l’homophobie ne sont pas des « opinions » », LEGICOM, Vol.1, no2, 2015, p.77-81. [url]www.cairn.info.janus.biu.sorbonne.fr/revue-legicom-2015-1-page-77.htm (consulté le 1er juin 2017).

80TPIY, Le Procureur contre Kupreškić et consorts, Jugement, Affaire noIT-95-16-T, 14 janvier 2000, §636.

81Idem.

82Idem.

83BUSSY Florent, « Le crime contre l’humanité, une étude critique » (pp.135-138), in Témoigner. Entre histoire et mémoire, Revue pluridisciplinaire de la Fondation Auschwitz, no115, 2013, p.136.

84Sur la question des droits de l’Homme en droit international, voir : FROUVILLE (de) Olivier, L’intangibilité des droits de l’Homme en droit international. Régime conventionnel des droits de l’Homme et droit des traités. Paris : Pedone, 2004, 561p.

85Plus de soixante-dix États à travers le monde pénalisent encore l’homosexualité. En France, il faudra attendre 1982 pour que l’homosexualité soit dépénalisée. Dans une dizaine d’États à majorité musulmane, l’homosexualité est encore passible de la peine de mort. Voir aussi : WINTEMUTE Robert, « Droit pénal, droits de l’Homme et dépénalisation universelle de l’homosexualité : de la France à l’Inde « , in PUECHAVY Michel & Frédéric KRENC (dir.). Droit répressif au pluriel : droit interne. droit international, droit européen, droits de l’homme. Liber amicorum en l’honneur de Renée Koering-Joulin, Némesis, « Droit & Justice », no110, 2015, pp.798-815.

86Il est intéressant de signaler que l’article 2(1) du Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques contient une liste de motifs discriminatoires qui n’est pas exhaustive : « les États parties au présent Pacte s’engagent à respecter et à garantir à tous les individus se trouvant sur leur territoire et relevant de leur compétence les droits reconnus dans le présent Pacte, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation. » [url]www.ohchr.org/FR/ProfessionalInterest/Pages/CCPR.aspx (consulté le 1er juin 2017).

87Article 1(1) DUDH : « Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation. »

88Article 2(1) DUDH : « Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation. »

89Article 12 DUDH : « Nul ne sera l’objet d’immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d’atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes. »

90Au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, la déclaration était essentiellement destinée à ouvrir la voie vers une nouvelle ère de libertés, de paix et de prospérité économique. Il n’est donc pas surprenant que l’homosexualité n’ait pas été abordée. La déclaration est le reflet de la société internationale à un moment « T » de son histoire. En 1948, la sexualité ressort du domaine privé. Elle était étroitement liée à la faculté de contracter un mariage avec un partenaire du sexe opposé, marquée par un objectif de procréation et empreinte de morales religieuses. À cette époque et dans les décennies qui ont suivi la déclaration, il ne faut pas perdre de vue que les rapports entre personnes du même sexe ont été largement condamnés et réprimés par les États (cf. France, Royaume-Uni, URSS…). Voir : 183ème Séance Plénière du 10 décembre 1948, Suite de la discussion sur le projet de déclaration universelle des droits de l’homme : rapport de la Troisième Commission (A/777). [url]www.un.org/fr/documents/view_doc.asp?symbol=A/PV.183 (consulté le 1er juin 2017).

91Il est intéressant de souligner que les États sont incités à protéger tous les droits humains et les libertés fondamentales, sans distinctions ; sur ce point la Résolution 60/1 de l’Assemblée Générale des Nations Unies du 25 octobre 2005 (A/RES/60/1) est tout à fait pertinente, même si son paragraphe 122 ne vise pas spécifiquement l’orientation sexuelle des individus ; nous soulignons : « […] Il incombe à tous les États, en vertu de la Charte, de respecter les droits de l’homme et les libertés fondamentales de tous, sans aucune distinction fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, les opinions politiques ou autres, l’origine nationale ou sociale, les biens, la naissance ou d’autres considérations. » [url]www2.ohchr.org/french/bodies/hrcouncil/docs/gaA.RES.60.1_Fr.pdf (consulté le 20 juin 2017).

92TPIY, Le Procureur contre Akayesu, 2 septembre 1998, §559 : «L’incitation directe et publique doit être définie […] comme le fait de directement provoquer l’auteur ou les auteurs à commettre un génocide, soit par des discours, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics, soit par des écrits, des imprimés vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans des lieux ou réunions publics, soit par des placards ou affiches, exposés aux regards du public, soit par tout autre moyen de communication audiovisuelle.» Idem. §555. Voir aussi : Article 25(3)(e) Statut de la CPI.

93En matière de génocide, les auteurs considèrent que l’incitation offre une « position de repli » pour l’accusation, in FERNANDEZ Julian & PACREAU Xavier (dir.), Statut de Rome de la Cour pénale internationale : commentaire article par article. Pedone, Tome I, p.829.

94SCHABAS William, Convention pour la Prévention et la Répression du Crime de Génocide, United Nations Audiovisual Library of International Law, [en ligne], 2008, p.5 : « Dans son rapport au Secrétaire général des Nations Unies en janvier 2005, la Commission internationale d’enquête sur le Darfour a insisté pour que les crimes contre l’humanité puissent être considérés, dans certains cas, tout aussi graves que le génocide. Il a souligné dans ses commentaires que le débat sur la question de caractériser les actes soit de génocide ou de « simples » crimes contre l’humanité est souvent stérile. En effet, les crimes contre l’humanité se rangent dans la catégorie des atrocités nazies commises à Nuremberg. Ils demeurent les « crimes les plus graves qui préoccupent la communauté internationale tout entière » et sont énumérés dans le Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Néanmoins, à côté de la définition juridique du génocide, inscrite dans la Convention de 1948 et confirmée dans les jurisprudences ultérieures, il existe une conception plus populaire ou familière. Dans la pratique, cette compréhension profane est plus proche de la définition de crimes contre l’humanité puisqu’elle englobe une multitude d’atrocités de masse. » [url]http://legal.un.org/avl/pdf/ha/cppcg/cppcg_f.pdf (consulté le 3 juin 2017). Dans un esprit analogue, Françoise Chandernagor, parle d’un « vaste défoulement collectif » (p.36), lorsqu’elle aborde la question de la reconnaissance des crimes passés par les lois dites « mémorielles » (génocide des arméniens, loi Taubira sur l’esclavage, etc…). Lois, qui peuvent satisfaire l’appétit grandissant pour le devoir mémoire et le besoin de reconnaissance des victimes ou de leurs descendants, mais qui peuvent entrer en conflit, d’une part, avec les définitions posées du droit pénal international, d’autre part, avec le travail d’historien. Voir : NORA Pierre & CHANDERNAGOR Françoise, Liberté pour l’Histoire. CNRS Editions, Paris, 2008, Débats, 58p. Voir aussi le Rapport de la Mission Internationale et indépendante sur le conflit en Géorgie : « En raison tant de la gravité que revêt le crime de génocide dans l’opinion publique et la conscience collective que de sa définition juridique très précise et des conséquences qu’il emporte en droit international, il est extrêmement important d’examiner soigneusement ces allégations. » Mission internationale et indépendante sur le conflit en Géorgie, Rapport, septembre 2009, volume II, IV. allégations de génocide, p.149.

95« Davantage », car la Fédération de Russie s’était aussi détournée de la Convention Européenne de Sauvegarde des droits de l’Homme, en 2011, après sa condamnation dans l’affaire Ioukos (Yukos). Voir : Cour européenne des droits de l’homme, 20 septembre 2011, OAO Neftyanaya Kompaniya Yukos contre Russie. YVERNAULT Dimitri, « Expropriation déguisée, impôt et droit de propriété : l’affaire Yukos, un épisode de la guerre des oligarques russes devant la Cour européenne des droits de l’homme », Revue Trimestrielle des Droits de l’Homme (RTDH), no94, 2013, pp.377-404(obs/s. Cour eur. dr. h., OAO Neftyanaya Kompaniya Yukos c. Russie, 20 septembre 2011) .

96MENDRAS Marie, « Pouvoir et territoire en Russie », Cultures & Conflits, [en ligne], nos21-22, printemps-été 1996, consulté le 01 octobre 2016. [url]http://conflits.revues.org/265 (consulté le 4 juin 2017).

97Sur la qualité d’État de la Tchétchénie, s’intéresser à l’histoire insolite de la reconnaissance par le gouvernement afghan des Talibans. Voir : GRANT D. Thomas, Current Devlopment : Afghanistan Recognizes Chechnya, American University International Law Review, Vol.15, no4, 2000, pp.869-894. TOURME JOUANNET Emmanuel (sous la dir.), Droit international et reconnaissance. Pedone, 2016, 370p.

98VATCHAGAEV Maïrbek, L’aigle et le loup, La Tchétchénie dans la guerre du Causase au XIXe siècle. Buchet-Chastel, 2008, 258p.

99À la suite de la première guerre, la Tchétchénie et la Fédération de Russie signent les accords de paix de Kassaviourt (Daghestan) en 1996, entérinant le retrait des forces fédérales russes et octroyant (en théorie) l’indépendance à la Tchétchénie. En 1997, un accord de paix est de nouveau signé entre les représentants tchétchènes et le pouvoir russe.

100La seconde guerre de Tchétchénie a permis à la Fédération de Russie de reprendre le contrôle sur la république. Voir : MERLIN Aude, SERRANO Sylvia & al., Tchétchénie : une affaire intérieure ?: Russes et Tchétchènes dans l’étau de la guerre, Paris :CERI- Autrement, 2005, 166p. MERLIN Aude et LE HUÉROU Anne, « Le conflit tchétchène à l’épreuve de la reconnaissance  », Cultures & Conflits, [en ligne], no87, automne 2012. [url]http://conflits.revues.org/18475 (consulté le 3 juin 2017). Le Courrier des pays de l’Est, [en ligne], 2005/2, no1048, 122p. [url]www.cairn.info/revue-le-courrier-des-pays-de-l-est-2005-2.htm (consulté le 3 juin 2017).

101Version française disponible sur [url]www.constitution.ru/fr (consulté le 1er juin 2017).

102Fédération de Russie, Constitution, version au 2017, Article 73 : « En dehors des limites de la compétence de la Fédération de Russie et des attributions de la Fédération de Russie dans les domaines de compétence conjointe de la Fédération de Russie et des sujets de la Fédération de Russie, les sujets de la Fédération de Russie possèdent la plénitude du pouvoir d’État ». Voir aussi : Commission Européenne pour la Démocratie par le Droit, Avis sur le Projet de Constitution de La République Tchétchène, Strasbourg, le 24 mars 2003, adopté par la Commission de Venise lors de sa 54ème Session plénière (Venise, 14-15 mars 2003), Opinion no231/2003. [url]www.venice.coe.int/webforms/documents/default.aspx?pdffile=CDL-AD(2003)002-f (consulté le 1er juin 2017).

103Fédération de Russie, The Constitution of the Chechen Republic, version du 23 mais 2003, Article 4 (Séparation des pouvoirs, R.F.10) : « (1) State Power in the Chechen Republic is exercised on the basis of a division between the legislative, executive and judicial branches. The bodies of the legislative, executive and judicial powers are independent.
(2) The system of state power in the Chechen Republic is established on the basis of the present Constitution in accordance with the fundamentals of the constitutional system of the Russian Federation, general principles for organizing the legislative (representative) and executive bodies of government power and established federal laws. »

104LITTEL Jonathan, Tchétchénie, an III. Gallimard, 2009, p.34 et 132.

105Fédération de Russie, The Constitution of the Chechen Republic, version du 23 mais 2003, Article 1 (2) « The territory of the Chechen Republic is one and indivisible and forms an inalienable part of the territory of the Russian Federation. »

106Article 71(j) de la Constitution de la Fédération de Russie (politique extérieure, relations internationales de la Fédération de Russie, traités internationaux de la Fédération de Russie, problèmes de la guerre et de la paix).

107Dans une optique d’engagement de la responsabilité du supérieur hiérarchique notamment, cf. article 28 du Statut de Rome.

108TPIY, Affaire Le Procureur c. Karadžic, IT-95/5-18-T, jugement, 24 mars 2016, §581 : “[…] The superior’s de jure authority “constitutes prima facie a reasonable basis for assuming that he has effective control over his subordinates” but still requires the Prosecution to prove that he exercised effective control ». [url]www.icty.org/x/cases/karadzic/tjug/en/160324_judgement.pdf (consulté le 4 juin 2017).

109TPIY, Affaire Le Procureur c. Delalíc, IT-96-21-T, 16 novembre 1998, §370. « […] Ainsi, le titre officiel de commandant ne saurait être considéré comme une condition préalable et nécessaire à la mise en œuvre de la responsabilité du supérieur hiérarchique, celle-ci pouvant découler de l’exercice de fait, comme en droit, des fonctions de commandant. » (consulté le 4 juin 2017).

110Il est nommément visé par la « plainte » des ONG françaises.

111Cour pénale internationale, [en ligne], situation en Géorgie. [url]www.icc-cpi.int/georgia?ln=fr (consulté le 1er juin 2017).

112La conséquence principale étant qu’à partir de novembre 2017, la Russie ne pourra plus assister aux sessions de l’Assemblée des États-parties en tant qu’État observateur.

113Libération / AFP, [en ligne], « Persécution d’homosexuels en Tchétchénie : plainte devant la CPI », le 16 mai 2017. [url]www.liberation.fr/planete/2017/05/16/persecution-d-homosexuels-en-tchetchenie-plainte-devant-la-cpi_1569954 (consulté le 1er juin 2017).

114Les autorités nationales ont compétences pour enquêter et poursuivre par elles-mêmes les responsables de crimes internationaux. La CPI n’intervient que de manière complémentaire, subsidiaire en cas de défaillances ou carences des États. Voir le préambule du Statut (alinéa 10) et l’article 1er du Statut.

115Article 15(1) du Statut de Rome.

116Voir Article 53(1)(c) et Article 53(2)(c) du Statut de Rome. Voir à titre d’exemple, l’examen mené par la chambre préliminaire de la CPI, in CPI, situation en Géorgie, Chambre préliminaire I, Decision on the Prosecutor’s request for authorization of an investigation, 27 janvier 2016, noICC-01/15, §6 : “Article 53(1) of the Statute, quite logically, requires the analysis to focus on crimes within the jurisdiction of the Court. In this regard, it is sufficient to note that the crimes alleged by the Prosecutor in the Request: (i) are crimes under the Statute, in particular under articles 7 and 8 (jurisdiction ratione materiae); (ii) are alleged to have occurred after 1 December 2003, the date of entry into force of the Statute for Georgia (jurisdiction ratione temporis); and (iii) are alleged to have been committed on Georgian territory (jurisdiction ratione loci). […]. [url]www.icc-cpi.int/CourtRecords/CR2016_00608.PDF (consulté le 2 juin 2017). Idem. CPI, situation au Kenya, chambre préliminaire II, Décision relative à la demande d’autorisation d’ouvrir une enquête dans le cadre de la situation en République du Kenya rendue en application de l’article 15 du Statut de Rome, noICC‐01/09, 31 mars 2010, §39. [url]www.icc-cpi.int/CourtRecords/CR2011_03256.PDF (consulté le 2 juin 2017). Sur la définition de la compétence au sens du Statut de Rome, voir : CPI, Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, Chambre d’appel, Arrêt relatif à l’appel interjeté par Thomas Lubanga Dyilo contre la décision du 3 octobre 2006 relative à l’exception d’incompétence de la Cour soulevée par la Défense en vertu de l’article 19‐2‐a du Statut, §§21-22.

117Sont alors examinés trois points, la question de la complémentarité de la Cour avec les juridictions pénales nationales (existence de procédures au niveau national), la détermination du seuil de gravité de l’affaire (article 17(1)(d) du Statut), eu égard à la position des personnes susceptibles d’être visées par les enquêtes éventuelles du Procureur et à l’ampleur quantitative et qualitative des crimes, puis si il existe des motifs substantiels de croire, que compte tenu de la gravité des crimes et de l’intérêt des victimes, l’ouverture d’une enquête servirait les intérêts de la justice (article 53(1)(c) du Statut). Voir à ce propos : CPI, situation en Géorgie, Chambre préliminaire I, Decision on the Prosecutor’s request for authorization of an investigation, 27 janvier 2016, noICC-01/15, notamment §9 (compétence), §39 (complémentarité), §51 (gravité) et §58 (intérêts de la justice).

118BUKHARI de PONTUAL Sylvie, « ONG et évolution du droit international », C.E.R.A.S Revue Projet, [en ligne], n° 313, juin 2009, pp.61-69. [url]www.cairn.info/revue-projet-2009-6-page-61.htm (consulté le 2 juin 2017).

119Voir : Article 71(n), Article 118 et Article 126 de la Constitution de la Fédération de Russie.

120Supra note [27].

121Voir : HENDLEY Kathryn, Varieties of Legal Dualism: Making Sense of the Role of Law, Contemporary Russia. Wisconsin International Law Journal, vol.29, no2, 2011,p.252 & p.259. Consulter aussi : International Crisis Group, “The North Caucasus: The Challenges of Integration (III)”, 06 septembre 2013, pp.41-43.

122La loi du 18 décembre 2001 (entrée en vigueur le 1er juillet 2002) a accordé plus de droits à la défense et prévu des méthodes alternatives à la sanction pénale, telle que la médiation (toutefois réservée à certains domaines déterminés par la loi).

123Le code pénal russe prévoit notamment des aggravations de peine.

124Le code pénal de la Fédération de Russie n’envisage que deux types de crimes internationaux, le génocide en sont article, qui reprenant les différents groupes prévus par la Convention pour la prévention et la répression du génocide et les crimes de guerre.

125La population de Tchétchénie est majoritairement sunnite.

126Les crimes d’honneur et les vendettas, notamment.

127Supra note [27].

128Voir le rapport de « Mémorial » (Comité « Assistance Civile »), sous la direction de S.A. GANNOUCHKINA, intitulé « Les Tchétchènes En Russie. Persécutions criminelles infligées aux habitants – Situation des femmes – Problèmes de propriété », Centre de défense des Droits de l’Homme, 2014, 57p. Voir aussi : CEDH, Aslakhanova et autres c Russie, 18 déc. 2012, app. no2944/06, 332/08, 42509/10, 50184/07, 8300/07. CEDH, Lashmankin et 14 autres contre Russie, app. no57818/09, 51169/10, 4618/11, 19700/11, 31040/11, 47609/11, 55306/11, 59410/11, 7189/12, 16128/12, 16134/12, 20273/12, 51540/12, 64243/12, et 37038/13. De nombreuses requêtes similaires sont pendantes devant la CEDH, concernant les restrictions mises en place par la Russie vis-a-vis des associations et rassemblements publics LGBTI. Le dernier rebondissement en date est la condamnation de la Russie par la CEDH pour violation de l’article 10 relatif à la liberté d’expression et de l’article 14 relatif à l’interdiction de la discrimination (CEDH, Bayev et autres c. Russie, 20 juin 2017, arrêt grande chambre, requêtes nos 67667/09, 44092/12 et 56717/12).

129Amnesty International, Droits humains en Russie. Résister pour l’état de droit [en ligne]. Autrement, « Frontières », 2010, 144p. [url]www.cairn.info/droits-humains-en-russie–9782746713710.htm (consulté le 13/06/2017).

130International Covenant On Civil And Political Rights, 24 November 2009, Human Rights Committee, Ninety-Seventh Session, 12-30 October 2009, Consideration Of Reports Submitted By States Parties Under Article 40 Of The Covenant, Concluding Observations Of The Human Rights Committee, Russian Federation, CCPR/C/RUS/O/06, §14.

131Idem. §10.

132Idem. §27 : »The Committee is concerned about acts of violence against lesbian, gay, bisexual and trans-gender (LGBT) persons, including reports of harassment by the police and incidents of people being assaulted or killed on account of their sexual orientation. The Committee notes with concern the systematic discrimination against individuals on the basis of their sexual orientation in the State party, including hate speech and manifestations of intolerance and prejudice by public officials, religious leaders and in the media. The Committee is also concerned about discrimination in employment, health care, education and other fields, as well as the infringement of the right to freedom of assembly and association and notes the absence of legislation that specifically prohibits discrimination on the basis of sexual orientation. (art. 26) »

133Pressions sur l’adoption du Protocole 14 à la CEDH de 2010, déclaration concernant la primauté de la Constitution sur la CEDH, menaces de non-exécution des décisions rendues par la CEDH, entre autres.

134Au nombre de 8 depuis le début du conflit syrien, en 2011.

135MURPHY Sean, « Toward a Convention on Crimes against Humanity? », La Revue des droits de l’homme, [En ligne], no7, 2015. [url]http://revdh.revues.org/1185 (consulté le 4 juin 2017). Voir la position de la Fédération de Russie sur le sujet : A/C.6/68/SR.19, §56. [url]http://undocs.org/A/C.6/68/SR.19 (consulté le 2 juin 2017).

136La Fédération de Russie a ratifié la Convention de prévention et de répression du Génocide en 1954.

137Suite à l’annexion de la Crimée, au printemps 2014, le gouvernement russe a finalement autorisé le déploiement de missions d’observation de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) aux checkpoints de Gukovo et Donetsk, à la frontière russo-ukrainienne. Voir : Conseil Permanent de l’OSCE, décision no1130, Déploiement d’observateurs de l’OSCE à deux postes de contrôle russes sur la frontiѐre Russo-Ukrainienne, 24 juillet 2014, PC.DEC/1130. Conseil Permanent de l’OSCE, décision no1160, Prorogation du déploiement d’observateurs de l’OSCE à deux postes de contrôle russes sur la frontiѐre Russo-Ukrainienne, 25 mars 2015, PC.DEC/1160.

138La Russie a été condamnée concernant l’enlèvement et les traitements inhumains subis par des associatifs et des journaliste, en Ingouchie. Voir : CEDH, Orlov et autres, app. no5632/10, jugement, 14 mars 2017.

139Il est difficile d’imaginer le Kremlin prendre des mesures coercitives contre l’un de ses protégés, après avoir adopté une loi anti-propagande homosexuelle, surmonté difficilement deux conflits violents et avoir entrepris depuis plusieurs années, des tentatives de stabilisation et de normalisation des relations entre la Tchétchénie et le pouvoir central russe. Régulièrement le pouvoir tchétchène provoque la Fédération (cf. 2015 menaces envers les soldats russes déployés sur le territoire tchétchène).

140En 2011, le Bureau du Procureur Fédéral de Russie avait rappelé aux autorités tchétchènes la nécessité d’enquêter sur les cas d’agressions de femmes, engendrées suite à l’adoption d’une loi locale sur l’obligation de port du voile, obligeant toutes les femmes tchétchènes à se couvrir au nom de la morale islamique. Aucune autre mesure n’a été prise à l’encontre de la Tchétchénie. Voir le rapport de Human Rights Watch (HRW), intitulé ”Enforcement of an Islamic Dress Code for Women in Chechnya”, du 10 mars 2011, disponible en anglais. [url]www.hrw.org/report/2011/03/10/you-dress-according-their-rules/enforcement-islamic-dress-code-women-chechnya (consulté le 2 juin 2017).

141Article 8 du Statut du Conseil de l’Europe : « Tout membre du Conseil de l’Europe qui enfreint gravement les dispositions de l’article 3 peut être suspendu de son droit de représentation et invité par le Comité des Ministres à se retirer dans les conditions prévues à l’article 7. S’il n’est pas tenu compte de cette invitation, le Comité peut décider que le membre dont il s’agit a cessé d’appartenir au Conseil à compter d’une date que le Comité fixe lui même. »

142Les États n’exécutant pas leurs obligations financières peuvent voir le droit de représentation au Comité et à l’Assemblée suspendu par le Conseil des ministres, jusqu’à rétablissement du versement des contributions (art.9 du Statut du Conseil de l’Europe). La Fédération de Russie est le quatrième plus gros contributeur du Conseil de l’Europe (environ 33 millions d’euros prévus pour 2017). Consulté le budget prévu pour 2017 : [url]https://rm.coe.int/16806d8d2a (consulté le 1er juillet 2017).

143Les députés russes sont privés du droit de vote à l’APCE depuis 2014 ; une réponse politique à l’annexion de la Crimée. Entre 2000 et 2001, la Russie avait subi une suspension en raison de sa gestion de la crise tchétchène.

144GLINIASTY (de) Jean, « La Russie, entre retour sur la scène internationale et troubles domestiques », Interview, 30 mars 2017, Institution des Relations Internationales et Stratégiques (IRIS). [url]www.iris-france.org/91658-la-russie-entre-retour-sur-la-scene-internationale-et-troubles-domestiques (consulté le 2 juin 2017).

145Les États de la Baltique ont conforté leur position militaire aux frontières avec la Russie, suite à l’annexion de la Crimée.

146Voir les sanctions prises par le Conseil de l’Europe suite à l’annexion de la Crimée (disponible en anglais), du 29 juillet 2014, intitulé EU restrictive measures in view of the situation in Eastern Ukraine and the illegal annexation of Crimea.” [url]www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/EN/foraff/144159.pdf (consulté le 1er juin 2017).

147Directive 2011/95/UE du Parlement Européen et du Conseil du 13 décembre 2011, concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection, notamment les articles 9 (actes de persécution) et 10 (motifs de la persécution).

148Sont visées ici, la protection des réfugiés au sens de l’article 1er de la Convention de Genève de 1951, relative au statut des réfugiés et la protection dite subsidiaire prévue par la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 (supra), offerte aux personnes ne bénéficiant pas du statut de réfugié, mais dont le renvoi dans leur pays d’origine ou de résidence habituelle, leur fait courir un réel risque de subir des atteintes graves (peine de mort, torture, traitements inhumains ou dégradants, menaces graves et individuelles contre la vie).

149Voir notamment : Commission de Recours des Réfugiés (CRR), SR, 12 mai 1999, no328310, M. Djellal, France (Algérie). Commission Nationale du Droit d’Asile (CNDA), 6 avril 2009, no616907. M.K., France (Kosovo). CJUE, affaires jointes C-199/12, C-200/12 et C-201/12, Minister voor Immigratie en Asiel c. X, et Z c. Minister voor Immigratie en Asiel, 7 novembre 2013. Manuel de droit européen en matière d’asile, de frontières et d’immigration, Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, 2014, pp.71-73. [url]www.echr.coe.int/Documents/Handbook_asylum_FRA.pdf (consulté le 10 juin 2017).

150Commises en raison du sexe de la victime. Supra notes 52-53.

151L’article 9(2)(d) de la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 est une interprétation extensive de l’article 1er de la Convention de Genève de 1951, relative au statut des réfugiés, en ce que : « […] En fonction des conditions qui prévalent dans le pays d’origine, un groupe social spécifique peut être un groupe dont les membres ont pour caractéristique commune une orientation sexuelle. L’orientation sexuelle ne peut pas s’entendre comme comprenant des actes réputés délictueux d’après la législation nationale des États membres. […] »

152Voir : Assemblée du Conseil de l’Europe, « les prétendus crimes d’honneur », résolution no1327, 4 avril 2003. ARAJI K. Sharon, “Crimes of Honor and Shame : violence against women in Non-Western and Western Societies”, The Red Feather Journal of Post-Modern Criminology, Vol.8, 2000. [url]http://critcrim.org/redfeather/journal-pomocrim/vol-8-shaming/araji.html (consulté le 10 juin 2017). PLANT Valérie, “Honor Killings and the Asylum Gender Gap”, Florida State University Journal of Transnational Law and Policy, Vol.15, 2005.

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