Un nouveau projet européen coordonné par l’Université de Limoges
Interview de Marc Huger - coordonnateur du projet H2020 ATHOR pour l'amélioration des matériaux réfractaires
Marc Huger est Professeur spécialiste en thermomécanique des matériaux céramiques et chercheur au sein du laboratoire Science des Procédés Céramiques et de Traitements de Surface (SPCTS – UMR 7315). Il coordonne le projet H2020 ATHOR (Advanced THermomechanical multiscale mOdelling of Refractory linings) dans le cadre des actions Marie Curie – Innovative Training Network (ITN).
ATHOR est le 2ème projet H2020 obtenu par le SPCTS en quelques mois. Pouvez-vous nous présenter le projet scientifique ATHOR ?
Les matériaux réfractaires sont nécessaires pour la fabrication de la plupart des objets de notre quotidien… Que ce soit des éléments constitutifs de notre logement (béton, brique, carrelage), de nos moyens de transport (voiture, train, avion) ou de communication (télévision, ordinateur, smartphone), ces objets sont en effet immanquablement constitués d’acier, d’aluminium, de cuivre, de verre, de ciment, qui requièrent des matériaux résistant à de très hautes températures pour leur élaboration de plus en plus sophistiquée.
De nombreux objets de notre quotidien (voiture, train, avion, télévision, ordinateur, smartphone ou même béton, brique, carrelage, etc…) qu’ils soient à base d’acier, d’aluminium, de cuivre, de verre, de ciment, etc., ont tous transité par des traitements industriels mettant en œuvre des températures très élevées pour les élaborer. Ces procédés de synthèse ou de mis en forme requièrent tous des matériaux réfractaires aux performances de plus en plus pointues.
Les recherches liées à ATHOR porteront sur l’amélioration des matériaux réfractaires, de leur microstructure, de leur architecture, de leurs performances, de leur durée de vie, afin d’améliorer la compétitivité Européenne sur le marché mondial et de conforter des positions de leader d’un certain nombre d’acteurs européens dans le domaine des réfractaires.
Les applications toucheront de nombreux domaines (sidérurgie, métallurgie, verrerie, cimenterie…).
Avec un score to 97,6 sur 100 proposé par les 3 évaluateurs européens, il faut noter qu’ATHOR est très bien classé puisque, parmi les 410 projets ITN soumis en janvier 2017 dans le domaine « Ingénierie », seuls les 28 premiers (ayant obtenu un score supérieur à 94,4 sur 100) seront finalement financés cette année par l’Europe.
Quels en sont les enjeux ?
Dans le cadre d’ATHOR, nous recrutons quinze doctorants à l’international sur des bourses européennes très attractives (type Marie Curie). Le projet a pour vocation d’attirer des jeunes de très bon niveau vers un parcours de thèse et au-delà de créer un réseau basé sur de nombreuses sessions de formations interdisciplinaires et des workshops, organisés un peu partout en Europe, au cours desquels les jeunes chercheurs pourront échanger avec de multiples professionnels du secteur industriel ou académique.
Nous souhaitons ainsi générer une nouvelle attractivité pour une industrie souvent peu visible du grand public, et ce de manière concertée entre les acteurs de la recherche académique et des industriels du secteur afin de conforter les positions de certains leaders mondiaux historiquement basés en Europe.
Nous souhaitons que nos doctorants puissent, au sein d’ATHOR construire et s’approprier de nouvelles techniques expérimentales et de nouvelles approches de modélisation, pour ensuite les disséminer au sein des acteurs du domaine.
Qui sont les partenaires ?
Le projet ATHOR s’est appuyé sur le réseau FIRE (Federation for International Refractory Research and Education), une association financée par des industriels qui associe des partenaires académiques et industriels internationaux. L’appartenance du SPCTS à ce réseau nous a donné de la visibilité aux activités thermomécaniques développées à Limoges et a déterminé notre évolution vers des activités de recherche au sein de réseaux multipartenaires internationaux. Depuis 10 ans, FIRE promeut la mobilité internationale d’étudiants au niveau Master et Doctorat dans ce secteur des matériaux réfractaires, avec une très forte participation des étudiants français (et notamment de Limoges). Une certain nombre d’entre eux sont d’ailleurs aujourd’hui professionnellement installés dans des activités de recherche et développement dans ce secteur industriel en Europe.
Depuis 3 ans, nous avons souhaité trouver une logique stratégique Européenne en allant chercher des financement H2020 et structurer une cohérence sur une chaine de valeur partant de l’extraction des matières premières en passant par le développement de matériaux réfractaires jusqu’à leurs applications finale en métallurgie, en verrerie ou cimenterie. Cette réflexion nous a conduit progressivement à la structuration du projet ATHOR.
Aujourd’hui, ATHOR compte six universités européennes : Universités de Limoges et Orléans en France, Cracovie (Pologne), Aachen (Allemagne), Leoben (Autriche), Minho (Portugal) et huit industriels : Altéo Alumina (Gardanne) et Saint-Gobain (Cavaillon) en France, Imerys Refractory Minerals (Villach) et RHI AG (Vienne) en Autriche, Magnesita Refractories (Hilden, Allemagne), Pyrotek Scandinavia AB (Ed, Suisse), TataSteel (Ijmuiden, Pays-bAS), FIRE (Montréal, Canada).
Comment les crédits seront-ils utilisés ?
Une grosse moitié des crédits sera utilisée en frais de bourses et de mobilité et ira directement aux doctorants. La particularité de ces bourses est qu’elle tient compte de la situation familiale des intéressés. Dans ce cadre, les montants proposés sont significativement plus élevés que ceux des bourses classiques.
L’autre moitié sera consacrée aux frais de fonctionnement pour les activités de recherche et pour l’organisation des sessions de formation.
Quel sera l’impact de ce projet pour le SPCTS ?
ATHOR est la concrétisation de notre volonté d’ouverture de la recherche académique vers le monde industriel. Il sera aussi un vecteur très significatif pour une visibilité internationale accrue des activités du SPCTS, ici dans le domaine des matériaux réfractaires, mais aussi plus largement dans le domaine des céramiques.
Propos recueillis par Françoise Mérigaud et Diane Daïan
> Contact : Marc Huger