Transition médiatique sur les corps et pratiques homosexuels : de la censure à la présence obligatoire Media transition on homosexual bodies and practices: from censorship to compulsory presence
Sued Lima
Universidade de São Paulo (USP), Brésil
Taís de Oliveira
Universidade de São Paulo (USP), Brésil
Au Brésil, pendant le XXe siècle, les corps et les pratiques homosexuels étaient constamment réprimés et censurés ; la prédominance d’une morale conservatrice a contribué à la promotion d’actions discriminatoires de la part de la société civile et de l’État. Aujourd’hui, l’émergence des discours qui promeuvent la reconnaissance des LGBTQIAP+ cherche à répondre aux demandes sociales et médiatiques. Les demandes sociales se réfèrent à l’inclusion de cette minorité qui se constitue comme une « identité concessive » (Oliveira 2021) par rapport à des constructions identitaires hétérocisnormatives. Les demandes médiatiques correspondent aux intérêts marchands qui s’adaptent aux exigences sociales et donnent lieu à l’insertion de personnages LGBTQIAP+ dans diverses sphères de communication. Afin d’aborder ces transitions socioculturelles et médiatiques, nous mobilisons des concepts de la sémiotique pour comparer la répression des homosexuels qui a été mise en évidence dans les articles d’opinion du journal Lampião da Esquina (1978-1981) avec la présence de nombreux corps LGBTQIAP+ dans les productions médiatiques contemporaines.
In Brazil, during the 20th century, homosexual bodies and practices were constantly repressed and censored. The prevalence of conservative morals contributed to the promotion of discriminatory actions by part of civil society and the State. Nowadays, with the evidence of social movements and the growing concern with identity agendas, the emergence of discourses that promote LGBTQIAP+ recognition seeks to meet social and media demands. The social demands refer to the inclusion of this minority group that is constituted as a "concessive identity" (OLIVEIRA 2021) in relation to heteronormative identity constructions. The media demands correspond to market and media interests that adapt to social demands and lead to the insertion of LGBTQIAP+ characters in various spheres of communication. To address these socio-cultural and media transitions, we mobilize concepts from discourse semiotics to contrast homosexual repression evidenced in opinion articles from the newspaper Lampião da Esquina (1978-1981) with the numerous presence of LGBTQIAP+ in contemporary media productions.
Index
Articles des auteurs de l'article parus dans les Actes Sémiotiques : Sued Lima et Taís de Oliveira.
Mots-clés : adéquation axiologique, communauté LGBTQIAP+, identités concessives, Lampião da Esquina, transitions médiatiques
Keywords : axiological adequacy, concessive identities, Lampião da Esquina, LGBTQIAP+ community, mediatic transitions
Introduction
Dans la société brésilienne du XXe siècle, en particulier à l’époque de la dictature militaire, les corps et les pratiques homosexuels étaient non seulement réprimés dans les rues, mais aussi censurés par les journaux, la télévision et d’autres médias. Bien que l’organisation et le renforcement des mouvements sociaux brésiliens – comme les mouvements noir, féministe et homosexuel – aient eu lieu pendant cette période, l’intensification d’une morale conservatrice a contribué à l’adoption d’actions répressives de la part des acteurs de la société civile et de l’État militaire.
L’époque actuelle est en revanche marquée par une visibilité accrue des mouvements sociaux et par une attention croissante que la sphère politique et sociale porte à l’égard des « orientations » identitaires. Dans ce cadre, l’émergence de discours promouvant la reconnaissance des homosexuels vise principalement à répondre à deux exigences : l’une sociale et l’autre marchande. La première concerne l’inclusion sociale de cette minorité qui, historiquement, se constitue comme une « identité concessive » (Oliveira 2021) par rapport aux constructions identitaires hégémoniquement hétéronormatives, donc implicites. La seconde correspond aux intérêts marchands et, par conséquent, médiatiques, qui s’adaptent aux exigences sociales et s’inspirent des pratiques du soi-disant Pink Money jusqu’à l’insertion de personnages homosexuels dans diverses sphères de communication, tels que les réseaux sociaux, les services de streaming et les chaînes de télévision.
Afin d’aborder ces transformations sociales et culturelles dans une perspective discursive, nous cherchons à contrer la répression des homosexuels concrétisée dans des articles d’opinion du journal homosexuel Lampião da Esquina (1978-1981) – Lampe du Coin en français – avec l’insertion la plus évidente de personnalités LGBTQIAP+ dans les productions médiatiques – qui correspondent aux valeurs et aux exigences – contemporaines, telles que la téléréalité et les émissions de télévision en général. À cette fin, nous avons établi un dialogue entre les développements contemporains de la sémiotique discursive (Oliveira 2021, Lisboa Soares et Mancini 2021) et les études sur la presse gay (Péret 2012) et sur la dictature hétéro-militaire brésilienne (Quinalha 2018, 2021a, 2021b).
Ce travail est divisé en trois parties. Dans la première, nous retraçons un bref historique qui va de l’établissement de la dictature civilo-militaire et de l’émergence d’une presse gay alternative, dont le principal représentant à cette époque est le journal Lampião da Esquina (1978-1981). Dans la deuxième partie, nous sélectionnons ce journal comme objet d’analyse et examinons, dans l’horizon théorique et méthodologique de la sémiotique discursive, des éléments de l’organisation narrative et discursive de deux de ses articles d’opinion. Dans la troisième partie, nous parlons de la présence capitale des corps et des pratiques LGBTQIAP+ dans la presse contemporaine, en prenant comme base principale les programmes de la chaîne TV Globo.
1. Répression de l’État hétéro-militaire et émergence d’une presse gay au Brésil
Les années qui ont suivi le coup civil et militaire de 1964 ont été marquées par une intensification des discours en faveur de la morale, des bonnes mœurs et de la protection de la famille chrétienne. Les « marchas a favor de Deus pela liberdade » – « marche en faveur de Dieu pour la liberté » en français – qui ont eu lieu entre mars et juin 1964, ont mobilisé des civils et contribué, selon les termes de Quinalha (2018 : 23), à « une véritable croisade répressive contre des secteurs considérés comme indésirables et menaçants pour l’ordre moral et sexuel alors en vigueur », parmi lesquels les homosexuels.
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Terme inventé par Quinalha (2018, 2021a, 2021b) dans ses travaux sur le contrôle moral et sexuel du régime totalitaire brésilien dans les années 1960 et 1970.
Les sexualités non normatives étant devenues l’une des principales cibles de la dictature hétéro-militaire1, la répression contre les homosexuels s’est structurée en un ensemble d’actions qui allaient depuis la création des dossiers, la censure des matériaux qui faisaient « l’apologie de l’homosexualité » et la persécution des journalistes homosexuels jusqu’au développement d’un projet d’assainissement des ghettos dans les grands centres, lieux de socialisation des gays, des lesbiennes et des travestis.
Au-delà de cette structure de surveillance, une structure idéologique s’est formée sur la base de discours de deux ordres, l’un politique et l’autre strictement sexuel (Quinalha 2018 : 32-33). Alors que, dans le premier ordre discursif – le politique –, les homosexuels seraient l’une des stratégies utilisées par le mouvement communiste international pour corrompre l’État capitaliste brésilien ; dans le second – le sexuel –, ces sujets menaceraient les valeurs de la famille traditionnelle, qui devrait donc être protégée à tout prix.
En contrepartie de ces mécanismes de contrôle et de coercition sociales, dans les domaines des médias, surgit la imprensa nanica, surnom donné par les militaires aux périodiques qui ne faisaient pas partie des grands médias. Dans ce contexte, l’apparition de petites publications destinées spécifiquement à la population homosexuelle est devenue possible. Comme le souligne Flávia Péret (2012 : 11-12), au début du XXe siècle, la presse traditionnelle abordait l’homosexualité avec un biais sensationnel dans ses sujets, associant ce groupe social à la criminalité et à la perversion.
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Le nom de cette revue est peut-être un jeu de mots entre l’article masculin et le nom féminin et sa relation avec ce que l’on croyait être le caractère ambigu de l’homosexualité à l’époque.
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Toutes ces 38 éditions ont été entièrement numérisées par le Centre de documentation Prof. Luiz Mott (CEDOC) et sont disponibles en ligne sur le site du Grupo Dignidade : http://www.grupodignidade.org.br/projetos/lampiao-da-esquina/
Bien que d’autres petites publications destinées aux homosexuels soient apparues dans les années suivantes – telles que Snob (1963), Le Femme (1968)2 et Gente Gay (1976) –, ce n’est qu’à la fin des années 1970, une période d’ouverture politique et économique de la dictature civilo-militaire, que la presse gay aborde plus ouvertement des questions liées à la garantie des droits des homosexuels (Péret 2012 : 35). L’un des plus importants périodiques de cette période est le journal homosexuel Lampião da Esquina, édité à Rio de Janeiro et à São Paulo entre 1978 et 19813.
En 1977, Winston Leyland, rédacteur en chef du magazine américain Gay Sunshine, fait une visite au Brésil. Parmi ses engagements lors de cette visite, Leyland a été invité par l’avocat João Antônio Mascarenhas à une réunion avec des journalistes et des intellectuels homosexuels dans la maison de l’artiste Darcy Penteado. Au cours de cette réunion, une partie des participants, dont le journaliste Aguinaldo Silva et l’écrivain João Silvério Trevisan, exprime la volonté de former un conseil d’éditeurs visant à lancer la publication d’un journal homosexuel brésilien qui serait intégralement réalisé par des homosexuels et destiné aux homosexuels. C’est ainsi qu’apparaît le Lampião da Esquina, dont l’édition 0 – dite « expérimentale » – a été publiée plus tard, en avril 1978.
Pour des raisons évidentes, un journal ayant une telle portée et traitant de telles questions a attiré l’attention de l’État hétéro-militaire. Quinalha (2021a, 2021b) décrit qu’après avoir exprimé le veto du journal dans un avis émis par une technique de censure, l’équipe éditoriale de Lampião, à Rio de Janeiro et à São Paulo, a été appelée à témoigner de ses activités. Peu de temps après, la production de rapports et d’avis, basée sur les règles de la censure et d’une loi sur la presse, a conduit à l’ouverture de l’enquête 25/78 sous l’accusation que Lampião attentait à la morale et aux bonnes mœurs et promouvait l’homosexualité (Quinalha 2021a : 8).
Bien que les militaires se soient efforcés de censurer et d’éteindre la lumière du Lampião, sa fin a eu lieu pour d’autres raisons, notamment les crises financières et idéologiques. Depuis sa création, le journal a rencontré des difficultés à se financer, principalement en raison de la concurrence avec la presse traditionnelle, du faible nombre d’abonnés et du manque de publicité pour les homosexuels dans la période (Péret 2012 : 51-52).
Outre cette question financière, une autre a été décisive pour la fin de Lampião : la divergence d’idées entre Aguinaldo Silva et João Silvério Trevisan. Dans un entretien à Péret (2012 : 117), Aguinaldo affirme que, lors des réunions du programme, il y avait des discussions pour faire de Lampião un véhicule plus pamphlétaire que proprement journalistique, point de vue que le rédacteur en chef ne partageait pas parce qu’il croyait que ce tournant politique aurait fini par limiter le journal.
Trevisan, quant à lui, misait sur une ligne éditoriale plus politique, surtout en raison de son implication directe dans le militantisme dans le mouvement homosexuel organisé. Cette perspective est renforcée lorsque, également dans un entretien à Péret (2012 : 126), João Silvério affirme que « le journal devenait médiocre, avec des couvertures très flashy. Le chiffre politique a été le moins vendu et cela m’a extrêmement ennuyé ».
Ce désaccord sur les directions que prendrait le journal finit par créer une rupture entre les éditeurs de São Paulo, plus tournés vers le militantisme politique, et ceux de Rio de Janeiro, plus attachés au caractère journalistique. Associé à la crise financière et à d’autres facteurs, tels que l’émergence du HIV/SIDA et la consolidation d’une nouvelle vague conservatrice dans le pays, la divergence au sein du corps éditorial a conduit à la décision de fermeture du journal. C’est alors qu’en juillet 1981, Lampião da Esquina a pris fin.
Dans une période d’intense surveillance et de répression des sujets et des groupes homosexuels par l’État hétéro-militaire, l’émergence d’une presse gay dans la presse alternative révèle la nécessité pour cette minorité sociale de s’affirmer comme telle et de résister à l’intolérance d’une population conservatrice renforcée par des politiques étatiques. Des journaux comme Lampião da Esquina ont présenté une vision de la (homo)sexualité qui s’opposait à la stigmatisation des médias traditionnels, dans laquelle des faits impliquant des homosexuels et des travestis étaient constamment traités de façon moralisatrice et discriminatoire. En ce sens, bien que de telles publications subissent les effets de la conjoncture politico-sociale dans laquelle elles ont été créées, elles ont contribué à ce que des transitions sociales, médiatiques et commerciales aient lieu des années plus tard, comme nous le verrons plus loin.
2. Parcours thématiques et figuratifs dans la section « Opinião » de Lampião da Esquina
Norma Discini (2004 : 212) postule que, le journal étant une totalité discursive, il est possible de reconstruire son « tout de sens » sans nécessairement analyser chacun des textes qui le composent, car ce tout est également présent dans chacune de ses parties. Sur la base de ce constat, nous avons examiné la section « Opinião » de Lampião da Esquina, en particulier dans deux de ses articles d’opinion. Le premier intitulé « Saindo do gueto » et publié dans le numéro 0, avril 1978 ; le second intitulé « Nossas gaiolas comuns », publié dans le numéro 1, mai-juin 1978. Pour cela, nous utilisons des concepts de la sémiotique française, principalement dans la perspective formulée par Barros (2011a, 2016) pour l’analyse des discours intolérants.
Saindo do Gueto – quelque chose comme « Sortant du ghetto » en français –, est signé par O Conselho Editorial. En ce qui concerne sa mise en page (voir figure 1 ci-dessous), chacun de ses huit paragraphes est initié par une lettre de chapitre, et tous sont disposés en trois colonnes, qui occupent une demi-page. À gauche, les crédits de l’édition sont situés dans un cadre. Juste en dessous de l’article, se trouve un second tableau avec un bref texte de présentation du journal, accompagné d’une mini-biographie de ses onze éditeurs.
La description de l'organisation icono-textuel nous aide à comprendre que, bien qu’il s’agisse d’un journal des médias alternatifs de l’époque, il y avait un haut niveau de professionnalisme dans le processus éditorial. Cette caractérisation, à notre avis, implique la construction d’une image discursive d’un journal sérieux et engagé dans sa mission de débattre de l’homosexualité en ses propres termes, ce qui se maintient dans les autres éditions.
Figure 1: Fac-similé de Saindo do gueto, Grupo Dignidade.
Saindo do Gueto remplit principalement deux fonctions : i) mettre en évidence les raisons justifiant la création d’un journal homosexuel et, ii) expliciter les intérêts qui conduisent Lampião à se constituer comme un journal écrit pour les homosexuels, comme indiqué dans le passage suivant :
[...] il faut dire non au ghetto et en sortir. Ce qui nous intéresse, c’est de détruire l’image standard de l’homosexuel, selon laquelle c’est un être vivant dans l’ombre, qui préfère la nuit, qui considère sa préférence sexuelle comme une sorte de malédiction, qui a beaucoup de manières et qui se heurte toujours, dans toute tentative de se réaliser plus largement en tant qu’être humain, dans ce facteur capital : son sexe n’est pas celui qu’il souhaiterait avoir. (O Conselho Editorial 1978 : 2, nous traduisons et soulignons)
Dans ses travaux, Diana Luz Pessoa de Barros (2011a, 2016) propose un modèle théorique et méthodologique pour l’analyse des discours préjugés et intolérants à partir de l’examen de son organisation narrativo-discursive, des passions qu’ils manifestent et de leurs parcours thématiques et figuratifs. En ce qui concerne spécifiquement l’organisation narrative et discursive, l’auteur indique que des discours intolérants mettent en place des programmes de sanction à l’encontre de sujets qui rompent un contrat social précédemment proposé, tel qu’un contrat de blancheur, de pureté linguistique, d’hétérosexualité, etc. Lorsque, à la fin du schéma narratif, dans la phase de sanction – cognitive et pragmatique –, le destinataire juge le sujet comme non conforme à l’accord et le punit, par exemple, avec le déni de ses droits, le refus de postes, l’agression ou la mort.
En traitant des thèmes et des figures, Barros (2011a : 264-268) met en corrélation les oppositions sémantiques /égalité / versus /différence/ et /identité/ versus /altérité/ et explore quatre parcours thématiques et figuratifs généralement exprimés dans des discours racistes et homophobes. Le premier concerne la « déshumanisation de l’autre », dans lequel les traits physiques et comportementaux de l’autre sont comparés à ceux des animaux et des objets ; le second concerne l’« anormalité du différent », dans lequel l’autre est supposé être quelqu’un dont l’identité n’est pas naturelle. Le troisième parcours thématique et figuratif concerne le « caractère malsain de la différence », qu’il soit esthétique, cognitif ou mental. En d’autres termes, l’autre est perçu comme malade, laid, ignorant ou fou ; enfin, le quatrième parcours observé par Barros (2011a : 267) concerne le manque de moralité et d’éthique du destinataire. L’autre est donc considéré comme errant, pervers ou dans la promiscuité.
L’auteur note en outre que l’une des façons de combattre ces discours intolérants se fait par la création et la profusion de discours d’inclusion et d’acceptation sociale du différent (Barros 2016 : 9). De cette façon, il y a un renversement de logique : on efface la séparation entre le moi et l’autre et ainsi l’autre n’est plus perçu comme celui qui brise les contrats et les accords sociaux, mais comme quelqu’un qui contribue à l’établissement de nouvelles et positives relations sociales. De plus, en ce qui concerne la figurativisation et la thématisation, les parcours utilisés dans les discours d’acceptation sociale visent à promouvoir des valeurs contraires à celles des discours intolérants, notamment en valorisant euphoriquement l’humanité, la normalité, le naturel du différent.
En ce qui concerne les parcours thématiques et figuratifs de Saindo do Gueto, le sujet homosexuel est perçu socialement comme un animal aux habitudes nocturnes (« être vivant dans l’ombre, préférant la nuit »), comme quelqu’un dont l’identité n’est pas naturelle (« qui considère sa préférence sexuelle comme une sorte de malédiction », « son sexe n’est pas celui qu’il souhaiterait avoir ») et comme immoral (« qui a beaucoup de manières »). En outre, les figures « ghetto », également présentes dans le titre de l’éditorial, « ombres » et « nuit » ancrent le discours spatial et concrétisent temporellement le thème de la vie clandestine des homosexuels dans une société hétéronormative qui les rejette. Ainsi, en suggérant la sortie du « ghetto », lieu qui matérialise l’exclusion et la marginalisation de ce groupe, l’énonciateur renforce le refus du contrat social hétéronormatif des intolérants.
Sur le schéma narratif, on voit que le sujet ne s’est pas laissé manipuler par le destinataire, car, dans le contrat social proposé, les valeurs investies dans l’objet « hétérosexualité » ont été interprétées par le sujet comme fausses, car elles ne paraissaient pas et n’étaient pas les valeurs désirées (mariage, famille traditionnelle, enfants, etc.). Il est important de mentionner que le refus d’un contrat ne peut se produire que si le destinataire propose un nouveau système de valeurs, car ce n’est qu’ainsi que le sujet se libère de la manipulation (Barros 2011b : 33). Dans l’article “Saindo do Gueto”, ce processus est explicité lorsqu’un nouveau système axiologique est proposé, un système qui valorise euphoriquement l’homosexualité :
[...] Ce que LAMPIÃO revendique au nom de cette minorité [celle des homosexuels] n’est pas seulement de se supposer et d’être accepté – ce que nous voulons c’est racheter cette condition que toutes les sociétés construites sur des bases machistes leur ont niée : le fait que les homosexuels sont des êtres humains et que, par conséquent, ils ont tout à fait le droit de lutter pour leur pleine réalisation en tant que telle. [...] nous nous efforcerons de démoraliser ce concept que certains veulent nous imposer – que notre préférence sexuelle puisse interférer négativement dans notre action dans le monde dans lequel nous vivons [...] nous serons chaque mois dans tous les kiosques du pays, parlant de l’actualité et cherchant à clarifier l’expérience homosexuelle dans tous les domaines de la société et de la créativité humaine (O Conselho Editorial 1978 : 2, soulignement de l’auteur).
Ainsi, l’acteur de l’énoncé « Lampião » cherche à rendre le sujet « homosexuel » compétent non seulement pour pouvoir s’identifier comme tel, mais aussi pour savoir établir de nouvelles relations sociales qui favorisent la diversité sexuelle.
- Note de bas de page 4 :
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L’extrait est le suivant : « Une métallurgiste qui lutte pour ses droits salariaux dans le syndicat, mais accepte les contraintes dictées par la morale sexuelle dominante dans les relations avec son compagnon, ou un banquier qui s’engage dans le mouvement de libération des homosexuels, mais ignore la lutte pour les droits syndicaux, sont étrangers, l’un comme l’autre, à la lutte plus large » (Mariza 1978 : 2).
- Note de bas de page 5 :
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Poème initialement publié à Quaderna (2008 [1960]). Citation : « Elle semble qui vive / toujours d’une / cage enveloppée, / exempte, dans une cage / d’une cage / habillée / d’une cage, / coupée dans ta / mesure exacte / dans une matière / isolante : / cage-blouse / ou chemise » (Melo Neto apud Mariza 1978 : 2).
Notre deuxième objet d’analyse est l’article intitulé « Nossas gaiolas comuns » – « Nos cages communes » en français –, signé par Mariza, collaboratrice du journal. Juste en dessous de son titre, il y a un extrait qui est mis en évidence4. Les treize paragraphes qui le composent sont disposés en trois colonnes et occupent une grande partie de la page, mais seul le premier d’entre eux débute par une lettre de chapitre (voir figure 2 ci-dessous). En outre, l’article est divisé en deux sous-sections, appelées « Duas Questões » et « O ovo e a galinha » – en français, « Deux questions » et « L’œuf et la poule ». À gauche, il y a deux tableaux. Dans le premier, on trouve une citation du poème « Mulher vestida de gaiola » – « Femme habillée de cage », en français –, de João Cabral de Melo Neto5 ; dans le second, similaire au tableau présent dans l’édition précédente, figurent les crédits de cette édition. On remarque que, tout comme dans l’article précédent, on maintient l’organisation icono-textuelle, ce qui, comme nous avons déjà dit plus haut, renforce l’image discursive d’un journal sérieux et engagé avec ce qu’il a à dire.
Figure 2 : Fac-similé de Nossas gaiolas comuns, Grupo Dignidade.
Dans cet article d’opinion on développe la thèse selon laquelle il existe un lien étroit entre les luttes spécifiques des minorités sociales – féministes, homosexuelles, raciales et environnementales – et la vaste lutte pour l’égalité sociale. Ce constat sert de point de départ à une discussion sur les tâches des catégories sociales en général et du sexe en particulier. Ces tâches concernent la tentative d’occuper les espaces publics et de rendre visibles les expériences individuelles des sujets homosexuels. Cela est considéré comme difficile, tant parce que cette minorité sociale s’est habituée à ne pas participer activement à la construction de la connaissance de soi, que parce que ce n’est que dans la réalisation des pratiques sexuelles, de leur expérimentation concrète, que davantage de possibilités se présentent et que, finalement, toutes s’établissent égalitairement. C’est sur la base de cette idée qu’il s’avère possible de parvenir à une stabilisation qui conduira à un nouveau moment de lutte politique :
Ce n’est qu’après avoir lutté bec et ongles pour définir concrètement les formes spécifiques de notre existence – et leur relation entre elles – que nous pouvons penser à tenter d’assurer leur existence, parce que ce n’est qu’alors que nous serons sûrs que chacune de ces formes sera suffisamment renforcée pour empêcher leur domination par d’autres (Mariza 1978 : 2).
En ce qui concerne les parcours thématiques et figuratifs de cet énoncé, le thème de l’oppression spécifique subie par chacune des minorités sociales, manifestée par l’isotopie de la retenue des animaux (« cage »), est particulièrement frappant en relation étroite avec l’isotopie de la production de vêtements (« cage-blouse », « sur mesure », « produite en série ») explicités dans le texte :
Soit nous essayons tous ensemble d’ouvrir la porte de la cage, soit nous resterons à l’intérieur, chacun avec l’illusion particulière qu’il est dans une cage particulière. […] Une cage-blouse dont le but exact est de donner l’impression d’avoir été faite sur mesure, quand il suffit de regarder dehors […] pour réaliser que, comme tout dans ce monde que nous vivons, elle est produite en série (Ibid).
À partir de l’analyse de ce parcours thématique et figuratif, on remarque que l’article d’opinion établit une relation étroite, intertextuelle et interdiscursive, avec le passage du poème de João Cabral de Melo Neto avec lequel il partage la page. Dans le poème, deux parcours thématiques et figuratifs corrélés se développent. Le premier se manifeste par l’utilisation de la figure « cage » qui contraste les traits tactiles de cette « matière isolante », dure et froide qui emprisonne les animaux par rapport à la peau douce et chaude de la femme qui y serait contenue. Le deuxième parcours se manifeste par les figures « habiller », « coupée dans ta mesure exacte », « blouse » et « chemise », qui matérialisent l’aspect quotidien et culturel de la retenue. En fin de compte, la « cage-vêtement » du poème concrétise le thème du machisme auquel les femmes sont soumises dans la vie quotidienne.
Ainsi, l’examen des relations intertextuelles et interdiscursives révèle trois oppositions fondamentales, partagées par les énoncés : /nature/ versus /culture/, /liberté/ versus /oppression/ et /général/ versus /spécifique/. Par rapport aux premiers termes en opposition, on remarque qu’un trait partagé par les deux énoncés est la présence de figures qui concrétisent des objets de la culture (surtout « cage » et « vêtements »). Ces figures révèlent, métaphoriquement, que les femmes, dans le cas du poème, et les groupes sociaux, dans le cas de l’article, sont contenus dans des lieux qui les isolent et les séparent de leur condition naturelle : la liberté.
En ce qui concerne les deux autres oppositions sémantiques, cependant, quelque chose de différent se produit. Alors que sur le plan du contenu du poème, on rapporte le trait /oppression/ au /spécifique/, puisqu’il traite du machisme subi par les femmes seulement ; dans l’article Nossas gaiolas comuns, le trait /oppression/ se rapporte au trait /général/, puisque les oppressions systémiques frappent, en même temps, tous les secteurs sociaux. Cette conclusion est renforcée principalement dans l’extrait « soit nous essayons tous ensemble d’ouvrir la porte de la cage, soit nous resterons à l’intérieur, chacun avec l’illusion particulière qu’il est dans une cage particulière » (Mariza 1978 : 2), ce qui évoque la tentative du destinataire « Mariza » de rendre le sujet « secteurs sociaux » compétent pour savoir s’organiser politiquement et chercher non seulement ses droits en tant que minorité, mais aussi la fin de ce système général d’oppression capitaliste.
À partir de l’examen des configurations narratives et discursives et des parcours thématiques et figuratifs des articles d’opinion analysés, on comprend enfin que le journal Lampião da Esquina se construit comme un discours qui s’oppose aux discours hégémoniques hétéronormatifs et qui cherche à traiter l’homosexualité de manière euphorique, en la valorisant positivement. En outre, le journal, en particulier dans la section « Opinião » se pose comme un complément dont le but est de rendre les sujets homosexuels compétents tant pour la définition de leur identité et la promotion de nouvelles relations sociales, que pour l’engagement politique en faveur de la lutte pour la garantie de leurs droits et contre les oppressions systémiques subies par cette minorité et d’autres minorités sociales.
3. Transitions médiatiques : la présence capitale
De nos jours, la présence de la forme de vie LGBTQIAP+ dans les médias manifestée par des corps trans et homosexuels et des pratiques queer en géneral semble impérative pour répondre à des demandes diverses et variées. Les agendas identitaires ont le vent en poupe, mettant en lumière les mouvements sociaux, en particulier, les queers (ici entendu comme un terme générique, qui englobe l'ensemble de la communauté LGBTQIAP+). Les intérêts du marché et, par conséquent, ceux des médias, s'adaptent, à la recherche du Pink Money, c'est-à-dire du pouvoir d'achat de la communauté queer, cédant la place à des personnages LGBTQIAP+ dans de nombreuses sphères de communication. Deux exemples sont l'émission télévisée Big Brother Brasil 22, sur Globo – dans laquelle sept participants queer sont entrés, dont, pour la première fois, une travestie – et, plus récemment, le programme No Limite de 2022, sur la même chaîne, également avec sept concurrents de cette communauté.
Ce qui retiendra notre attention, c’est la différence dans la façon dont la participante travestie Linn da Quebrada (Lina) a été reçue par le public par rapport à la réception de la première femme trans qui a participé au programme, dans sa onzième édition. Ariadna Arantes (BBB11), à l’époque, a préféré ne pas révéler qu'elle était transsexuelle. L'ancienne BBB a déclaré qu'elle se sentait menacée. Ariadna a été la première personne à être éliminée de son édition, tandis que Lina s'est classée neuvième, éliminée par les fans de celui qui serait devenu le champion de l'édition. Lina était considérée comme une participante forte. Dans les sondages qui demandaient qui était le participant préféré du public, elle figurait parmi les premières positions.
Lors de sa participation au BBB, en 2011, Ariadna a fait face à une série d'attaques transphobes, parmi lesquelles la couverture du journal Meia Hora (voir figures 3 et 4 ci-dessous).
- Note de bas de page 6 :
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Sous « Ariadna's Coiffeur », le journal présente deux phrases ambiguës, qui font référence aux organes génitaux masculins et aux rapports sexuels anaux.
Figure 3 : Couverture du journal Meia Hora, reproduction Twitter6.
- Note de bas de page 7 :
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Ex-BBB Ariadna se souvient de la couverture de journal transphobe : « J'ai passé la journée à pleurer ».
Figure 4 : Titre du Correio Braziliense, source : https://www.correiobraziliense.com.br/diversao-e-arte/2022/01/4979341-ex-bbb-ariadna-relembra-capa-de-jornal-transfobica-passei-o-dia-chorando.html. Consulté le 04 avr. 20227.
- Note de bas de page 8 :
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Version brésilienne de l’émission de télé-réalité Survivor.
En 2021, Ariadna a participé à l'édition spéciale de l'émission No Limite8 – dont tous les participants étaient des ex-BBBs –, qui a marqué le retour de cette compétition sur les écrans de la chaîne Rede Globo. Avec ce retour, elle a été à nouveau mise sous le feu des projecteurs et a annoncé sa candidature au poste de députée aux élections de 2022.
Lina, d'autre part, était déjà un visage bien connu du public de Rede Globo. Elle avait incarné le personnage de Natasha dans la série Segunda Chamada (2019) (voir figure 5 ci-dessous).
Figure 5 : Linn da Quebrada joue Natasha, Reproduction TV Globo.
On voit, à travers ces deux exemples, que des corps trans font sentir leur présence sur l'écran de la plus grande chaîne de télévision du pays, ce qui délimite un espace axiologique déterminé. Nous reviendrons sur cette question plus tard.
- Note de bas de page 9 :
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Gloria Groove a même été la gagnante du concours Show dos Famosos 2021 promu par Domingão do Huck sur Rede Globo.
Il y a aussi, de nos jours, une forte présence d'artistes drag queen dans les programmes d'auditorium de la même chaîne. Gloria Groove9 et Pabllo Vittar sont les principaux exemples d'artistes drag qui circulent dans les médias grand public (voir les figures 6 et 7 ci-dessous).
Figure 6 : Gloria Groove dans Show dos Famosos 2021, reproduction TV Globo.
Figure 7 : Pabllo Vittar dans le programme Altas Horas, reproduction TV Globo.
Mais TV Globo n'est pas la seule plateforme où de tels artistes sont présents ; les deux étaient des attractions du dernier Lollapalooza Brésil (São Paulo, entre le 25 et le 27 mars 2022). Lors de leurs concerts au festival, toutes les deux ont exprimé leur préférence politique pour les élections présidentielles de 2022 (voir figures 8 et 9 ci-dessous).
Figure 8 : Pabllo Vittar au Lollapalooza Brésil 2022, reproduction Instagram.
Figure 9 : Gloria Groove au Lollapalooza Brésil 2022, reproduction Instagram.
Dans sa recherche, Oliveira (2021) analyse de manière comparative les romans anglais classiques des XIXe et XXe siècles et leurs adaptations cinématographiques contemporaines. La chercheuse présente la notion d'« adéquation axiologique ». Cette notion consiste en l’idée selon laquelle, pour que le nouveau texte soit pertinent aux nouvelles demandes sociales et à un nouveau profil d’énonciataire, l’axiologie – c’est-à-dire l’ensemble des valeurs – véhiculée par l’œuvre doit être adaptée.
En apportant cette proposition à notre analyse, on peut considérer que la présence de personnages LGBTQIAP+ dans les principales émissions télévisées de la plus grande chaîne de télévision ouverte du pays est une adéquation aux valeurs désormais un peu plus centrales dans la sémiosphère (Lotman 1999) de la société brésilienne, autrefois complètement marginales. L’idée de Pink Money explore cette question ; du fait des changements sociaux, la périphérie gagne en pouvoir d’achat, en accès à l’universalité et, par conséquent, aux médias grand public.
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Une notion qui est développée par Taís de Oliveira dans sa thèse de doctorat à paraître, basée sur la lecture tensive des modalités véridictoires, proposée par Lisboa Soares et Mancini (2021).
Une autre notion proposée par Oliveira (2021) qui nous intéresse ici est celle des « identités concessives »10, qu'on peut comprendre de deux manières : leur concessivité peut reposer sur le fait qu'elles ne confirment pas, dans leurs parcours, les modalisations et les objets de valeur hégémoniquement partagés et euphorisés, c'est-à-dire jugés souhaitables ; ou encore, sur le fait qu'elles ne sont pas ce qu'elles semblent être – si, par exemple, une partie de leur identité est au niveau du secret et/ou une autre au niveau du mensonge (voir figure 10, ci-dessous).
Figure 10 : Carré sémiotique de la véridiction (Greimas & Courtés 1979 : 419).
Les identités concessives – celles attribuées au secret ou au mensonge – s'opposeraient donc aux identités implicatives – celles attribuées à la vérité ou à la fausseté. Cela s’explique parce que la vérité et la fausseté sont des modalités véridictoires implicatives, c'est-à-dire que ce qu’elles sont intérieurement (immanence) confirment leurs apparences (manifestation) ; en revanche, le mensonge et le secret sont des modalités concessives, puisque là l’être diffère du paraître (Lisboa Soares ; Mancini 2021).
Les identités concessives peuvent encore s'opposer aux identités implicatives car ces dernières confirment, dans leurs parcours, les modalisations et les objets de valeur socialement partagés et euphorisés, contrairement aux premières.
Dans l'analyse diachronique que nous apportons ici, nous avons constaté que les identités que nous appelions alors homosexuelles et, plus récemment, LGBTQIAP+, se sont déplacées d'un endroit plus périphérique de la sémiosphère – donc, plus concessif, puisqu'ils ne partageaient pas les valeurs hégémoniques – vers un emplacement un peu plus central – moins concessif. Évidemment, elles n'occupent pas encore le cœur de la société occidentale actuelle, mais elles semblent être en train de se répandre en cours de route. Historiquement dysphoriques, elles deviennent euphoriques dans une certaine mesure, dans certains spectres médiatiques et dans certains groupes sociaux.
Considérations finales
Dans cet article, nous avons démontré que le média traditionnel brésilien de la fin des années 1970 liait la présence des formes de vie LGBTQIAP+ à la criminalité et à la perversion. En revanche, dans les véhicules médiatiques alternatifs, parmi lesquels Lampião da Esquina, on a essayé de représenter ces identités concessives à partir de leur propre point de vue. Le processus socioculturel et discursif initié dans cette période a abouti à la présence croissante de corps et de récits homosexuels, trans et queer dans les médias de masse.
Nous considérons comme une transition culturelle les changements politico-sociaux qui ont résulté dans un traitement médiatique opposé au long des deux moments historiques analysés, c’est-à-dire les années 1970 et les années 2020.
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Cf. des titres comme Heartstopper (2022), Why Are You Like This? (2021), Feel Good (2020), Everything Sucks (2018) et Please Like Me (2013).
Face aux transitions politico-sociales, médiatiques et marchandes qui impliquent des sujets de sexualité non-normative, analysées à la lumière de la sémiotique, il est clair que les changements en cours mentionnés ci-dessus sont de nature axiologique et sociale et qu’ils se manifestent dans les textes qui circulent dans les différents médias, de ceux considérés comme underground ou alternatifs, aux principaux médias contemporains, tels que Rede Globo et les séries Netflix11.
- Note de bas de page 12 :
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Par exemple, il est important de mentionner que, lors du premier mandat de Dilma Rousseff, en 2011, la notion de famille n'est plus comprise par le Code Civil comme une formation entre un homme et une femme, et que plus tard, en 2013, le Conseil National de la Justice (CNJ) a interdit aux bureaux d'état civil de refuser de marier des personnes du même sexe (source : https://www.jota.info/jotinhas/o-que-diz-a-lei-sobre-o-casamento-gay-no-brasil-e-em-outros-paises-do-mundo-17052022zs
On ne peut pas ignorer le fait que l'idéologie et la politique vont de pair12. Dans nos analyses, cette relation est rendue explicite lorsque, pendant la période dictatoriale, les journaux de la presse gay alternative s'opposent aux discours intolérants qui sous-tendent les actions répressives de l'État et, à l'époque contemporaine, les artistes LGBTQIAP+ se positionnent en faveur du principal candidat présidentiel de l'opposition (revoir les figures 6 et 7 ci-dessus).
Ainsi, cette transition axiologique présente dans le traitement des homosexuels et des travestis par les grands médias démontre que, de la censure et de la persécution pendant la dictature civilo-militaire à la présence indispensable de ces sujets sociaux à l'époque contemporaine, la nécessité d'inclure ces minorités sociales est déterminée, avant tout, par les droits acquis et par l'augmentation de leur pouvoir d'achat au cours des dernières décennies.