Séminaire AFRINOV : la francophonie au cœur d’un projet international
Soutenu dans le cadre de l’Appel d’Offre International (AOI) de l’Université de Limoges en 2015, le projet « AFRINOV, entrepreneuriat et innovations en Afrique francophone » est porté par Alain Rivet, responsable du Master Management de l’Innovation à l’IAE et par Vincent Lagarde, Maître de Conférences à l’IAE de l’Université de Limoges et chercheur en entrepreneuriat au CREOP.
L’initiative de constituer un groupe de travail sur l’innovation et l’entrepreneuriat dans l’espace francophone repose sur plusieurs constats :
– une sollicitation régulière de l’Université de Limoges par des demandes de thèse et d’encadrement de cotutelle en lien avec l’Afrique francophone,
– une faible présence de cette dernière dans le monde académique anglo-saxon,
– un manque d’accès aux communications en français pour les enseignants africains tandis que de nombreuses revues scientifiques anglophones traitent de thématiques sur l’Afrique, une grande partie du continent leur échappant donc en termes de connaissances.
Le séminaire AFRINOV : échanges, projets et collaborations au rendez-vous
Organisé en octobre dernier durant deux jours, le séminaire AFRINOV a réuni une vingtaine d’enseignants et de chercheurs en provenance de République démocratique du Congo, du Sénégal, du Burkina Faso, d’Algérie, du Maroc, de Tunisie, d’Erythrée et de Guinée Conakry. Un chercheur de haut niveau était également présent : Gerard McElwee, Professeur en Entrepreneuriat et Directeur de recherche au département de Management de la Business School of Huddersfield (GB), et directeur de la revue IJ Entrepreneurship and Innovation, qui a trouvé un intérêt tout particulier à la thématique de ce séminaire.
Le projet AFRINOV a bénéficié du financement et du soutien technique de l’AOI dont ses initiateurs conviennent qu’il a été déterminant. En effet, certains partenaires africains ne possédaient pas les ressources financières nécessaires pour participer à cette manifestation, l’AOI a donc pleinement contribué à sa réussite en cofinançant leur venue.
Le premier jour du séminaire était consacré à l’aspect recherche et à l’élaboration de projets scientifiques. Peu investigués et peu présents dans la littérature, les pays d’Afrique communiquent rarement en anglais alors qu’il existe pourtant des terrains de recherche très originaux, tels que l’entrepreneuriat illégal ou les mines clandestines d’or et de diamants au Kasaï et au Congo. A moyen et long termes, tous les participants ont exprimé le souhait d’échanger des doctorants, de monter en compétences et de répondre à des projets communs pour obtenir des financements.
Axée sur la pédagogie, la seconde journée avait pour objectif de répondre à la question « Comment travailler ensemble ? ». Dans les faits, les établissements d’Afrique possèdent de nombreux étudiants mais peu de moyens. Il apparait donc essentiel de trouver des solutions pour collaborer efficacement et d’envisager la mise en place de nouveaux outils tels que des cours à distance. A court terme, des échanges d’étudiants et d’enseignants sont à l’étude. A plus long terme, l’objectif est d’aboutir à un Master « Innovation et Entrepreneuriat » commun à l’ensemble des partenaires d’AFRINOV, dans lequel chaque pays apporterait sa contribution et sa spécificité pour créer une unité d’enseignement (UE) qui serait réalisée sur place, les autres UE seraient alors dispensées en e-learning.
Enfin, cette rencontre a également été propice aux témoignages des participants qui ont évoqué un quotidien jalonné de difficultés grandissantes. Ainsi, la francophonie apparaît pour les enseignants africains comme un lieu de neutralité, de résistance pacifique et intellectuelle. Elle est également un moyen de parvenir à l’espace anglophone et d’envisager au niveau pédagogique une cohabitation du français et de l’anglais dans les cursus.
La francophonie moderne ancrée dans la stratégie de l’Université de Limoges
Les partenaires d’AFRINOV ont énormément d’espoir quant à ce projet : ils sont en attente de relations solides avec l’Université de Limoges, d’une véritable coopération qui se traduirait, entre autres, par l’échange d’enseignants, des publications conjointes et l’accueil de doctorants en cotutelle. Sur un principe de réciprocité, une nouvelle logique plus moderne de l’espace francophone se met progressivement en place : la francophonie horizontale qui incite chaque pays à s’inspirer des bonnes pratiques des autres pour s’améliorer.
L’Université de Limoges apparaît comme un espace politiquement et économiquement neutre, mais aussi comme un facilitateur. En ce sens une réflexion a été menée sur les besoins technologiques des établissements africains : une plateforme en ligne pourrait être créée et gérée par l’Université pour diffuser à travers l’Afrique des contenus francophones dématérialisées. En outre, certains enseignants n’ayant que peu accès à internet, ils attendent de l’Université un rôle d’animation des échanges et de coordination des projets, lors de publications dans des revues par exemple.
Aujourd’hui, la francophonie est une thématique abordée de façon plus ou moins approfondie par les établissements français. L’Université de Limoges considère la francophonie comme constitutive de son identité. Insérée dans les réseaux internationaux de coopération, elle en promeut une vision moderne. La remise en question des anciens schémas articulant centre/périphéries lui permet de faire de la francophonie un atout y compris dans les contextes de diversité linguistique.
La poursuite du projet AFRINOV
Alain Rivet et Vincent Lagarde sont désormais à la recherche de nouveaux financements pour poursuivre le projet AFRINOV pour lequel ils envisagent des retombées importantes à moyen et long termes.
Un des axes de développement du projet repose sur la notion d’« innovation frugale », un sujet de recherche particulièrement distinctif. En effet, ce concept consiste à s’inspirer de la manière dont les pays d’Afrique parviennent à innover : des innovations moins flagrantes en termes technologiques mais très efficientes et cela avec peu de moyens. L’objectif reposerait sur la modélisation de ce concept et son transfert en Europe.
Propos recueillis auprès de Monsieur Vincent Lagarde.