« Ceci n’est pas un traité »
Umberto Eco parmi les manuels de sémiotique “This is not a treatise”
Umberto Eco among semiotics textbooks

Gianfranco Marrone

Università di Palermo

https://doi.org/10.25965/as.8313

Qu’est-ce qu’un Trattato ? Quelles sont ses formes textuelles ? Et quels sont ses objectifs de communication ? Bien qu’il existe de nombreux livres dans le monde qui présentent la sémiotique, le Trattato di semiotica generale d’Eco est le seul qui utilise, dans son titre, ce terme philosophique. En analysant la préface du livre, il est clair que le Trattato pourrait en fait servir d’essai théorique. En analysant plutôt sa structure argumentative, on se rend compte que le ton général du livre est narratif.

What is a Trattato? What are its textual forms? And what are its communicative purposes? Although there are many books in the world that introduce semiotics, Eco’s Trattato di semiotica generale is the only one that uses, in his title, this philosophical term. Analyzing the Preface to the book, it is clear that the Trattato might actually serve as a theoretical essay. Analyzing instead its argumentative structure, we realize that the general tone of the book is narrative.

Index

Articles du même auteur parus dans les Actes Sémiotiques

Mots-clés : argumentation, introduction à la sémiotique, narrativité, traité

Keywords : argumentation, introducing semiotics, narrativity, treatise

Auteurs cités : Roland BARTHES, Walter Benjamin, Joseph COURTÉS, Tullio De Mauro, Umberto ECO, Jerry Fodor, Algirdas J. GREIMAS, Jerrold Katz, Kalevi Kull, Ross Quillian

Plan
Texte intégral

1. Un traité, plusieurs genres

Note de bas de page 1 :

Cf. Marrone (2018, chap. 2).

Note de bas de page 2 :

J’utilise les critères graphiques indiqués par le Traité de Eco [p. 9], mais avec une modification partielle, peut-être pas innocente. N’y trouvant pas de signe graphique pour indiquer la matière hjelmslevienne du contenu à différencier de la substance du contenu, j’utilise pour elle ce qui est utilisé dans ces critères pour indiquer l’« objet non linguistique » comme « porteur de signification » (||xxxx||). Parallèlement, pour désigner l’objet – entendu non comme référent mais comme signifiant – j’utilise ce qu’Eco utilise lui-même pour désigner les signifiants en général (||xxxx|).

C’est bien connu. Et je ne pense pas qu’il soit nécessaire de le montrer, ici et maintenant. Quoi qu’il en soit, il convient de garder à l’esprit le célèbre ouvrage de René Magritte La trahison des images (1929), celui où l’on peut lire, sous le dessin d’une pipe, « ceci n’est pas une pipe ». Si je l’évoque dans le titre de ce texte, ce n’est pas pour discuter de l’immense série de ses interprétations, ni pour tenter une énième analyse sémiotique qui effacerait son intention apparemment ontologique. Mais parce que je crois que c’est une œuvre qui synthétise bien un certain nombre de problèmes propres à tout discours d’introduction aux études sémiotiques, et donc à un discours sur les discours d’introduction aux études sémiotiques. Il a une fonction apéritive parfaite. Personnellement, depuis des années, je montre ce tableau de l’artiste belge lorsque je commence mon cours de sémiotique générale1, afin d’indiquer, disons en direct, certains points clés de la discipline : le décalage entre signifiant (|mot|, |dessin|, |objet|) et signifié (« pipe ») ; la différence entre une substance générique du contenu ( (||pipe||) et une substance plus précise du contenu (la « pipe » dite, dessinée, montrée) ; l’immédiateté de la reconnaissance visuelle qui fait l’économie du signifiant (on voit un |dessin| et on dit qu’on voit une ||pipe||) ; la présupposition inhérente à toute négation (on nie ce qui est habituellement affirmé) ; l’énonciation métalinguistique (une œuvre d’art qui pose le problème clé de toute œuvre d’art, celui de la représentation visuelle, et donc artistique, sans parler de tout signe (le lien entre les mots et les choses) ; et enfin le titre qui, de l’intérieur du tableau, semble être une parfaite dénégation freudienne : qui réfute et affirme selon le point de vue – ce que je fais avec le titre de cette intervention, non sans une certaine volonté de mise en abyme (autre thème central de la sémiotique)2 .

Note de bas de page 3 :

Cf. Fabbri 1986.

D’où le problème que je voudrais aborder ici : celui de la forme textuelle du Traité de sémiotique générale, de sa mise en genre, du régime discursif qu’il assume et des effets de sens qui en résultent. Ce n’est pas une question secondaire s’il est vrai que, comme on le voit, parmi les livres de sémiotique qui se fixent des objectifs similaires aux siens – vulgarisation/réévaluation/réflexion – le Traité d’Eco est comme la Settimana enigmistica dans le contexte des revues de jeux : le plus imité, donc aussi celui qui a établi un genre et un style ; mais aussi, par contrecoup, celui à partir duquel ont été conçues des manifestations textuelles alternatives, des hypothèses de différenciation, des formes de manuels sémiotiques qui tentent de se positionner différemment de la théorie d’Eco, en agissant aussi et surtout sur le genre textuel à travers lequel elles se manifestent. L’exemple le plus évident d’une position théorique alternative qui entre en jeu dès sa forme est évidemment le Dictionnaire de Greimas et Courtés (1979), où la forme du traité – avec un fort pedigree philosophique et scientifique, comme nous le verrons – s’oppose à la forme du dictionnaire, entièrement interne à la matière linguistique dont il entend exposer la théorie. Là où le traité est un exposé constitutivement more geometrico, le dictionnaire est labyrinthique, sans début ni fin préétablis : on peut y entrer par n’importe quel côté, mais, une fois à l’intérieur, le jeu des interdéfinitions rend la sortie difficile3.

Le Traité est donc devenu, d’une manière ou d’une autre, un texte à partir duquel la sémiotique a constitué sa reconnaissabilité épistémologique et communicative, son édification théorique et sa diffusion sur le marché culturel et dans le monde de la recherche scientifique. Ce n’est pas un hasard si, à ma connaissance, aucun autre chercheur n’a jamais utilisé le terme « traité » dans un ouvrage de sémiotique générale (à l’exception, mais dans un domaine spécifique, du Traité du signe visuel du Groupe ). Dans le tableau suivant, j’ai tenté de répertorier les volumes d’introduction à la sémiotique parus en Italie, écrits en italien ou traduits d’autres langues vers l’italien, d’où l’on peut déduire, entre autres, l’unicité absolue du titre d’Eco. La liste est classée par ordre alphabétique des titres. J’ai écarté, pour des raisons de pertinence ou d’objectif éditorial, des ouvrages tels que Introduzione alla semantica (1965) et Minisemantica (1982) de De Mauro, ou le volume anthologique de Peirce intitulé Semiotica édité par Bonfantini et d’autres en 1980.

Basi di semiotica letteraria

2002 (2000)

Bertrand

Breve corso di semiotica

2000

Bonfantini

Breve storia della semiotica

2001

Calabrese

Capire la semiotica

2013

Pozzato

Cos’è la semiotica?

2012 (2007)

Hall

Elementi di semiologia

1966 (1964)

Barthes

Elementi di semiotica

1980

Trabant

Elementi di semiotica

2002

Gensini

Elementi di semiotica

2002

De Ioanna

Elementi di semiotica generativa

1991

Marsciani - Zinna

Fondamenti di teoria sociosemiotica

2012

Ferraro

Guida alla semiotica

1975

Calabrese - Mucci

In nome del segno

1982

Miceli

Introduzione alla semiotica

2002

Pieretti - Bonerba - Bernardelli

Introduzione alla semiotica del testo

2011

Marrone

La competenza semiotica

2012

Fabbri - Mangano

La semiotica contemporanea

1996

Eugeni

Laboratorio di semiotica

2005

Volli

Le basi della semiotica

2013

Traini

Le due vie della semiotica

2005

Traini

Lineamenti di semiologia

1971 (1966)

Prieto

Manuale di semiotica

2000

Volli

Manuale di semiotica

2004

Gensini

Piccolo corso di semiotica

2005

Fadda

Prima lezione di semiotica

2018

Marrone

Progetto di semiotica

1972

Garroni

Ricognizione della semiotica

1977

Garroni

Segni, linguaggi e testi. Semiotica per la comunicazione

2014

Marmo

Segni, testi, comunicazione. Gli strumenti semiotici

1997

Caprettini

Segni. Una introduzione alla semiotica

2003

Sebeok

Semiotica

1977

Casetti

Semiotica

2004

Magli

Semiotica

2005

Bettetini, Calabrese, Lorusso, Violi, Volli

Semiotica

2008

Vitacolonna

Semiotica

2009

Pisanty - Zjino

Semiotica (e)semplificata

2000

Rutelli

Semiotica del testo

2001

Pozzato

Semiotica e comunicazione

2004

Cicalese

Semiotica, 2 voll.

1999-2003

Bettetini-Cigada-Raynaud-Rigotti

Semiotica. Dizionario ragionato della teoria del linguaggio

1986 (1979)

Greimas - Courtés

Semiotica a prova d’esperienza

2013

Basso Fossali

Semiotica. Storia, contesti e metodi

2014

Bernardelli - Grillo

Semiotica. Teoria, metodo, analisi

2004

Magli

Semiotica. Teorie e tecniche

2005

Ferraro

Semotica in nuce, 2 voll.

2000-01

Fabbri - Marrone

Sociosemiotica

1997

Calefato

Sussidiario di semiotica

2007

Bonfantini, Bramati, Zingale

Trattato di semiotica generale

1975

Eco

Un mondo di segni

2012

Petrilli

Dans d’autres pays, le nombre de textes d’introduction à la sémiotique est considérablement réduit. En France, par exemple, je trouve, outre Sémiotique déjà cité, le Dictionnaire raisonné de la théorie du langage de Greimas et Courtés (1979, 1986), l’Analyse sémiotique des textes (1979) du Groupe d’Entrevernes, l’anthologie Sémiotique. L’École de Paris (1982) sous la direction de Coquet, les livres d’Hénault Les enjeux de la sémiotique (1979), Narratologie, Sémiotique générale (1983), Histoire de la sémiotique (1992) et Questions de sémiotique (2002), les manuels de Courtés (Introduction à la sémiotique narrative et discursive, 1976 ; Analyse sémiotique du discours, 1991 ; La sémiotique du langage, 2007), le Précis de sémiotique générale (1996) de Klinkenberg, la Sémiotique du discours (1998) de Fontanille.

Note de bas de page 4 :

Mais cf. la récente recognition de Kull et alii (2015).

Note de bas de page 5 :

Il est utile de mentionner que le Trattato di semiotica generale de Eco est l’édition italienne d’un texte anglais paru un an avant, qui n’est pas intitulé « treatise » mais A Theory of Semiotics.

Dans les pays anglo-saxons, on trouve le Handbook of Semiotics de Noth (1990), Introducting semiotics de Deely (1982), Guide to semiotics de Danesi (2007), Semiotics: the basic de Chandler (2002)4. Mais même dans ces cas, le terme « traité » n’est nécessaire dans aucun de ces titres5.

2. Le sens du traité

Mais qu’est-ce qu’un traité ? Ou plutôt comment ce terme est-il généralement utilisé, et donc défini, pour désigner un genre discursif ? L’une des interprétations les plus connues est sans doute celle, tendanciellement suspicieuse, qu’en donne Walter Benjamin (1983 : 30-31) avec une métaphore architecturale et des intentions qui ne sont qu’apparemment culturologiques :

Le traité est une forme arabe. Son extérieur est d’un seul bloc et discret, comme la façade des bâtiments arabes dont l’articulation ne commence que dans la cour. De même, la structure articulée du traité n’est pas visible de l’extérieur mais ne se manifeste que de l’intérieur. [...] La surface de ses considérations n’est pas animée de façon pittoresque, mais recouverte par le réseau des motifs ornementaux qui se déploient sans jamais s’interrompre. Dans la compacité décorative de cet exposé, la différence entre l’argumentation thématique et l’argumentation digressive disparaît.

L’articulation interne de la forme du traité, selon Benjamin, non seulement n’est pas perceptible de l’extérieur, mais finit par transformer son extrême précision argumentative en un décorativisme méticuleux, de sorte que la logique discursive qui distingue des plans et des niveaux, des marches et des escaliers, se perd dans une myriade de digressions qui se ressemblent toutes. C’est le sort, pourrait-on dire, d’un texte comme le Tractatus de Wittgenstein, cible probable de Benjamin, dont la forme géométrique finit par se dissoudre dans l’inéluctable fragmentation silencieuse des textes-non-textes successifs. L’argumentation philosophique hyper-rigoureuse se transforme en esthétique intransitive.

Note de bas de page 6 :

On travaillera ici avec des dictionnaires italiens.

Les dictionnaires6, on s’en doute, n’expriment pas autant de problématiques, mais servent plutôt de toile de fond non critique à cette vision défavorable. Ils mettent en jeu des isotopies décisives. Ainsi, par exemple, le Devoto-Oli :

traité, s.m. Ouvrage contenant le développement systématique de certains sujets d’intérêt scientifique, historique, littéraire : t. de zoologie, de botanique, de philosophie ; écrire, publier, un traité d’histoire médiévale.

La définition, comme souvent, n’est pas innocente. Par sa concision, elle énonce clairement l’essentiel : à une certaine forme textuelle correspond un certain sens idéal, et donc une valeur sociale. En effet, non seulement l’ouvrage-traité doit réaliser systématiquement les arguments qu’il traite, c’est-à-dire discute, mais ces arguments doivent aussi, grâce à la forme dans laquelle ils sont exposés, présenter un « intérêt » certain, qu’il soit « scientifique », « historique » ou « littéraire ». En d’autres termes, le choix d’une topique systématique provoque chez le lecteur, par un effet de sens rétroactif, la valeur incontestée, c’est-à-dire considérée comme acquise, des arguments du traité, leur « intérêt ». De sorte que, par contrecoup, un sujet de peu de valeur ne peut jamais prendre la forme d’un traité – sauf, bien sûr, par ironie (pensons au Traité de la plaisanterie d’Achille Campanile). Dans un traité, l’importance du sujet n’est pas démontrée, mais plutôt montrée, placée après coup comme quelque chose qui était déjà là avant, grâce seulement à la nature systématique de la dispositio de l’ars retorica. Comme dans toute signification qui se respecte, l’expression signifiante (c’est-à-dire le traitement systématique) et le contenu signifié (l’intérêt du sujet) se présupposent mutuellement, se constituent non sans arbitraire et se justifient l’un l’autre. Il s’ensuit que le genre traité est intrinsèquement considéré comme un discours « élevé » dans le système des genres propre à une culture donnée (certainement la nôtre), donnant lieu à des œuvres peu communes, remarquables, appréciables, dotées d’une valeur, parce qu’elles traitent de sujets reconnus comme « intéressants » ; des œuvres qui, pour faire preuve d’une telle pertinence, doivent assumer une dispositio systématique – il reste à déterminer en quoi consiste cette systématicité.

D’autres définitions que nous avons recueillies diffèrent peu de celle que nous venons d’évoquer, insistant davantage sur la forme « systématique » du texte que sur la valorisation socioculturelle implicite des thèmes abordés :

traité : un ouvrage de grande ampleur traitant méthodiquement d’une science, d’une discipline, d’une doctrine ou de parties de celles-ci : un traité de chimie, de zoologie, de mécanique quantique (Garzanti en ligne)
 
traité : ouvrage scientifique ou technique, historique, littéraire qui développe méthodiquement un sujet ou expose les principes et les règles d’une discipline : t. de zoologie, botanique, astronomie, rhétorique, philosophie, embryologie, architecture ; écrire, composer, publier un traité. Avec une valeur plus large, dans le passé, une étude ou un essai sur un sujet particulier (synon. donc du terme actuel monographie). (Treccani en ligne)
 
Un traité est une forme d’essai monographique, souvent à vocation didactique, utilisé pour l’exposition de concepts dans les domaines les plus divers de la connaissance. La particularité de cette œuvre littéraire est qu’elle aborde un sujet donné de manière exhaustive en suivant un plan avec certains principes et une méthode de base (à la différence des recueils divers tels que les livres de cuisine). Les principales catégories de traités sont scientifiques, historiques ou littéraires. Les premiers traités remontent à la littérature grecque : ils peuvent prendre la forme d’un exposé, comme la Poétique d’Aristote, ou d’un dialogue, comme les dialogues de Platon (le Symposium, le Phèdre, le Théétète). Cette dernière forme est particulièrement adaptée au traité car elle permet la démonstration d’une thèse par l’échange d’objections et de questions de la part des interlocuteurs. (Wikipedia)

Le traité, selon ces définitions, que ce soit à des fins didactiques ou pour des besoins plus génériques de communication scientifique ou littéraire, est le moyen essentiel pour exposer, et donc subsumer discursivement, un certain champ de connaissance, souvent une discipline. En inversant la perspective, il s’ensuit que l’articulation en disciplines utilise comme outil stratégique fondamental la forme accomplie du traité, sa nature constitutive méthodique plutôt que méthodologique. Si une discipline est, sur le plan socio-discursif, une portion de savoir avec ses principes propres et ses méthodes précises, la forme-traité est celle qui, en les exposant, permet, sinon leur existence en tant que telle, du moins leur reconnaissance collective assurée. La valeur des sujets traités, l’« intérêt » dont parlait Devoto-Oli, se réalise ainsi de façon très précise. Pour être une discipline, il ne suffit pas d’avoir des mémoires ou des essais, des dialogues ou des rapports ou des lettres, encore moins des recueils de fragments et d’aphorismes : il faut avoir des traités, qu’ils soient explicitement posés comme tels ou en tout cas construits en leur sein avec cette logique systématique qui, de la discipline, doit faire émerger des principes et des méthodes.

3. Traitement du traité

Or, notre Traité sait en quelque sorte tout cela. Si bien que dès la Préface, il pose le problème de la forme que prend le discours sémiotique lorsqu’il se veut, sinon totalisant, du moins englobant. Cela apparaît immédiatement dans l’épigraphe de Pascal – « qu’on ne dise pas que je n’ai rien dit de nouveau : la disposition des matières est nouvelle » [p. 5] –, phrase que Barthes (1967) avait utilisée comme exemple typique de la dispositio oratoria, et qui pose très franchement le problème de l’ordonnancement thématique de l’ouvrage. Et puis, ici aussi dès la première page, dans le fait que l’énonciateur relie ce texte à d’autres écrits sémiotiques de l’auteur (Appunti per una semiologia delle comunicazioni visive, La struttura assente, Le forme del contenuto, Il segno), par rapport auxquels le Traité se présente non seulement et pas tant comme un réarrangement conceptuel ou une avancée théorique, mais comme une véritable réécriture. Sans parler de la question du titre qui, dit-on avec une relative ironie, aurait été Critique de la sémiotique pure et de la sémiotique pratique : « un tel titre – lit-on [p. 6] – aurait assez bien rendu mes intentions, mais malheureusement la crainte révérencielle, le sens de la mesure et le sens de l’humour conspirèrent à décourager une telle impudence ». Une déclaration qui évoque indirectement le désir profond présent dans le texte de poser les conditions formelles de possibilité de la sémiose à travers un examen critique du transcendantal sémiotique. La périphrase kantienne a donc plus d’un sens.

Une question est également posée concernant la passion prédominante du lecteur modèle, également liée au genre textuel choisi : il s’agit de l’ennui, dérivant de raisons linguistiques (le livre a d’abord été écrit en anglais) et psychologiques (« pour ne dire que ce que je voulais dire » [p. 6]), qui conduisent presque à une « sécheresse » stylistique et rhétorique générale. Le lien « sécheresse/ennui » est là, en somme, comme une garantie supplémentaire, plus que de la simple autorité véridictoire, du genre textuel qui sous-tend cette autorité, et de son institutionnalisation par une discipline naissante comme la sémiotique.

Mais voyons comment le terme « traité » émerge dans cette préface. Disons qu’il apparaît progressivement et rarement, avec beaucoup de prudence. Si la plupart du temps le texte se réfère à lui-même tantôt sous la forme d’un locatif pur (« ici ») tantôt à travers un déictique autoréférentiel (« ces pages », « ce livre », « ce manuel »), il utilise quatre fois l’expression « traité » ; trois fois pour s’auto-désigner et une fois pour définir, de manière assez lapidaire, le genre du traité en tant que tel.

  1. Dans la première, |traité| remplace métonymiquement |manuel|. En effet, après avoir posé le problème de l’« ennui » et de la « sécheresse stylistique » comme une propriété (« un avantage ») de « ce manuel », le texte de la préface se concentre sur le point clé de la question : définir « le sens » de l’ouvrage qu’il présente. Et voici le |traité|, enfermé cependant entre de rassurants guillemets : « [...] devant résumer le sens de ce “traité” par rapport à mes autres ouvrages [...] » [p. 6]. La prise en charge de la forme du traité – avec ce qu’elle implique du point de vue de son sens idéal et de sa valeur sociale – se fait donc avec une conscience prudente. Le livre présenté n’est plus un simple livre, ni même un manuel, mais un traité entre guillemets : quelque chose comme un traité, une sorte de traité, un texte qui se veut, avec toute la prudence (et la responsabilité) qui s’impose, un traité.

  2. La seconde occurrence, en revanche, tend à l’objectivation : « Le traité acquiert ainsi une structure en chiasme » [p. 7]. Avec l’absence des guillemets, toute tension autodéfinitoire disparaît, et le texte vise à se détacher de lui-même, de la conscience circonspecte de sa propre forme générique, et fait de lui-même comme livre un objet établi du monde, un référent autonome par rapport au locuteur. Et donc un actant sujet doté d’une capacité d’action adéquate qui se procure à lui-même (qui « acquiert ») sa propre forme (c’est-à-dire la « structure en chiasme »). La présence de l’article déterminatif – « le traité » – semble d’ailleurs en faire le seul possible, avec une valeur antonomastique évidente, sur laquelle nous aurons à revenir.

  3. La troisième occurrence – « comment situer ce traité par rapport aux livres précédents ? » [p. 9.] – tire en quelque sorte les conséquences de ces écarts énonciatifs : on revient à la deixis (« ce »), mais à la place de |livre|, |pages| ou |manuel|, il y a maintenant |traité|. Sans guillemets.

  4. La quatrième occurrence clôt le cercle de l’argumentation menée sur le plan énonciatif : « Un traité n’est pas une charte constitutionnelle, il se contente de faire le point ». Une formule qui, en définissant en général la forme et le sens du genre traité (cf. le passage transformateur |il|  |un|), s’autodéfinit comme telle. Il en résulte une sorte d’enthymème implicite du type : « un traité n’est pas une charte constitutionnelle ; ce livre est un traité ; ce livre n’est pas une charte constitutionnelle ».

Il reste à dire sur la valeur antonomastique du Traité, ou plutôt : sur la manière dont le texte de la Préface fait du livre qu’il présente le traité (de sémiotique générale) par excellence. Il y parvient parfaitement. En effet, la Préface dit, en insistant, des choses sur la forme du texte et sur sa valeur sociale :

  • « Si j’avais vécu il y a deux siècles, le problème ne se serait pas posé : LE livre aurait été celui-ci, et les autres écrits auraient circulé sous forme de lettres aux collègues, aux académies et aux sociétés savantes, de manuscrits à exemplaire unique envoyés aux amis et aux adversaires par courrier hippomobile » [pp. 7-8] ;

  • mais « dans notre siècle, un livre n’est jamais un produit définitif » [p. 8] ;

  • et en tout cas, étant donné que « la sémiotique est une discipline jeune » qui « se développe jour après jour », l’objectif final du texte qui commence est enfin précisé : « un traité n’est pas une charte constitutionnelle. Il fait simplement le point » [p. 8].

  • C’est pourquoi il doit être lu, par rapport aux autres textes de l’auteur (déclaré « inconstant »), comme « une étude rigoureuse » [p. 8] qui « reprend des thèmes déjà connus mais cherche à les formuler selon des lignes architecturales plus précises » [p. 8].

Nous revenons ainsi, en le clarifiant, au thème de la dispositio posé dans l’exergue de Pascal. Mais il ne s’agit pas seulement de l’enchaînement des thèmes et des arguments sur la surface textuelle, mais aussi de la profondeur discursive et narrative. Comme dans toutes les Préfaces, et en général dans les textes des sciences humaines, ici aussi ces trois discours différents que Greimas (1983), analysant Dumézil, avait bien identifiés, sont en fait narrativement entrelacés un discours cognitif ((i) les activités cognitives du sujet énonciateur, qui utilise des prédicats comme |étudier|, |examiner|, |préciser|) ; (ii) un discours objectif (hypothétique par rapport au premier, obtenu par annulation des marques d’énonciation, qui utilise des concepts abstraits en position de sujet phrastique, des formules comme |il est évident| ou le présent atemporel) ; (iii) un discours référentiel (ce dont parle la connaissance scientifique, en construisant son propre référent interne, comme les discours antérieurs dont il est question). Dans cette préface, le discours cognitif apparaît dans des formules telles que « je dois résumer », « j’ai décidé de reconnaître » ; le discours objectif concerne des thèmes tels que la théorie des codes, la typologie des modes de production des signes, l’iconisme, etc. ; le discours référentiel concerne les auto-références constantes aux livres précédents de l’auteur.

En entremêlant soigneusement ces trois discours, notre texte atteint un double objectif : d’une part, en présentant le livre qui va commencer, l’énonciateur positionne – au sens du marketing – son propre discours par rapport à ses livres précédents, marquant une distance et constituant une hiérarchie précise à l’intérieur de ceux-ci ; d’autre part, l’énonciateur se positionne comme un Sujet qui, arrivé à la fin de son travail, doit être jugé par un Destinateur transcendant, lexicalisé comme « les lecteurs qui ont déjà lu les livres précédents ». En somme, le Traité s’ouvre sur une sanction annoncée, et sa Préface, en cela, prépare adéquatement le terrain : « désormais, lit-on, je n’accepterai de discussions sur les limites et les possibilités de la sémiotique que sur la base de ces pages ». Le jugement des lecteurs-destinataires ne porte donc pas sur le livre lui-même, mais, beaucoup plus généralement, sur la sémiotique. Comme pour dire que le livre et la sémiotique s’identifient : si le Traité n’est pas le Livre des livres d’Eco, étant un traité, il est néanmoins le Livre des livres de la sémiotique. La sémiotique en tant que discipline est ainsi constituée – textuellement et institutionnellement.

4. Système et récit

La question de la mise en œuvre effective, dans le Traité, de la forme du traité reste alors à poser. C’est d’ailleurs, comme on le verra, le thème de la dénégation pseudo-ontologique posée dans le titre de cet article. Le Traité est-il un traité ? sa structure textuelle répond-elle aux formes canoniques de ce genre discursif ? et à quoi correspond l’assomption méta-discursive progressive – avec ses conséquences pragmatiques – de la forme traité mise en place dans la Préface ?

Note de bas de page 7 :

Ce n’est pas toujours le cas. En effet, on trouve des titres, disons, obliques comme « Célibataires » (2.10.1) dont seul un lecteur déjà expert en sémantique peut comprendre qu’il renvoie à une problématique sémiotique, alors qu’un lecteur novice y verra une sorte de « saut créatif ». Mais là encore, l’index aide, car il tend à construire une isotopie sémantique claire en son sein : la sous-section 3.3.7 s’intitule en effet « L’actuel roi de France est-il célibataire ? ». L’absence d’union matrimoniale semble ainsi devenir un thème à dominante sémiotique...

Si l’on s’en tient à la surface du texte, la réponse est incontestablement positive. Le livre est rigoureusement divisé en sections – une introduction et quatre parties – subdivisées à leur tour en chapitres, paragraphes, sous-paragraphes et sous-sous-paragraphes, chacun d’entre eux étant clairement marqué (un peu à la manière du Tractatus de Wittgenstein) par un numéro de référence précis indiquant le niveau hiérarchique de l’argumentation et sa place par rapport à la structure d’ensemble, ainsi que par un titre à forte valeur référentielle7. L’impression qui s’en dégage est celle d’un discours bien compact et parfaitement systématique, où chaque question traitée non seulement est toujours en contact avec l’argumentation centrale, mais y trouve également une place rationnelle précise. Ainsi, par exemple, la différence entre signification et communication n’est pas seulement une question fondamentale et décisive pour la théorie sémiotique, mais aussi une question préparatoire pour toutes les autres : elle est discutée, en fait, toute seule, dans la partie indiquée par le numéro 1 qui s’intitule, précisément, « Signification et communication ». Un coup d’œil à la table des matières suffit pour s’en rendre compte immédiatement.

Avec un raisonnement analogue et un résultat opposé, la différence entre grammaires et textes ne semble pas avoir un poids semblable : pour la trouver, il faut repérer une sous-section indiquée comme 2.14.6 (proprement intitulée « Grammaires et textes »), donc à l’intérieur du paragraphe sur « Hypercodage et hypocodage » (2.14), lui-même faisant partie de la « Théorie des codes » (2). L’effet structurant dans lequel tout se tient permet ainsi de saisir dès le premier coup d’œil des options théoriques d’une certaine importance : la différence entre Sinn et Bedeutung (2.5.2) est sous-déterminée par rapport à celle entre contenu et référent (2.5), qui relève d’une « Théorie des codes » (2), tandis que le problème de la référence, catalogué comme 3.3, est une question interne à une « Théorie de la production des signes » (3). Séparation qui, précisément, indique une option théorique d’une importance évidente ; comme pour dire : ne confondons pas le thème du sens avec celui de la référence.

Si, par contre, nous voulions chercher le point où Eco expose son idée de « guérilla sémiotique », l’index ne nous serait d’aucun secours ; et nous pourrions soupçonner qu’il ne fait pas partie du Traité, donc de la sémiotique générale. Avec une certaine obstination philologique, nous la trouvons plutôt dans la note 30 de la page 199, dans le sous-paragraphe 2.15 intitulé « L’interaction des codes et le message comme forme ouverte », qui, bien qu’il discute un thème très cher à Eco comme celui de l’œuvre ouverte et de l’utilisation créative possible des textes, se trouve à la fin, à l’avant-dernière page de toute la section sur la « Théorie des codes » (2). Selon un critère structurel rigide, l’effet de système veut en effet qu’un argument placé presque à la fin, et en note de bas de page, soit moins important qu’un argument placé vers le début. Ainsi, par exemple, en voyant le problème du « Sujet de la sémiotique » comme titre de la dernière section du livre (section 4), en outre particulièrement mince (cinq pages), nous n’avons aucune difficulté à nous rendre compte que, pour Eco, ce problème est très peu pertinent dans une théorie sémiotique générale ; tout comme, d’ailleurs, celui, traité en passant seulement dans cette petite section, de l’énonciation et des figures discursives qu’elle engendre.

Note de bas de page 8 :

Eco lui-même a raconté à plusieurs reprises que sa manière préférée de formuler ses arguments dans un texte écrit – depuis sa thèse de maîtrise – est le récit de la découverte progressive d’idées et de concepts, l’exposition pas à pas de notions qui prennent consistance et forme dans son travail de recherche.

Mais sommes-nous sûrs qu’il en soit réellement et toujours ainsi ? Si l’on approfondit un peu la structure argumentative du livre, on se rend compte que cet effet de système donné par la subdivision hiérarchique méticuleuse des thèmes, qui sont d’ailleurs très soigneusement numérotés, n’est pas le seul critère présent dans le texte. Mais seulement le critère explicite, de surface. La disposition rhétorique des thèmes (dont l’importance est signalée, comme on l’a dit, dès l’épigraphe de Pascal) semble en effet croiser, et en quelque sorte perturber, la disposition purement synchronique des questions discutées. À côté, et au-delà, de la hiérarchie des thèmes indiquée par la numérotation de l’index, un flux thématique d’un autre genre, presque opposé, semble traverser le livre : un flux que nous pourrions définir, avec l’appui de certaines déclarations fréquentes d’Eco lui-même8, comme narratif. En effet, dans de nombreux cas, il apparaît clairement que le texte ordonne les sujets de manière temporelle, devenant ainsi un récit de découvertes progressives, d’où les analyses approfondies, les relances, les réinterprétations et les changements d’idées continuels.

Derrière l’apparente organisation synchronique se cache en fait une narration diachronique, qui n’est pas un simple flux temporel mais bien un récit particulier qui suit la logique horatienne classique du post hoc ergo propter hoc. La narrativité dans le Traité n’est donc pas seulement au niveau de la structuration profonde du texte (comme Greimas l’avait montré avec son analyse de Dumézil, et comme nous l’avons également mentionné plus haut en discutant de la Préface du livre), mais c’est une hypothèse stylistique, sinon explicite, du moins très évidente, qui investit la forme du traité, en modifiant ses résultats sémantiques.

Ce n’est pas un hasard si l’un des termes les plus récurrents dans le livre – qui ne fait pas partie du métalangage sémiotique bien qu’il serve d’arrière-plan à la forme argumentative – est |reformulation|. De nombreux thèmes, plusieurs hypothèses théoriques et un certain nombre de croyances de base, après avoir été régulièrement illustrés, sont révisés, modifiés, reformulés au cours du texte. De sorte que la succession des thèmes ne suit pas tant la logique hiérarchique du système que la logique narrative de la transformation : ce qui vient après suit ce qui vient avant, non pas toujours et seulement sur la base de la numérotation spatiale des chapitres, paragraphes, etc. indiquée dans la table des matières (qui continue néanmoins d’exister, disons, comme un palimpseste nécessaire du genre discursif de la forme traitée), mais comme sa réinterprétation théorique, discursivisée au fil du temps.

Quelques exemples clés suffisent.

La section 1 « Sens et communication » s’ouvre sur l’exposé d’un « modèle élémentaire de communication » (1.1), représenté dans un diagramme non numéroté à la page 50 (où l’on voit une flèche qui part de la « source », en passant par l’« émetteur » et le « signal », etc.) C’est le schéma, disons classique, de la communication, auquel la théorie de l’information nous a habitués, « repris – comme nous le lisons dans la note 1 de la page 50 – par De Mauro 1966 (maintenant dans De Mauro 1971) ». Le voici :

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Dans les pages suivantes, ce schéma est densément et intensément discuté, en faisant quelques distinctions théoriques qui vont au-delà du modèle (dans le sens où elles n’y sont pas présentes), comme surtout celle entre « code » et « s-code » (1.2, 1.3) ainsi que la distinction fondamentale entre « information », « communication » et « signification » (1.4). Après quoi s’ouvre la longue section 2 « Théories du codage », où sont exposés les principes fondamentaux de la discipline (de la « fonction signe » [2.1] à l’« interprète » [2.2], du « système sémantique »[2.8] à l’« hypocodage » et à l’« hypercodage » [2.14] etc.) et qui, traitant d’un concept clé du « modèle communicatif élémentaire » tel que le « code », se présente comme une gigantesque expansion de celui-ci. Vers la fin de la section, donc, et précisément dans la sous-section 2.15 déjà mentionnée et intitulée « L’interaction des codes et du message en tant que forme ouverte », nous lisons

Par conséquent, le modèle de communication normalement suggéré par les théories de la communication informationnelle devrait être reformulé comme dans la figure 29.

Et voici la figure en question (où, comme on peut le voir, après un certain nombre de déviations, la flèche revient presque à son point de départ) :

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Comme si cela ne suffisait pas, un autre modèle est proposé à la page suivante, qui concerne principalement la phase de décodage.

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Il est utile pour motiver la note de bas de page 30 sur la guérilla sémiotique mentionnée plus haut – suggérant qu’il ne s’agit en aucun cas d’une question marginale dans un édifice sémiotique général. La flèche de gauche à droite qui recomposait le cadre du schéma canonique de la communication, multipliée, va maintenant dans toutes les directions. Il s’ensuit que, très clairement, ce qui est à la fin n’est en rien moins important que ce qui est au début, selon une logique systémique, mais, selon une logique narrative, le fait d’être à la fin d’un parcours de transformation cognitive, est en effet d’une grande importance.

Il se passe quelque chose de très semblable, dans la section 2 sur les codes, en ce qui concerne le système sémantique (2.8) : le texte commence par exposer les oppositions internes du contenu (2.8.1), donc la segmentation des champs sémantiques (2.8.3) par des marques (2.9), mais peu à peu cette hypothèse théorique, initialement supposée pertinente, est annulée, et transcendée d’abord par le modèle de Katz et Fodor (2.10), puis par sa reformulation (2.11), jusqu’à arriver à la théorie de Quillian avec le soi-disant Modèle Q (2.13), dans lequel l’espace sémantique apparaît extrêmement dynamique, très peu structuré par les traits compositionnels. Eco, en somme, retrace diverses théories non pas pour les assumer comme valides et opératoires à l’intérieur du Traité, mais pour les réfuter progressivement, en mettant en évidence leurs fortes lacunes conceptuelles. Ce faisant, il suit une forme d’argumentation qui s’apparente davantage à un essai philosophique qu’à un traité fondateur d’une discipline en plein essor, avide d’affirmation institutionnelle, comme l’était et l’est la sémiotique.

Il en va de même pour l’un des points les plus novateurs de l’ouvrage, où la typologie traditionnelle des signes (3.4) est fortement reformulée sous la forme d’une typologie des modes de production des signes (3.6). Sous la forme constitutionnellement apodictique du traité, émerge un fort désir de problématique, un ton philosophique euphorique, tout sauf enclin aux poses fondatrices qui devraient être typiques d’un traité.

Si, en somme, d’un point de vue stratégique, le Traité est, et se pose, comme un traité, d’un point de vue plus interne concernant sa syntaxe argumentative effective, il semble l’être bien peu. La question ontologique du titre trouve ainsi sa valorisation sémiotique appropriée.

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