Pierre Lena : parrain des doctorants
Par sa structure et sa taille, une université entièrement pluridisciplinaire comme celle de Limoges me paraît être une très grande force. Pierre Lena
Pierre Lena a été invité dans le cadre de la cinquième cérémonie de remise de diplômes de doctorat de l’Université de Limoges et a accepté d’être le parrain de la promotion 2014. Célèbre astrophysicien, il est connu notamment pour avoir embarqué à bord du Concorde et suivi une éclipse du soleil pendant 74 minutes.
Pourquoi avoir accepté de parrainer cette promotion de doctorants ?
Pour la région de Limoges et son université. C’est une petite université mais elle a le soin de la qualité. Ensuite parce que le doctorat a été un de mes grands enjeux professionnels pendant presque 30 ans de ma carrière : former des docteurs, assurer leur insertion professionnelle, veiller à ce que les politiques nationales – par différentes fonctions que j’ai pu avoir – prennent en compte les docteurs et la qualité de leur titre. Par exemple, avec le journal Le Monde nous avons créé le prix « Le Monde de la recherche universitaire ». Ce prix accorde une grande visibilité à 5 docteurs de sciences dures et 5 docteurs de sciences humaines et sociales. J’ai présidé ce jury pendant 7 ans. C’est un moment de mise en valeur du doctorat que j’aime beaucoup et c’est également ce que nous allons faire à l’occasion de cette cérémonie de remise de diplômes.
Connaissiez-vous l’Université de Limoges ?
J’ai eu l’occasion de venir ici à plusieurs reprises, invité par la Société Française de Physique et de Chimie. Je ne suis pas en terre inconnue. Par ailleurs, j’ai collaboré avec le laboratoire Xlim sur le projet de télescopes géant Ohana.
Quels regards portez-vous sur l’Université de Limoges ?
Je crois qu’elle a une force, c’est d’être pluridisciplinaire. Dans les années 80/90, des universités de très grandes villes se sont spécialisées. Nous assistons depuis 5 ans à un mouvement inverse. Ces universités cherchent à redevenir ce qu’elles n’auraient jamais dû cesser d’être. Le mot université contient les mots universel et universalité du savoir. Ces universités trop mono disciplinaire ont installé des frontières qui ne sont pas pertinentes dans le monde d’aujourd’hui. Les savoirs doivent se mêler pour traiter les questions du monde. Par sa structure et sa taille, une université entièrement pluridisciplinaire comme celle de Limoges me paraît être une très grande force.
Quels regards portez-vous sur le doctorat ?
Le rapport à la thèse est un rapport de passion et heureusement. Le doctorat est semé d’embûche. On commence avec une question dont on n’est pas sûr de trouver la réponse. Si l’on choisit bien son directeur de thèse et si celui-ci fait bien son travail, la nature est assez riche pour qu’il y ait toujours une réponse quelque part.
Qu’allez-vous dire à ces docteurs diplômés ?
Qu’ils doivent être fiers d’être docteurs et fiers de leurs compétences. Généralement, ils ne mettent pas sur leur carte de visite qu’ils sont docteurs car ils ont peur d’être pris pour un médecin ou un pharmacien. En France, nous sommes complètement atypiques sur ce point. En Angleterre, aux Etats-Unis ou en Allemagne, non seulement on le fait figurer mais en plus on en est fier. Voilà des jeunes qui ont fait un chemin incroyable mais qui sont timides pour mettre en valeur leur expertise.
Le doctorat ouvre des perspectives professionnelles, quelle a été l’expérience la plus marquante de votre carrière ?
Le Concorde est une belle histoire, j’aime bien la raconter. Dans un registre émotionnel, les nuits passées seul au sommet d’une montagne de la Cordillère des Andes sur un grand télescope est une expérience sensorielle, émotionnelle et rationnelle que j’ai toujours recherché dans ma vie.