Chercher la définition du mot colifichet, suivre les conseils d’un jardinier pour soigner une plante malade, percevoir le parfum sucré d’une crème brûlée, s’informer en vue de l’acquisition d’une nouvelle maison, toutes ces activités, bien que radicalement distinctes, présentent pourtant des similitudes pour les chercheurs versés dans l’étude des comportements informationnels (Information Behavior). Donald O. Case, dans son ouvrage Looking for Information : A Survey of Research on Information Seeking, Needs and Behavior, collige l’ensemble des contenus disciplinaires relatifs à cette branche des sciences de l’information. En 2002, Case publie la première édition de cet ouvrage, lequel se voit attribuer le Best Information Science Book Award (décerné par l’Association for Information Science and Technology). Probablement dû à l’état lacunaire des écrits scientifiques synthétisant les connaissances d’alors relatives à l’étude des comportements informationnels, l’ouvrage s’impose rapidement comme une référence indispensable pour les étudiants et les chercheurs intéressés par ces problématiques. En 2007, Case publie une deuxième édition de son ouvrage, édition qui lui permet de faire état de nouvelles recherches dans ce champ d’études alors en plein essor. Cinq ans plus tard, ce professeur du College of Communication and Information de l’Université du Kentucky revient avec une 3e édition qui comporte quelques changements appréciables, mais surtout de nombreuses mises à jour.
Tout comme les éditions précédentes, l’ouvrage se présente en 5 parties regroupant au total 13 chapitres. Outre le changement d’éditeur – d’Academic Press à Emerald group –, l’ouvrage inclut aussi plusieurs nouveaux concepts et exemples. Case précise qu’il a particulièrement enrichi – et réorganisé – les chapitres traitant des théories et des modèles de recherche d’information (partie 3). Il mentionne aussi, avoir retiré une centaine de références et en avoir ajouté 350 nouvelles, un total d’environ 1 400 références.
La première partie de l’ouvrage introduit quelques notions élémentaires relatives à l’étude des comportements informationnels. Outre la définition des éléments terminologiques de base et la présentation des concepts fondamentaux, le premier chapitre insiste particulièrement sur le rôle de premier plan joué par l’humain, véritable point focal de ce champ d’études. Case formule par ailleurs quelques observations liminaires, lesquelles offrent au lecteur une bonne entrée en matière. Il présente notamment 10 mythes – initialement relevés et commentés par Dervin (1976) – qui entourent les comportements informationnels (ex. : il est toujours avantageux d’avoir plus d’information, l’information ne s’acquiert qu’à partir de sources formelles [livres, encyclopédies, etc.], l’information peut être transmise hors de son contexte). Enfin, le second et dernier chapitre de cette partie présente six scénarios (acheter un produit, trouver une information à la bibliothèque, gager sur une course de chevaux, trouver une loi, etc.) illustrant une variété de comportements informationnels. Grâce à eux, l’auteur met en relief la diversité des contextes d’études de ce champ tout en présentant aux lecteurs un certain nombre de concepts-clés explicités ultérieurement dans l’ouvrage.
La 2e partie identifie, présente puis explique – à des degrés d’exhaustivité variables – les concepts fondamentaux au cœur de l’étude des comportements informationnels. Dans un premier temps, l’auteur s’attarde sur la notion d’information. Comme le terme est largement employé, autant dans le langage commun que dans le langage spécialisé et scientifique, et ce, depuis plusieurs siècles, il ne se laisse pas aisément définir. En effet, aucune définition ne semble à ce jour faire l’unanimité. Par ailleurs, les définitions abondent. Tantôt très pointues ou plutôt sommaires, tantôt claires ou plutôt vagues – voire absconses –, les diverses définitions de l’information se déclinent en une variété de traits et de critères définitoires divers et parfois contradictoires. Ainsi, après avoir énuméré, exposé, expliqué et comparé les multiples conceptions de l’information, l’auteur relève un ensemble de divergences qui opposent les définitions actuelles. À défaut d’un réel consensus, l’auteur pose, en guise de conclusion, six postulats qu’il considère essentiels à l’élaboration d’une conception universelle de l’information. Dans un deuxième temps, Case approfondit les notions de besoins informationnels et de recherche d’information (information seeking). Pour terminer, l’auteur introduit et présente, plus brièvement, d’autres concepts centraux tels que la prise de décision, la sérendipité, la surcharge, l’anxiété et la pauvreté informationnelles, etc.
Case consacre le premier chapitre de la 3e partie aux modèles de recherche d’information. Il présente et explique principalement les modèles prédominants dans ce champ d’études, à savoir les modèles de Krikelas, d’Ellis, de Kuhlthau, de Leckie, de Byström et Järvelin, de Savolainen, de Johnson ainsi que les deux modèles de Wilson. Le chapitre est clôt par une brève présentation d’autres modèles présentant des caractéristiques particulières tels que ceux consacrés exclusivement au domaine de la santé. Les métathéories, les paradigmes et les principales théories formant les assises de ce champ d’études font l’objet du second chapitre. Case résume notamment, sous la forme d’un tableau condensé, une vingtaine de théories et de concepts centraux employés dans l’étude des comportements informationnels, tout en précisant les publications clés où ces théories sont présentées ou utilisées. En plus de cette recension théorique, ce chapitre vise aussi à établir des relations entre les diverses traditions de recherche dans ce champ d’études.
L’auteur consacre les deux dernières parties de l’ouvrage aux méthodologies employées pour l’étude des comportements informationnels ainsi qu’aux résultats de recherche des thèmes les plus étudiés. La partie 4 présente d’abord diverses considérations fondamentales pour l’établissement d’une démarche de recherche de qualité. L’auteur aborde ensuite les méthodes d’enquêtes employées régulièrement par les chercheurs de ce champ d’études et appuie chacune d’elles par un exemple. La 5e et dernière partie présente une revue des écrits relatifs à la recherche dans ce champ d’études. Case trace d’abord un historique des écrits puis propose une estimation de la taille de la recherche dans ce champ d’études. Il présente ensuite les thèmes les plus abordés par la recherche à l’heure actuelle. Pour ce faire, il divise ces thèmes selon trois catégories, à savoir la profession (journaliste, avocat, chercheur, etc.), le rôle social (citoyen, consommateur, patient, etc.) et le groupe démographique (âge, minorité ethnolinguistique, etc.). Par ailleurs, Case illustre chaque catégorie à l’aide d’au moins un exemple issu de la recherche dans ce champ d’études.
Pour terminer, l’ouvrage comporte deux appendices. Le premier présente un glossaire où les quelque 75 termes-clés employés dans l’ouvrage sont définis et brièvement expliqués. Le second dresse une liste d’une cinquantaine de questions et de réflexions, suivant les chapitres, au regard du contenu de l’ouvrage (ex. : Quelle quantité d’information rencontrons-nous chaque jour ? Une image vaut-elle réellement 1000 mots ? L’information peut-elle être considérée comme un besoin ?).
Le regard synthétique posé par l’auteur tout au long de l’ouvrage fournit une vision d’ensemble nécessaire à une compréhension globale des concepts et de la recherche relatifs à ce champ d’études. Malgré la charge informationnelle plus lourde de certaines parties (notamment les chapitres abordant les notions d’information, de besoins informationnels et de recherche d’information), potentiellement laborieuse pour des lecteurs néophytes, l’ouvrage reste globalement accessible notamment en raison de sa structure claire et de son organisation logique. Ainsi, si cet ouvrage s’adresse aux chercheurs et aux étudiants en sciences de l’information (et dans des disciplines connexes), les trois premières parties fourniront aussi à nombre de professionnels d’horizons variés (santé, éducation, design, vente, etc.), un bagage théorique qui pourra se révéler déterminant à plusieurs égards. En effet, une compréhension plus fine des activités et des pratiques informationnelles de leurs destinataires, que ce soit à titre de client, d’utilisateur, d’acheteur, de patient, de bénéficiaire, etc., leur offrira sans contredit des savoirs non négligeables pour faire face aux problématiques informationnelles complexes de leurs domaines respectifs.