Quelques propos1 extrait d’un entretien entre Guy Ollivier, acteur, et Michel Poupin, accompagné de Monique Fillon

Entretien entre Guy Ollivier,
Michel Poupin
Monique Fillon

Le style oral a été conservé

Texte

Note de bas de page 2 :

MF : MF Fillon, née Gaignet et cousine germaine de MP. GO : Guy Ollivier. AO : Antoinette Ollivier, épouse de Guy Ollivier. MP : Michel Poupin. (…) passage inutile à la compréhension. (???) passage inaudible. [aide à la compréhension, comme les notes de bas de page]

Légende2

Ont joué en décembre 1956 dans Marie-Jeanne ou la femme du peuple : [de g. à d.] Guy Ollivier, Michel Girard, M. Jard, Jeanne Gaignet devant Michel Bonneau, Mimi Ferret (épouse Roussies), Jean Rémondeau, Anne-Gaignet (épouse Papin)

Ont joué en décembre 1956 dans Marie-Jeanne ou la femme du peuple : [de g. à d.] Guy Ollivier, Michel Girard, M. Jard, Jeanne Gaignet devant Michel Bonneau, Mimi Ferret (épouse Roussies), Jean Rémondeau, Anne-Gaignet (épouse Papin)

MP : Donc on pourrait commencer comme avec Michel Girard, d’ailleurs c’est le plus simple : on fait un historique de ta vie, si ça ne te dérange pas…

GO : D’accord, non pas du tout.

MP : … donc l’histoire, t’es né en quelle année, parce que ça il me le faut ?

AO : Attention il a des problèmes d’oreille.

GO : J’ai des problèmes auditifs.

MP : Donc, tu es né en quelle année ?

GO : 3 avril 1932

MP : Donc 1932, d’accord. Ensuite, tu es allé à l’école… ?

GO : Uniquement au Gué de Velluire.

MP : Uniquement au Gué de Velluire, à l’école primaire, où il n’y avait pas de maternelle ?

GO : Exactement.

MP : Tu es allé à l’école jusqu’à ?

GO : Je m’en souviens plus.

MP : 14 ans ?

GO : A peu près. Oui, d’accord, oui, 14 ans.

MP : Jusqu’au Certificat d’études ?

GO : J’ai pas le Certificat d’études.

MP : Oui, mais…

GO : 14 ans, je sais même pas, excuse, je sais même pas si je suis pas sorti un petit peu avant parce que maman avait besoin de nous pour la ferme

AO : C’est-à-dire qu’elle est restée veuve.

GO : Il me semble que je suis sorti un petit peu avant.

MP : Ta mère était veuve ?

AO : Avec 10 enfants.

GO : 10 enfants.

MP : Pas plus ?

AO : Si mais les autres étaient décédés.

MF : Ah, oui, y’en avait plusieurs des décédés ?

GO : Oui attends… combien ?...

MP : Combien elle a eu… ?

AO : 4 je crois.

GO : 3 ou 4.

MP : Elle a eu 14 enfants ?

AO : Ah bé oui, parce qu’il y en a eu deux, morts à la naissance, et puis les deux autres, après, je sais plus.

MP : Ah c’est tout ?

AO : Mais ça je pourrais le retrouver, parce que j’ai l’arbre généalogique.

MP : Oui, ben, c’est important parce qu’il y a beaucoup de familles nombreuses.

GO : Oui, je suis d’accord.

MP : Alors ça accentue encore l’intérêt…

GO : Oui, oui, oui.

MP : … quelque part, hein ? Donc tu as arrêté l’école un peu plus tôt parce que ta mère était veuve.

GO : Ben oui, puis y’avait du travail à la ferme, quoi.

MP : Voilà.

GO : Malgré que ça me plaisait pas du tout, mais enfin j’y suis allé quand même.

MP : Donc tu as travaillé à la ferme à partir de 13-14 ans ?

GO : Oui.

MP : D’accord. Et jusqu’à quand ?

GO : Pfff, alors là, dis-donc, attends…

MP : A peu près, à peu près…

GO : J’ai arrêté en mille neuf cent … soixante, attends, quand on s’est mariés nous, là.

AO : Oui.

GO : Attends, avant, avant…

AO : Non mais attends, excuse, un petit détail : c’est que vous avez fait un roulement. Celui qui partait au régiment, l’autre qui venait après remplaçait.

MP : Ah oui. Le régiment ?

GO : J’ai fait mon régiment, de toute façon, 18 mois de régiment. A Saumur, j’ai fait ça. A 20 ans, de toute façon.

MP : Voilà. Voilà, voilà. A Saumur ?

GO : A Saumur, oui.

MP : Dans quoi, par… euh… ?

GO : Eh, c’était le cadre noir qui était à Saumur, oui mais moi j’étais, je me suis pas occupé du cadre noir, j’étais comme mécanicien…

AO : Évidemment.

GO : … dans les motos et dans les voitures.

MP : Donc tu as eu une formation de mécanicien ?

GO : Pas du tout, non, c’est inné chez moi, c’est…

MP : Ah bon !

GO : Beaucoup, chez les Ollivier, c’est…

MP : Oui, non mais c’est intéressant. Donc, et après 1960, vous vous êtes mariés et puis…

Note de bas de page 3 :

Coopérative d'Utilisation de Matériel Agricole

Note de bas de page 4 :

De Monique Fillon, née Gaignet. Agriculteur, maire du Gué de Velluire de 1955 à 1971

Go : Je suis resté comme chauffeur à la CUMA3 du Gué de Velluire, que Louis Gaignet, ton oncle4, était président, oui.

GO : Je suis resté là, combien ? Deux ans. Deux ou trois ans, oui.

AO : Tu t’es mis à ton compte après.

GO : Puis après je me suis mis à mon compte.

MP : Mais ça, je m’en souviens, tu avais de gros engins, là, impressionnants.

GO : Tu t’en souviens, tu t’en souviens ?

MP : Ah oui ! Ah bien oui,

GO : Ben oui, forcément.

MP : Guy Ollivier, travaux publics, hein ! Moi, là, à ce moment-là, j’avais 12-13 ans quand même, je commençais à comprendre les choses.

Go : Ben oui.

MP : Et même un peu plus tard. Parce que tu as fait les travaux publics combien de temps ?

GO : Ah ben, attends, je suis arrêté, ça fait, j’ai arrêté, y’avais déjà, à 60 ans.

AO : Oui.

GO : C’est-à-dire que…

AO : Y a 24 ans.

GO : Y a 24 ans, oui, exactement. Attends…

AO : Ben si, tu as arrêté à 60 ans et tu vas en avoir 84.

GO : Oui, d’accord.

MP : Oui-oui-oui-oui.

AO : 85, Oh là là là là, si c’est possible.

MP : Bon, donc, alors, on peut parler du théâtre maintenant.

AO : Oui, ben oui-oui-oui.

MP : Alors, tu habitais où à l’époque ? Parce qu’il faut le dire, parce que nous parlons pour des gens qui vont tout ignorer et ils ne peuvent pas deviner certaines choses.

GO : Oui, je comprends.

MP : Tu travaillais où ? Euh tu logeais où, à 14 ans ?

Note de bas de page 5 :

Toutes les deux s’occupaient d’une ferme. L’une des deux, Louise, a longtemps recopié les rôles sur des cahiers d’école pour tous les acteurs d’une pièce. De plus, toujours bénévolement, elle fabriquait avec sa sœur Marie les pâtisseries vendues pendant l’entracte au bénéfice de la paroisse.

GO : Ben, on était en location chez les demoiselles Méchin5, tu te souviens,

AO : Ah oui,

GO : La maison qui était dans la grand rue. On était en location. On a été combien ?

AO : Deux ans.

GO : Ah plus que ça.

AO : Ben si, parce qu’Élisabeth, elle avait… C’est en 61 qu’elle est née et en 62 on était là.

GO : Ah oui d’accord, c’est vrai. Oui-oui-oui, d’accord.

MP : Alors, euh, donc…

GO : On a été trois ans là-bas, oui.

Note de bas de page 6 :

Hameaux à 4 et 2 km du centre du Gué.

MP : Donc tu n’as jamais habité au Petit Rocher, Gargouillasses6, tout ça ?

GO : Ah non-non-non. Sortant de là-bas, on a acheté ici, cette maison, là.

AO : Dès qu’on s’est marié.

MP : Donc tu as toujours été, adulte, dans le village ?

GO : Oui.

MP : Non, je pose la question parce que Michel Girard, pour venir aux répétitions, ben c’était compliqué.

GO : Ben oui, forcément, c’était pas évident.

Note de bas de page 7 :

Qui avait un petit commerce à l’entrée du village, à 20 mètres de la Vendée.

MP : Eh oui, mais c’est remarquable, quelque part. Il faut, je veux dire, quelqu’un peut pas le deviner, ça, tu comprends. Ses bottes, il les laisse chez Génie7 et que tous les deux ou trois jours, la nuit, euh, sur le halage, pas éclairé, pas de lampe électrique…

GO : Ah non, ben non.

MP : Eh ben voilà. Donc toi tu étais dans le village ?

GO : Oui, j’étais dans le village.

MP : Bien. Ca s’est un point important. Et donc tu as commencé le théâtre à quel âge ?

GO : Oh très jeune de toute façon.

MP : 14 ans ?

GO : J’aimais beaucoup-beaucoup-beaucoup ça, hein.

MP : Oui, mais pourquoi tu aimais ça ?

GO : Ah mais pour moi c’était, c’était …

MP : Oui mais, d’où c’est venu, ça, ce … ?

GO : Je sais pas, je sais pas, mais j’aimais le théâtre, j’étais à mon aise.

AO : Comme celui qui aime la mécanique.

GO : On faisait des réunions, j’étais pas à mon aise. Mais quand j’ai été sur la scène, j’ai été bien à mon aise, là.

GO : C’est peut-être pas beau de dire ça, mais les spectateurs, j’en faisais ce que je voulais.

AO : Parce qu’il y était …

GO : Oui, Je me disais : ils sont à moi.

AO : Voilà. C’est pour ça que ça venait tout seul chez …

MP : Oui, mais, je veux dire, avant de faire du théâtre, tu en avais vu ?

GO : Oui, ah oui, ah oui, de toute façon.

MP : Où ? Au Gué de Velluire ?

GO : Ah, au Gué de Velluire, puis on allait à Maillé,

AO : A Vix, à Vix …

GO : A Maillé, on allait à Poiré sur Velluire, on allait à Velluire…

AO : En vélo !

GO : Y’avait des théâtres partout, là.

MP : Oui, il y avait des théâtres partout, mais à 14 ans ?

AO : Ah non, après 14 ans, là.

GO : Ah non pas 14 ans.

AO : Un petit peu avant, avant notre mariage.

GO : Oui, un petit peu avant.

MP : Oui parce que Michel Girard a commencé à 14 ans, bon, ben, il a commencé à 14 ans. Toi non, tu as commencé un peu plus tard ?

GO : Un peu plus tard.

MP : Donc tu as été spectateur, de pas mal de pièces de théâtre, au Gué de Velluire, et ailleurs.

GO : Oui, oui, oui.

MP : Et est-ce que tu te souviens de la date de la première pièce de théâtre que tu as vue au Gué de Velluire ?

GO : Non, m’en souviens pas.

MP : Il n’y a pas moyen de savoir ? Non, parce que .... On se pose des questions : il y a une période de flou, d’abord, avant 1954, y a pas de bulletins ; donc on en est à la mémoire. Alors avec Michel Girard, on a un peu reconstitué, mais …

AO : Il y a toujours cette période.

MP : Alors, lui, il disait : le théâtre a été construit en 46, je crois, de mémoire,

MF : Oui, c’est ce qu’il disait, lui

MP : Et ça a dû commencer aussitôt, les pièces de théâtre, en 47.

GO : Oooh oui.

MP : Et en 47, tu avais quel âge en 47 ? 32 …

GO : En 42, j’avais 10 ans…

AO : 15 ans

GO : 16 ans

MP : Donc tu ne te souviens pas être allé au théâtre au Gué de Velluire, à 15-16 ans ?

GO : Pffff … Alors, là, J’y suis venu pourtant, j’en suis sûr, mais, oui, je suis venu au théâtre, mais pour te dire quelle pièce c’était …

MP : Nous on essaie de savoir. Moi non plus je ne me souviens pas.

MF : Y’a qu’en posant des questions.

MP : Ben, faut être plusieurs, de toute façon, et on en sait déjà beaucoup plus qu’il y a 15 jours, hein. C’est un puzzle à reconstituer.

GO : Oui, ben oui, ben oui.

MP : Donc tu es allé au théâtre au Gué de Velluire, et à, tu as dit, à Vix et …

GO : Et Maillé, on y allait à pied, oui, à Maillé.

MP : Y’a combien de kilomètres ?

AO : Vix, ça en fait 6-7. Oh, 12 …

MP : 12 kilomètres à pied, pour aller au théâtre ?

AO : Je ne sais pas, c’est pas facile, facile …

GO : on y allait, on y allait, on était combien ? 12-15 à partir.

MP : Dis-nous des noms de gens qui allaient là-bas.

GO : Ben oui : Cécile Ferret, Geneviève, André Ferret,

AO : Cette génération-là.

GO : André Ferret. Michel Girard, pas beaucoup, parce qu’il était plus éloigné, lui.

MP : Ah ben, il était du marais, lui. Et plus jeune.

GO : Oui. Et autrement, ben, toute cette génération-là …

AO : Les Garreau,

Note de bas de page 8 :

Née Garreau et femme d’André Ferret, le maréchal-ferrant du Gué (maire de 1977 à 2001)

Note de bas de page 9 :

Née Garreau, mariée à Jean Gaignet.

GO : Nénette Ferret8 venait aussi, de toute façon. Sa sœur, Jeanne9, c’est ça ? Oui, venait aussi.

MF : Théo, Théo aussi peut-être ?

AO : Oui

MF : Théophile Garreau 

GO : Ah oui, tiens, les Garreau, Théophile Garreau venait aussi. Théophile, Jean-Charles, tu as peut-être connu Jean-Charles [Garreau] ?

MP : Oui. Jean Gaignet ?

GO : Jean Gaignet ? Oui, Jean Gaignet, oui.

MP : Jean-Charles Garreau, oui, ça je m’en souviens très bien.

GO : Mais Jean Gaignet venait aussi. [Son frère] Louis, Lili Gaignet, enfin, mon beau-frère de toute façon, mais beaucoup moins.

AO : Oui, c’est ce que je disais. Louis a beaucoup moins fait de choses par rapport à ça. Avec la famille qu’il avait, il était peut-être pas …

MF : Oui, et il était souvent parti travailler à l’extérieur. Il rentrait que les week-ends.

MP : Alors ça je découvre, cette espèce d’échange. C’est-à-dire que les autres venaient chez nous ?

GO : Il fallait être courageux, c’était pour s’en aller à pied, là.

MF : Mais lui, c’est d’origine Garreau, hein les Ollivier.

GO : Oui-oui, d’accord.

Note de bas de page 10 :

Guy a encore des cousines, comme Thérèse Garreau.

MF : Il y a beaucoup de Garreau à Maillé. La souche c’est Garreau - c’est Maillé10.

AO : Alors, rien que ça, fait que …

GO : Ma mère habitait Maillé, de toute façon.

MF : Ben voilà, c’est ça.

MP : Ah, oui, donc, ça a dû faciliter …

MF : C’est la continuité, les échanges …

MP : Et vous alliez … deux fois par an ?

GO : Ah oui.

MP : Parce qu’il devait y avoir deux séances ?

GO : Deux fois par an.

AO : Parce qu’au Gué, y avait trois séances.

MP : Parfois.

MF : A une époque, oui, parce que j’ai vu ça quelque part.

MP : Oui, j’ai noté ça, aussi, à certaines années, avec l’abbé Puaud. C’était uniquement l’abbé Puaud, j’ai l’impression.

MP : Voilà, non mais c’est vrai, c’était souvent deux, mais ça pouvait être trois. Donc à Maillé, c’était du théâtre paroissial.

GO : Oui.

MP : Donc Maillé. Vix aussi ?

GO : Vix aussi.

MP : Paroissial. Et puis encore ?

GO : Velluire, le paroissial aussi emmenait les ( ? ? ?)

MP : Y’avait du théâtre paroissial ?

GO : Y’avait du théâtre là-bas, oui-oui.

AO : C’est pas très loin, Velluire. Y a combien ? 5-6 kilomètres, à côté de Maillé...

GO : Excuse-moi : parce que, pour les théâtres, y en a beaucoup qui me disaient : tiens Guy, faut que tu viennes absolument, faut que tu viennes absolument, parce qu’on disait que je jouais le comique bien. Bien, enfin, entendons-nous …

AO : C’est parce que c’était dans ton élément.

MP : Oui, tu étais un peu meneur du groupe.

GO : Oui. Alors, elle me dit ; Guy, tu peux apprendre quelque chose, viens, viens, il faut que tu viennes faire un tour. Alors j’y allais, moi, bien entendu. Je demandais pas mieux, d’ailleurs, au contraire.

MP : Mais pour aller voir ?

GO : Oui, oui, pour aller voir.

MP : Donc, y’avait déjà une petite culture de pièces de théâtre.

GO : Oui, d’accord oui.

MP : Tu n’as pas d’idée des titres des pièces de Maillé ou … ?

GO : Ah non.

MP : Mais ça, sur internet, on pourrait peut-être en trouver quelques uns.

GO : C’est possible que tu te retrouves.

MP : Vix, j’ai vu que Vix, c’était assez complet (…). Alors, vers quel âge tu as commencé, après ? C’est le fait d’aller voir des théâtres qui t’a donné envie ? Ou on t’a demandé ?

GO : Ah ben, beaucoup m’en parlaient. Enfin, je dis, c’est me vanter que de dire des choses comme ça, excuse,

MP : Non, non !

GO : C’est pourtant ... .

AO : Il aimait bien faire ça.

Go : Enfin j’aimais beaucoup, beaucoup, j’aimais beaucoup le théâtre.

AO : Lui il aimait, mais moi pas du tout.

MP : Oui mais ce que je voudrais savoir, c’est le déclic : quand est-ce que ça a, quand est-ce que tu as commencé, parce que tu étais spectateur, quand est-ce que tu es devenu acteur ?

GO : Ca mon pauvre vieux, je vais te dire, je sais pas …

MP : Et pourquoi ?

GO : Parce que ça me plai… j’étais beaucoup mieux à mon aise, moi …

MP : Oui, mais après, tu l’as vu. Mais avant de le faire, tu savais pas ?

GO : Ah mais je, non, mais ça me, ça me tentait quoi, y’a pas de problème. Ca me …

MP : Voilà. Alors, tu devais avoir, au Gué de Velluire, quelqu’un que tu connaissais, qui t’a dit de venir ou qui t’a expliqué ?

GO : Oui, euh, Jean Guérin, tu ne t’en souviens pas de Jean Guérin ?

MP : Oui, un petit peu, oui.

AO : Ah, le père à Lionel.

MP : Le père à Lionel, oui.

GO : Il jouait bien, Jean Guérin.

AO : Ah bien, lui, il jouait très-très bien.

MP : C’est Jean Guérin qui t’a un peu sollicité pour les rejoindre ?

GO : Ben non, mais on parlait beaucoup, et puis, et puis, Jean Guérin me dit, tiens ben y a telle lettre, telle phrase, faut que tu fasses attention, faut pas, faut pas que tu la dises comme ça, hein. Puis moi, réciproquement, je lui disais, tiens bé l’autre jour, y a des, j’ai connu des spectateurs qui t’ont dit que t’avais, sur telle phrase ou tel geste, fallait pas que tu le fasses. Ah, il me dit, bon bon, ben, c’est bien, c’est bien. Oui, on se voyait beaucoup pour se dire ce qu’on pensait vis-à-vis des spectateurs, quoi.

MP : Oui, et est-ce, donc … mais y avait un curé là quelque part ?

GO : Ah je me souviens plus du curé.

MP : Ah bon ? c’est pas lui qui …

GO : Y avait le curé Puaud, mais on n’était pas copains, alors …

AO : Oui, mais c’était après, ça.

MP : Puaud, c’est 56 – 66. Donc avant, y a eu Raballand

GO : Euh, oui.

MP : Et avant, y a eu … ?

MF : Gadé.

GO : Ah oui, Gadé, mais Gadé, pour le théâtre, il s’en occupait pas, de toute façon.

AO : Non.

MP : Ah bon ?

GO : Oh non, non.

MP : Mais alors qui choisissait les pièces ?

GO : Il était, il était trop vieux. Mais c’était lui qui lisait les pièces, et puis …

AO : Oui, ça t’intéressait peut-être pas mais c’est lui qui les lisait.

GO : Oui, non, il lisait les pièces puis il disait : bon, ben vous allez jouer celle-là.

AO : Ça allait pas plus loin.

MP : Ah voilà. C’est lui qui …

GO : Autrefois, ben autrefois, c’était le curé qui décidait.

MP : D’accord. Ah oui, y avait pas à discuter.

GO : Ah non, non, y avait pas à discuter, de toute façon.

AO : Après, ça intéressait pas … (incompréhensible)

MP : Et donc, il y avait une espèce de metteur en scène, alors, y avait quelqu’un qui pilotait le groupe ?

GO : Ben, Monsieur … avant Dédé Ferret, qui c’est-y qui faisait ça ? Je m’en souviens plus.

MP : Parce que … Puaud, je sais, faisait ça ; Raballand …

GO : Puaud, Puaud … il a fait le metteur en scène de toute façon.

MP : Mais avant ?

GO : Avant ? je m’en souviens plus, moi.

MP : Raballand, il devait bien le faire un peu ?

GO : Raballand l’a fait aussi, de toute façon, oui.

MP : Et donc le problème, c’est Gadé : est-ce que, y’avait peut-être quelqu’un de la troupe, qui pilotait les choses ?

Note de bas de page 11 :

Agriculteur, père de MF, née Gaignet.

Note de bas de page 12 :

Pierre Poupin, agriculteur et maire du Gué de Velluire de 1971 à 1977

GO : C’est-à-dire que, à ce moment-là, dès le début, à ce moment-là, et ben, Jules Gaignet11 et ton père12, hein, on comptait beaucoup sur lui pour rayer des des des,

AO : Ah oui !

GO : …supprimer des-des phrases, qui à ce moment-là, on trouvait incorrectes, voilà … Alors Jules Gaignet …

MP : C’était Jules qui faisait ça ? C’était pas le curé ?

GO : Oh ben, le curé Gadé, non, de toute façon, non. Puis les autres, ils avaient énormément confiance en Jules Gaignet, Pierre Poupin,

MF : Ben, le conseil curial, comme disait Michel [Girard].

AO : Ah, voilà ! Je cherchais le nom.

MP : Alors, qu’est-ce que c’est que le conseil curial ?

MF : L’équipe rapprochée autour du prêtre.

MP : L’équipe, mais de la paroisse ?

MF : De la paroisse.

MP : Ah voilà. Mais, il s’occupait, il gérait le théâtre aussi ?

AO : Ben, il choisissait les pièces, il triait un peu, parce qu’à l’époque, fallait trier.

GO : Oui, oui, d’accord.

MP : Ca, c’est passé au conseil curial ?

MF : Oui. Mais c’est l’équipe …

AO : … rapprochée …

MF : … comme nous on appelle l’équipe pastorale maintenant.

MP : Voilà. Et ton père Jules Gaignet était dans le conseil curial ?

MF : … en faisait partie. C’est ce que Michel [Girard]…

MP : Et mon père aussi ?

MF : Oui.

GO : Ton père aussi, oui, oui

MF : C’est ce que disait Michel [Girard] hier.

GO : Je me souviens même les premières répétitions, les premières répétitions, c’est le, le souffleur qui lisait, qui lisait la pièce.

GO : Et puis, les premières fois qu’il lisait la pièce, ( ? ? ?) puis souvent, toi, ton père disait « top, top », là, faut arrêter. Là, alors, et tac, il mettait un crayon rouge, puis c’est ton père, ou ton …, le tien ou le tien…

AO : Oui, un des deux.

GO : … qui disait « bon, on va changer, on va changer ces, cette partie-là ».

MF : Voilà, OK.

GO : Pis, cette partie-là, bon, il rayait tout ce qui était dit pour … et puis il mettait aut’chose.

MF : Voilà. C’est bien ce que disait Michel Girard hier.

MP : D’accord.

AO : C’était le but.

GO : Et puis là le curé disait rien, hein.

MF : Oui, oui, il faisait confiance.

GO : Ah non, non, il disait absolument rien.

MP : D’accord. Mais mon père ne m’a jamais parlé de ça.

MF : Mais papa non plus, hein…

GO : Ah, ton père non plus ?

MF : Non.

MP : Ben, il parlait pas beaucoup, le mien, si je lui demandais pas, il allait pas me le dire.

MF : Ben chez nous c’était pareil, c’était l’époque.

MP : Et puis, moi, j’étais …, à cette époque-là, j’avais 4-5 ans.

MF : Ben oui, t’étais petit, ben oui.

GO : Ben oui, d’accord, je comprends.

MP : Je me souviens de voir mon père partir pour les répétitions, parce que, après à la traite et le repas, il se changeait , et puis, je suis pas sûr que ça l’enchantait tous les jours, je suis pas sûr, j’en sais rien. Mais je me souviens, que, le soir, il s’en allait, pour les répétitions. C’est tout. Je me rappelle très très peu l’avoir vu jouer. Je sais qu’une fois il a assassiné quelqu’un, puisque j’ai eu le poignard après.

Tous : (rires)

MP : Je sais même pas dans quelle pièce. Je sais pas, moi non plus, je m’en rappelle plus mais je vois…. Et puis, ce, il avait fait un poignard avec… il avait teint le bois avec… de…

MF ou AO : … machin à gaz, la gazinière .

MP : La gazinière, ce gris, voilà, sommaire, mais voilà pour la décoration. D’accord. Donc, le conseil curial, donc, des laïcs,

AO : oui, des laïcs.

MP : … pilotait en fait pas mal les choses au départ.

Note de bas de page 13 :

Petit commerçant, rue du Chéreau.

GO : Oui, Constant Fillon13 faisait partie du conseil curial.

MF : Et puis Ulysse Gaignet peut-être aussi.

GO : Oui, peut-être : oui, oui, Ulysse Gaignet aussi.

AO : Oui-oui, elle (Monique Renaudin ?) me l’avait dit.

MP : D’ailleurs, Ulysse n’était pas le souffleur, à l’époque ?

Note de bas de page 14 :

Après avoir été acteur. Son fils Ulysse, également agriculteur a joué pendant une quarantaine d’années (cf. la vingtaine de rôles manuscrits scannés). Son petit-fils Patrick joue encore.

GO : Si, Ulysse Gaignet a été souffleur14 [Lili Gaignet, son beau-frère, aussi par la suite].

MP : Tout le temps ?

GO : Oh, tout le temps, non.

Note de bas de page 15 :

Pierre Poupin

GO : Ton père15 était était souffleur de toute façon.

MP : Ah !

Note de bas de page 16 :

Jules Gaignet

GO : Ton père16 aussi.

MF : On en apprend des choses !

Note de bas de page 17 :

Fille de Constant Fillon, responsable des décors entre autres. Elle habite actuellement à Chateauneuf, en Vendée

AO : C’est ce que Monique Renaudin17 m’a dit hier soir aussi.

GO : Je m’en souviens, moi de ça. Tous les deux … C’est les deux qui intervenaient le plus pour, à la lecture de la pièce.

MP : Ah bon !

GO : Jules Gaignet,

MP : Pierre Poupin,

GO : Pierre Poupin, et puis André Ferret.

MP : André Ferret.

GO : Constant Fillon quelquefois, mais rarement.

AO : Ca fait beaucoup de choses.

MP : Oui, non-non, mais c’est … le fonctionnement est très intéressant.

GO : Oui d’accord.

MP : Moi, je me mets à la place des universitaires qui vont travailler là-dessus, parce que le texte, bon, le texte, les gars, ils vont comparer l’original et Les Misérables chez Victor Hugo, 2000 pages , comment ils ont fait pour le mettre en 100 pages. C’est intéressant. Mais après, il y a tout l’aspect sociologique : comment ça a pu exister ? Comment on fait pour trier des choses ? Voilà : c’est intéressant.

GO : Je m’excuse si je te coupe là.

MP : Du tout. Alors là, surtout …

GO : En parlant de Constant Fillon, Constant Fillon a fait beaucoup, beaucoup parce que, il faisait, c’est lui qui peignait les décors, c’est lui qui … Il a fait beaucoup, hein. Oh là là là …

AO : Et puis à sa façon.

MP : Il était tout seul à faire ça ou on l’aidait ?

GO : Oh … Tout seul généralement.

MP : Généralement tout seul ?

GO : Quand il avait besoin d’un coup de main, bon, les autres y allaient, quoi, mais au fond il faisait un peu tout seul.

MP : Mais qu’est-ce qu’il fait ? Il faisait les panneaux puis il les peignait ?

GO : Oui-oui-oui-oui, c’est lui qui faisait ça.

Note de bas de page 18 :

Cf. note plus loin.

MP : Ben, il en reste. On essaiera d’aller les photographier18.

GO : Il a fait beaucoup de décors, d’ailleurs.

MP : C’était le spécialiste.

GO : Oui.

MP : Et y avait un peu des genres « machinistes » aussi ?

GO : Oh oui, ben c’est lui qui dirigeait de toute façon, Constant Fillon, c’est lui qui dirig…, comme machiniste. C’est lui qui dirigeait ça.

MP : Alors, ça consistait en quoi, là, le machinisme dans ces pièces ( ? ? ?) ?

GO : Ben mettre les décors, euh, les décors fallait les lever, lui il les faisait, mais il fallait les placer, fallait… et puis quand, quand il fallait changer d’acte et ben, fallait enlever les décors et puis en remettre d’autres.

MP : Voilà. Donc il faisait…

GO : C’est lui qui s’occupait de ça de toute façon.

MP : Donc c’est lui qui gérait ça.

GO : Oui-oui-oui

AO : Alors, tu vois que t’apprends quelque chose même s’il y a peu de choses.

MF : Tout est bienvenu.

MP : Tout est… Y a rien à jeter, hein, au contraire. On va essayer d’en ramasser plus, un peu. Alors, maintenant…

GO : Et ce qui est bien, c’est que tu enregistres tout ça. Puis comme ça tu pourras …

MP : Après, je vais, je vais le transcrire. Il me faudra du temps, hein !

GO : Très intéressant (rires).

MP : Il faudra du temps. Donc, euh, tu as commencé, on va dire, vers 17-18 ans, probablement ?

GO : Oh oui.

MP : Et ça a duré jusqu’à quel âge ?

GO : Ah-ah-ah, ben les derniers, les dernières... ( ? ? ? ?) J’ai arrêté y a combien de temps ? Je m’en souviens plus…

AO : Ben quand les derniers théâtres ont arrêté, parce qu’après…

MP : Parce que… ça a arrêté en 1998.

GO : Oui alors, j’ai continué un petit peu à la mairie, quand… A la mairie ? A la… ? Oui, à la mairie, quand ils faisaient les, pour les troisième âge.

AO : Ah oui, au club, ah ben, oui, le club, c’est aut’chose.

MP : Ah oui !

GO : Pas longtemps.

AO : C’était pas vraiment faire du théâtre.

MP : C’étaient des scénettes.

MF : C’étaient des petites scénettes avec Michel Girard, enfin.

GO : C’est ça.

MF : Voilà, c’est ça, c’est ce qu’il disait hier.

MP : D’accord, donc…

MF : Là c’est autre chose.

MP : Est-ce qu’il y a des pièces qui t’ont plus marqué que d’autres ?

GO : Elles m’ont toutes marqué. J’étais tellement à mon aise, tellement content de jouer…

AO : (…) il avait horreur de la ferme. Alors ça, ça le défoulait.

GO : je me souviens que je lisais une fois, c’est une anecdote, un article sur Fernand Raynaud qui disait comme ça, quand t’es sur une pièce de théâtre, évite de regarder les spectateurs, parce que c’est très mauvais, vis-à-vis des spectateurs, c’est très, très mauvais. Ou alors, si tu regardes les spectateurs, c’est pour qu’on te regarde, c’est de l’orgueil, ça. T’es plus à ton rôle, à ce moment-là. (…) J’avais dit ça à Jean Guérin. Il m’a dit : tu fais ben de m’ le dire, tu fais ben de m’ le dire. C’est vrai un peu ce que tu dis, c’est vrai un peu, oui. On regarde les spectateurs pour que eux te regardent. T’es pus à ta pièce, là non, non, non. Je me souviens de ça. Avec Jean Guérin, on en parlait beaucoup, de toute façon.

MP : Donc c’était de la formation mutuelle, quoi ?… Tout le monde se conseillait mutuellement…

GO : C’est vrai, oui, oui, d’accord. C’est pourquoi, tous les deux, Jean Guérin, puis moi de toute façon aussi, puis peut-être d’autres, après parce que, bon… on se le disait quand même hein, mais y en a qui ne l’acceptaient pas (…) Ben j’ai dit, regarder où ? Jean Guérin m’a dit, ben attends, bouge pas, quand tu vas jouer, je vais regarder toi où tu regardes. Alors, il a regardé, il m’a dit non, c’est pas bien… on te voit de trop, c’est pas bien. Alors, j’avais lu, ça aussi j’ sais pas où j’avais lu ça, j’ m’en souviens pus, que fallait regarder le fond de la salle, comme acteur. En regardant le fond de la salle on aperçoit les spectateurs, mais fallait surtout pas regarder les spectateurs. Et puis il m’a dit, c’est vrai, m’a dit Jean Guérin. Parce que si tu regardes le fond de la salle, tu t’adresses aux spectateurs sans les regarder. Là c’est intéressant, là on t’écoute. Autrement on t’écoute pas. Si tu nous regardes, faut qu’y ait un retour, quoi… Je m’excuse de te dire tout ça !

MP : On vient là pour ça… Au contraire, c’est très intéressant tout ça. Donc, les pièces, toutes t’ont marqué, mais il y en a quand même qui t’ont marqué plus que d’autres ?

(Avec une liste sous les yeux [de Monique Renaudin,])

GO : Les mystères de Paris, je me souviens de ça (…) Tout se paie, ça aussi, Tout se paie. C’était bien… Tout se paie, ah nom d’un chien… Il devait jouer, Jean Guérin là, dans Tout se paie… Je l’ai vu pleurer, mais pleurer vraiment, hein. Ça faisait plaisir, parce que… il vit son rôle au moins là, hein… Ces des affaires qui me marquaient, ça, hein ! Y avait pas où j’aimais mieux voir un acteur qui vivait son rôle. Ah, ça c’était formidable de voir ça.

MP : Ça veut dire que tous ne le vivaient pas ?

GO : Ah non ! Non ! Il y en a qui faisaient le maximum, mais… c’est inné chez la personne. C’est un peu inné quand même, il me semble (…)

MP : Alors… Les mystères de Paris, ça c’était très bien…

GO : L’affaire du courrier de Lyon, ça m’avait marqué aussi, ça. Et Tout se paie, Tout se paie, nom de d’là ( ? ? ?) L’affaire du courrier de Lyon, ça aussi c’était intéressant. Comment j’ai tué mon enfant, je ne m’en souviens plus

(Digression sur le prix de la séance…).

MP : Comment vous étudiez une pièce ?

GO : Le conseil paroissial lisait la pièce, puis il jugeait si c’était possible…

MP : Mais après, une fois que c’était décidé. Qu’est-ce qui se passait ? Il y a quelqu’un qui vous la lisait ?

GO : (…) la première fois c’était les souffleurs qui lisaient tout. Tout le monde écoutait.

MP : Et après on vous donnait ce que vous aviez à faire ? Qui choisissait les rôles ?

GO : Oh, le conseil curial… je suppose. Avec André Ferret, à la fin, il intervenait beaucoup : ça, faut que ce soit untel qui le fasse, ça…

MP : Et avant, c’était plus flou ?

GO : Je sais pas. C’est-à-dire que moi j’ai toujours eu les rôles comiques. Si c’était pas comique, ça m’intéressait pas. Ou alors… oui…

MP : Donc c’était un peu spécialisés…

GO : Oui

MP : Et il y en avait d’autres qui étaient spécialisés ?

GO : Comique ? Non (…) André Ferret, c’était les pièces sérieuses (…) Jean Valjean…

MP : Dans Les Misérables

GO : C’est Les Misérables ? Oui, d’accord…

MP : Ça, c’était André Ferret.

GO : Oui, c’est André Ferret qui faisait Jean Valjean…

MF : Les rôles importants, oui c’était souvent André autant que je me souvienne.

(…)

Note de bas de page 19 :

L’instituteur de l’école catholique de garçons

AO : C’est des choses qui ont marqué comme ça leur vie, quand même, leurs loisirs (…) Moi, la seule pièce que j’ai jouée avec lui, c’était Louise de Bettignies, d’ailleurs, j’avais horreur de jouer. A ce moment là, c’est M. Jard19 qui jouait aussi. Il avait un fouet pour faire avancer chais pas trop quoi, mais il a pas mesuré son geste. Elle (Monique Renaudin) était marquée, elle m’a dit : les larmes me coulaient (…) les gens ont dû se dire, ça devait être sérieux. Elle en a eu les marques longtemps, hein. Elle m’en a encore parlé hier. Je luis ai dit : j’ m’en souviens.

GO : M. Jard était nerveux (…) Une anecdote, tiens, pour un théâtre. Eh bien, il jouait un petit peu, lui, il savait pas son rôle. Il connaissait pas du tout son rôle. Il s’est mis en colère, oh là là. Il a balancé le bouquin et il est reparti. Ouais, ouais, tout le monde est resté paf (…).

MP : Il y avait d’autres acteurs qui avaient un rôle prédéterminé ?

GO : Monique Renaudin (…)

MP : Qu’est-ce qu’il y avait comme autres distractions à l’époque ?

MF : A part les théâtre, il y avait pas autre chose.

MP : J’ai vu dans les bulletins, concours de belotte, mais après ?

GO : Avant les théâtres, je me souviens que ton père [Pierre Poupin], ton père aussi [Jules Gaignet], avec Constant Fillon, Joseph Roussies [sacristain], Ulysse Gaignet bien entendu, Jean Guérin, bref… Ils nous disent comme ça : faut monter une société de musique (…) Puis, tout d’un coup, c’est ton père [Pierre Poupin] qui dit :

- Dis-donc Guy, tu joues du buble ( ?).

- Ah oui, c’est vrai.

- Eh ben, tu vas rentrer dans la musique

- Bon ben, j’ veux bien.

Eh puis, ils ont dit à Jean Guérin : toi, tu connais un peu la musique (…) tu feras le chef de la musique, et puis c’est bon !

GO : Et puis, c’est resté comme ça. On n’a pas eu d’autres réunions après (…).

MP : Quel a été l’impact, finalement, du théâtre sur l’activité locale ? Est-ce que ça a changé les individus, les relations… ?

GO : Peut-être un petit peu au point de départ, ouais. Parce qu’on se retrouvait tous pour les répétitions, comprends-tu, ça créait quand même un lien, y pas de problème.

MP : Mais c’est un lien qui a duré ?

GO : Oui, oui quand même oui.

MP : Je prends l’exemple d’Ulysse Gaignet, père, souffleur. Le fils [Ulysse] qui a joué pendant 40 ans, le petit fils du souffleur, [Patrick] qui joue encore… Est-ce qu’il y a d’autres exemples… « d’héritage » ?

MF : Par contre, là, je ne pense pas, parce qu’ils sont tous partis. C’est un cas un petit peu exceptionnel. (…) Faut être présent dans le coin.

MP : Ces rôles, matériellement parlant, comment est-ce que vous appreniez ces rôles ?

GO : C’était inné chez moi.

MP : Oui, mais il fallait bien un texte ?

GO : Je lisais le texte…

MP : Qui était fourni par qui ? C’était le livret ?

MF : Les rôles étaient écrits pour chacun (…) par Melle Méchin.

GO : Je me souviens qu’elle me disait… Melle Méchin m’a dit : dis-donc, Guy, t’en as une tartine, t’as plus de 40 pages, hein ! (…). Quand y avait pas de rôle de comique, on me donnait un petit rôle à part, hein. Généralement, il y avait un rôle de comique de toute façon.

MP : Et donc, sur ce texte écrit… il y avait la fin de…

MF : la phrase du rôle précédent…

MP : Et donc tu n’as pas conservé ce genre de texte.

GO : Pfff non. J’ les ai eus longtemps pourtant… [digression sur les possibilités de récupération de ce genre de document…].

GO : J’ai toujours eu un problème auditif… J’entendais pas le souffleur, pour ainsi dire. Fallait que j’ m’arrange… je me mettais de biais pour regarder le souffleur, le fait de le voir parler, et toc, ça y est, ça repartait.

MP : Il y avait un autre exemple : Jeanne Gaignet [cousine de MF] ?

MF : Elle connaissait le rôle de tout le monde… Elle était complètement sourde. Elle n’avait pas besoin du souffleur, elle. Elle connaissait tout par cœur (…).

GO : Elle me disait des fois : vous n’avez pas fini la dernière phrase. Elle connaissait tous les rôles par cœur. Elle jouait bien.

MF : Elle ne travaillait pas, mais ça ne lui enlève pas le mérite.

MP : Alors, pour les costumes, comment ça se passait ?

GO : Fallait se débrouiller, de toute façon, hein ! C’est Marie-Jeanne Texier [Fillon] qui faisait souvent venir les costumes à la fin. Mais avant je ne sais pas qui s’en occupait (…) vos parents… je sais pas… ils s’arrangeaient pour trouver des costumes.

AO : Il y avait des prêts d’autres paroisses (...)

Note de bas de page 20 :

Il en reste encore quelques-uns, très dégradés, dans une arrière-salle du Cercle (de la Paroisse : il ouvrait surtout le dimanche midi après la messe).

GO : Les décors aussi. Les paroisses autour venaient… Il y avait beaucoup de décors grâce à Constant Fillon, d’ailleurs20.

MP : Et alors, le public, lui ? Le public, ça a une importance… Comment tu le voyais, comment tu le percevais… ?

GO : C’était plein, généralement, de toute façon.

AO : 3 ou 4 séances, ça dépendait des années.

GO : On a joué une séance où il y avait pas beaucoup de monde… C’était pas une pièce qui plaisait, entre parenthèses… Ben j’ai refusé, je ne sais plus pour quelle pièce c’était, j’ai refusé mon rôle, une fois, oui. J’arrive plus à me souvenir du nom… qu’on n’a pas joué d’ailleurs. Parc que j’avais dit au curé Puaud, je pourrais pas rendre ce rôle-là, tel qu’il est, là. Ça marchera pas. Non, y pourrai pas le rendre. Ah, ben t’es sûr, dit-il ? Non, non, je pourrai pas le rendre. Ah mais, tu réfléchiras. Bon ben, j’ai réfléchi, puis il m’avait donné mon rôle, puis ça marcheras pas. C’est pas possible que je puisse faire ça. J’ me souviens plus en quelle circonstance, pourquoi. Et puis, à la fin, il a dit, si tu peux pas, tu peux pas. Puis ils ont trouvé une autre pièce. Pourtant, je leur ai dit, prenez-en un autre, non, non, ils ont trouvé une autre pièce.

MP : Mais qu’est-ce que vous sentiez comme retour, le type de public… il y avait des gens d’ailleurs ?

GO : Oui, sur la Tallée, Vouillé, l’Ile d’Elle, Sainte-Radégonde, Champagné, (…)

MF : Et nous nous allions au théâtre à l’extérieur.

MP : Et c’était pour chercher des inspirations ? Pour voir un peu comment ils faisaient ?

GO : Pour attirer les gens où on allait, quoi. On allait à Champagné parce qu’à Champagné, c’était réciproque. Les gens de Champagné venaient chez nous.

MP : Il y avait 130 places, avec des gens debout (…) Elles duraient combien de temps, ces pièces, parce que vous ne jouiez pas qu’une pièce à la fois, si ?

GO : Ah si ! Qu’une pièce.

MP : Parce que j’ai lu dans un bulletin, « exceptionnellement, on arrêtera à minuit et demi » (…).

GO : Ils ont beaucoup fait de pièces comme ça, des pièces qui étaient pas grande, quoi. Et puis ils trouvaient un petit comique après pour compléter, pour passer davantage de temps, quoi.

MP : Ça commençait à 20h30 (…) et ça durait jusqu’à 23h30, pas plus ?

MF : Y avait un tirage de la tambola après chaque pièce (…) ça gagnait des sous, là (…).

MP : Donc, ça faisait des sorties jusqu’à minuit (…) L’entracte, c’était…

MF : Vente de gâteaux, de boissons.

MP : Comment c’était réparti entre avant et après ?

GO : On voyait par rapport au nombre d’actes qu’il y avait dans la pièce (…) Et juste avant une décision importante par rapport à la pièce, quoi.

MF : Le suspens n’arrivait qu’après.

GO : Juste avant le suspens.

MP : Et pendant l’entracte, vous, vous faisiez quoi ?

GO : On mangeait des gâteaux [gratuits] et chacun discutait de l’ambiance…

MF : Qui maquillait les gens ?

Note de bas de page 21 :

Née Ollivier et belle-sœur de GO.

GO : Nénette Ferret l’a fait longtemps. Paulette21 [Gaignet] est venue aussi !

MF : Parce que, quand j’avais joué, pas dans Les Misérables, mais dans l’autre pièce, j’avais un vêtement de Mme Avril, la femme de l’instituteur, M. Avril, et je me souviens que tout mon col était plein de poudre. Et on était bien embêtés parce que, beh oui quoi, fallait le mettre au nettoyage. Et c’était Nénette [Ferret] que je me souviens qui m’avait bien poudrée (…) j’ai joué que 2 fois, dans les Misérables, puis une autre petite pièce… voilà, je me rappelle plus du nom.

GO : André Roussies avait joué dans Les Mystères de Paris, Dédé Roussie, oui. Son frère Paul, Paul Roussies, a joué aussi, hein… dans L’affaire du courrier de Lyon.

MP : Donc, je reviens toujours à mon public, c’était jeune, vieux, c’était mélange ?

GO : Je sais pas.

MP : Est-ce qu’on peut évaluer la proportion des « étrangers » ? 1sur 2 ? Moi, je ne m’en souviens pas, j’étais trop jeune. Y avait vraiment beaucoup de monde qui venait de l’extérieur ou pas ? Car je me dis… il y a 600 habitants à l’époque au Gué de Velluire, en 1950. Remplir 3 fois 130 places, ça fait 400 personnes, ça veut dire que tout le Gué de Velluire qui était debout allait le voir. Donc, en fait, c’est parce qu’il y avait des personnes de l’extérieur…

GO : Oui, qui venaient…

MF : Des échanges entre les paroisses.

GO : Pas à la première séance, généralement la première séance, c’était une répétition générale. Et puis, si la pièce était bien, ça se disait. Et puis les deux dimanches d’après, y en a qui venaient de l’extérieur pour voir la pièce.

MF : Le dimanche après-midi, c’était les familles avec les enfants. Thérèse Lacaille, avec sa fille…

AO : C’était une distraction où tout le monde pouvait aller en famille.

MF : Le dimanche après-midi, ça permettait de rentrer pas tard. Il y a ceux qui venaient sans voiture aussi.

MP : Et les Vêpres ? (…)

GO : A cause du théâtre, il y avait pas de vêpres, hein.

MF : (…) Oui, ben ce jour-là, il devait pas y avoir de vêpres [généralement à 15 h].

GO : Mais après tu sais, les curés, ça les intéressait le théâtre, hein, parce que c’est eux qui faisaient vivre les écoles libres. Alors, les rentrées d’argent, c’était intéressant pour eux.

MF : Ça nous évitait d’aller réclamer l’argent ( ? ? ?) à Luçon [évêché].

MP : C’est pour ça qu’il faudrait savoir le prix de cette séance (…)

GO : (…) Constant Fillon ramassait les sous…

MF : C’est lui qui collectait les sous après…

GO : Pas à la fin, mais au début, oui (…) C’est lui qui gérait le Cercle.

MP : C’était un peu le trésorier du conseil paroissial (…)

GO : C’est moi qui ai pris sa suite, quand il a arrêté, Constant Fillon (…) Le Cercle, ça rapportait de l’argent, c’est sûr. Puis autrefois, après la messe, les gens jouaient à la belote (…) le père Ulysse, Joseph Roussies (…).

MP : Est-ce qu’aujourd’hui, vous êtes intéressés par le théâtre ou pas.

GO : Y en a pas beaucoup à la télévision.

MP : Il y avait « Au théâtre ce soir » à une époque.

AO : Ça arrive qu’on en regarde, mais c’est rare (…) Y a pas beaucoup de belles pièces.

MF : A une époque, il y en avait quand même des pas mal. Marie-Jeanne [Texier] les regardait exprès à la télé, ça lui donnait des idées pour jouer…

MP : Donc vous ne vous précipitez pas spécialement sur tout théâtre qui apparaît à l’horizon pour…

GO : Ah mais, s’il y avait des belles pièce… y en a pas beaucoup ( ? ? ?) surtout pour voir, comment dirai-je, la façon des acteurs, voir comment ils débitent leurs rôles… J’aime regarder ça, comment ils font… la manière dont s’explique les gestes qu’ils font, ça ça m’intéresse (…).

MP : Est-ce que vous avez entendu dire que le Gué était abonné à une revue sur le théâtre.

GO : Dédé Ferret m’avait parlé, une fois, j’sais pas, mais enfin il me semble… j’en ai eu des échos, sûr…

MP : Que des revues sur le théâtre existaient.

GO : Oui, sûr (…).

MP : Est-ce que vous étiez complètement isolés ou est-ce que… (…) Marie-Jeanne m’a dit qu’elle achetait à des librairies, mais je n’ai pas entendu parler de revues. (…)

MF : A Champagné [-les-Marais], les théâtre qui se jouent, c’est encore pour l’école… Ils ont une école privée.

MP : Mais c’est fait par des adultes ?

MF : Ah oui. Même système.

MP : Donc, quand même, ça perdure.

MF : A Champagné, oui.

[liste de communes où se jouent toujours des pièces de théâtre, notamment Aubigny, Vix et Thorigny]

MF : Ulysse [Gaignet] et Marie-Thérèse [sa femme] y vont régulièrement ensemble avec Michel Girard et Pierrette [Girard]… C’est des très belles pièces qu’ils jouent là-bas (…).

GO : Ben, depuis que j’ai mon cancer, on sort presque plus (…)

MF : (…) Donc il y en a qui les court partout les théâtres (…)

AO : (…) Céline Ollivier [née Fillon et sœur de Marie-Jeanne Texier (cf. son entretien) ; mariée à Michel Ollivier, frère de Guy] a joué au Gué avant d’être metteur en scène à Vix (…)

Annexe

Église du Gué de Velluire, le 6 février 2018 : éloge funèbre rédigé et lu par Marie-Jo Gaignet (née Roussies)

Église du Gué de Velluire, le 6 février 2018 : éloge funèbre rédigé et lu par Marie-Jo Gaignet (née Roussies)