« La révolution digitale est en marche »
Interview avec Christiane Dupuy, ingénieure de formation à l'ESPE de l'Académie de Limoges, sur le projet européen 'Digital Schools of Europe'.
PRÉSENTATION DU PROJET ‘DIGITAL SCHOOLS OF EUROPE’
«Arriver à établir une sorte de feuille de route à l’échelle de l’Europe, destinée aux établissements souhaitant devenir des établissements numériques», voilà, selon Christiane Dupuy, ingénieure de formation, spécialisée dans les usages numériques de l‘École Supérieure du Professorat et de l’Éducation (ESPE) de l’Université Limoges, tout l’enjeu du projet européen ‘Digital Schools of Europe’.
Financé dans le cadre du programme ERASMUS+, partenariat stratégique, et sélectionné pour une durée de 3 ans (2015-2018), le projet ‘Digital Schools of Europe’ a pour objectif principal d’établir un réseau dans 8 pays partenaires (Irlande, Danemark, Suède, Finlande, Espagne, Portugal, Italie et France) afin de réfléchir à l’intégration effective des technologies de l’information et de la communication au sein des écoles et collèges.
Christiane Dupuy affirme que «la révolution digitale est en marche» et qu’il est aujourd’hui «totalement indispensable de maîtriser les outils numériques». Elle ajoute que pour faire face à la surexposition de l’information, les enseignants doivent désormais enseigner aux élèves comment «utiliser les bons canaux d’information», comment faire preuve «d’esprit critique et être capable d’analyser et de trier cette information».
Quel est l’objectif du projet Digital Schools of Europe ?
Permettre aux étudiants, stagiaires, enseignants, directeurs d’école et chefs d’établissement de réfléchir à l’intégration effective des technologies de l’information et de la communication dans l’éducation. Il s’agit d’explorer les mises en œuvre concrètes au service de l’enseignement ou de l’apprentissage auprès des élèves de 4 à 14 ans.
Nous allons faire un état des lieux de ce que nous avons dans nos huit pays partenaires afin de voir s’il y a des choses à reprendre dans nos pays respectifs et puis, peut-être, à terme, arriver à faire une sorte de socle commun européen partagé par les établissements scolaires.
Quel est le résultat attendu ?
Créer un label ‘École Numérique d’Europe’ qui pourrait être attribué aux établissements répondant aux critères et ayant mis en œuvre les processus inhérents à l’obtention du label.
Quelle est la dimension internationale européenne du projet ?
Le projet associe un partenaire dans chaque pays participants (Irlande, Danemark, Suède, Finlande, Espagne, Portugal, l’Italie et la France) ainsi que des établissements scolaires accueillant des élèves de 4 à 14 ans. Le porteur de projet au niveau européen est le Dublin West Education Center en Irlande, c’est un peu l’équivalent de l’ESPE mais pour la formation continue.
Et comment se traduit ce projet à l’échelle nationale?
Dans la Région Limousin, une Équipe de Réflexion et de Recherche (ERR), mise en place conjointement par l’ESPE et la Délégation académique à la formation des personnels de l’Éducation nationale (DAFPEN) du Rectorat de Limoges, travaille sur le projet avec huit établissements scolaires. Les responsables de l’ERR ont pour rôle de diriger la réflexion, d’animer les débats et de cadrer la recherche sans jamais imposer leur vision.
Qui est à l’origine de ce projet au sein de l’ESPE de Limoges ?
Le projet fût impulsé par Rebecca Dahm, ex-directrice adjointe de l’ESPE et actuellement Maître de conférences en Anglais à l’ESPE de Toulouse. Lorsque le 24 août 2015, nous avons appris que le projet avait été retenu par la Commission Européenne, Rebecca Dahm ne travaillait plus à Limoges, mais il était hors de question que nous abandonnions un projet si intéressant. Aujourd’hui, avec la collaboration de Rebecca, j’ai repris le projet au sein de l’ESPE, aidée de Nicole Pignier, une enseignante-chercheuse de la Faculté de Lettres et des Sciences Humaines qui travaille sur les questions de l’usage du numérique.
Avez-vous déjà rencontré les autres partenaires ?
Oui, la première réunion entre partenaires a déjà eu lieu à Dublin en octobre 2015, et je rentre de Finlande où s’est tenue la seconde réunion. L’ESPE accueillera les collègues européens au mois d’octobre 2016. Le groupe s’est très vite fédéré et je pense que ça va être un projet très dynamique qui va bien fonctionner. Par ailleurs, chaque année, trois mobilités sont prévues afin de permettre aux partenaires de découvrir de nouvelles pratiques et de mutualiser les réflexions engagées localement.
LA RÉVOLUTION DIGITALE
Quel est l’avenir des établissements scolaires ?
Qu’on veuille ou non, on s’achemine vers un monde de plus en plus digital et je pense qu’il est important que ce qui se passe dans la société puisse aussi se décliner en termes d’éducation et d’usages pédagogiques. La révolution digitale est en marche même si les changements ne se verront que dans plusieurs années.
Quelles sont les opportunités et les dangers de cette révolution digitale ?
Aujourd’hui, il devient totalement indispensable de maîtriser les outils numériques. C’est pourquoi, Il est plus approprié d’étudier la plus-value que peuvent nous apporter ces outils que de les ignorer ou de passer à côté en prenant le risque de se retrouver un peu comme des illettrés du numérique. En outre, le matériel évolue très vite et n’est pas forcement entré de la même façon dans les écoles.
Néanmoins, au sein des établissements scolaires, on ne va pas pouvoir changer toutes les pratiques du jour au lendemain; d’ailleurs, ce n’est peut-être ni utile ni nécessaire. Il faut arriver à faire cohabiter le monde réel et le monde digital pour qu’ils ne soient pas en opposition, mais plutôt en complémentarité.
Comment combattre la surexposition d’information ?
Il est vrai qu’on est submergé par un flux d’informations qu’on n’arrive pas à trier et surtout à analyser avec le recul nécessaire. Tout circule sur le même niveau, avec les mêmes canaux, et du coup, ce qui est important de la part des enseignants c’est apprendre aux élèves à utiliser les bons canaux d’informations, à avoir un esprit critique et à être capable d’analyser et de trier.